Chapitre 1 :

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Je respire un grand coup.

C'est le moment ! Un large sourire sur mon visage, je présente mes billets à l'hôtesse et embarque dans le sas.

Ma nouvelle vie est sur le point de commencer... cette vie pour laquelle je patiente depuis neuf ans maintenant ! Neuf longues années à attendre patiemment, et bien qu'il m'a semblé à plusieurs reprises ne jamais arriver, le moment finit finalement par se présenter, celui de dire adieu à mon ancienne vie, celle de la petite fille plus ou moins banale et commune en apparences, se persuadant de ne pas avoir d'histoire, bien que sa vie est un réel désordre, bordel, voir un désastre. Mais cette vie est finie : je suis maintenant celle qui va vivre le rêve de la sienne, l'aventure qui représente son dernier espoir depuis des lustres.

Je m'installe dans l'avion et regarde par la fenêtre... je m'apprête à dire adieu à ma petite France que je ne n'ai pas quitté depuis plus de six années, pour dire bonjour aux Etats-Unis d'Amérique... cette pensée me fait sourire.

C'est mon moment, enfin.

Les dix heures de voyage me semblent être les plus longues de ma vie, mais je veux profiter de chaque minute pour penser à celle qui est sur le point de commencer : qui je veux être, comment je veux la vivre... et jeter à la poubelle mon ancienne, ainsi que la personne que j'étais, et celle que je suis devenue au fur et à mesure que le désastre que je suis grandissait. Cette vie est finie et j'en suis ravie. Ce n'est pas une nouvelle partie de la mienne qui commence, mais carrément une nouvelle qui prend place.

Pour penser à tout ça, rien de mieux que de la musique, la tête dans le hublot, qui est d'ailleurs juste à ma gauche, une chance pour moi j'en suis convaincue. De Damso à Andra Day, en passant par Vald, Stromae ou encore Elton John, ma playlist de musique triste mais pleine d'espoir m'a toujours réussi. Je ne peux pas m'en passer, et les musiques s'enchaînent sans arrêt pour mon plus grand plaisir.

Je me remets à penser à ma vie et à tout ce qui ne va pas, tout ce qui ne me plait pas, avant de m'en remettre à la triste conclusion que je ne trouve rien de positif à mon existence, en tout cas depuis mes douze ans. Chaque chose, chaque détail, l'ensemble, ou encore la cerise sur le gâteau... tout cela a fini par me détruire.

Cette playlist pour mes moments tristes, je l'ai tant écoutée, je la connais tellement par cœur ! J'espère tant que cette fois soit la dernière, que je n'aurais jamais à ré-appuyer sur le bouton play pour verser toutes les larmes de mon corps, étalée sur mon lit comme j'en ai, à mon plus grand malheur, pris l'habitude en France.

Une larme coule tout au long de ma joue, je la stoppe tout de suite : hors de question que je pleure en public, encore plus quelques jours avant de rencontrer les personnes qui m'ont choisi en tant que fille pendant dix mois.

C'est vrai que sur papier, devenir étudiante d'échange pendant dix mois aux États-Unis, et donc une vraie lycéenne locale le temps d'une année scolaire, ça parait... incroyable, un vrai rêve éveillé... si seulement je n'étais pas persuadée au fond de moi que si toutes les choses de ce genre que j'entreprends finissent par tourner au cauchemar cette année suivra le même chemin, je serais sûrement moins stressée et triste.

Je fais alors comme j'en ai pris l'habitude en m'imaginant ranger la tristesse dans une boîte et ouvrir celle du bonheur. Enfiler un masque devant les personnes me rassure, cela me donne un air forgé, confiante, heureuse... si seulement quelqu'un savait que la vérité est à l'opposé, et si moi-même, tellement habituée à porter ce masque que j'ai fini par y croire, me rendais compte de tout ce qu'il y a derrière, je pense que je n'y survivrais pas... cette pensée est triste mais réaliste : c'est horrible, mais j'ai la malheureuse habitude de ne m'autoriser aucun sentiment comme ça...

American DreamOù les histoires vivent. Découvrez maintenant