Chapitre 18

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Holly

Ce matin en me levant je redoute plus que tout la réaction de toutes les personnes du lycée lorsqu'ils me verront accrochée au bras du type m'ayant fait tant souffrir. Et si je me prenais de nouveau des remarques déplacées ? Après tout, j'en reçois tant ces derniers temps. Mais plus que tout, je redoute une altercation avec Luna. Finalement, sa prétendue mort avait beau paraître horrible, elle aurait été bien plus simple ! Je continue cependant de me demander comment personne n'a pu s'en douter étant donné l'absence de funérailles ou même de stupide photo commémorative dans l'enceinte du lycée.
Evidemment, en rentrant hier soir, je n'ai pas pu échapper à l'interrogatoire de mon frère et à vrai dire, j'ai été plutôt surprise qu'il voit d'un bon œil cette relation. Lui qui s'était décidé à haïr Kerian quelques semaines plus tôt, visiblement, il y a chez les Duchemin, quelque-chose qui nous pousse à leur pardonner leurs erreurs et trahisons ! Je mettrais ça sur le compte du fameux charme à la française ! Je sais cependant qu'il sera bien plus compliqué pour Rachel de digérer cette nouvelle.
Une fois enfin prête, je dévale les escaliers pour tomber nez à nez avec ma mère, enfilant sa paire de chaussures. Elle ne daigne pas lever les yeux dans ma direction.

- Il te fera encore souffrir, grogne-t-elle.

Elle attrape son sac à main et quitte la maison sans même me laisser le temps de répondre. Génial, en plus d'avoir cette Luna sur le dos, me voilà à devoir assumer cette guéguerre avec ma mère. Une semaine de repos serait trop demandée ? J'attrape mon sac de cours dans l'entrée avant d'enfiler des baskets et de monter dans la voiture de mon frère quelques minutes plus tard, Kerian ainsi que Rachel semblent déjà parti étant donné que la voiture de mon petit-ami n'est plus garée devant chez lui. Mon petit-ami ? Alors, Kerian est officiellement redevenu mon petit-ami ? Reste à voir s'il continue d'assumer cette relation avec une Luna dans les parages et ma terrible réputation. Je ne peux m'empêcher de serrer le collier offert par Kerian du plus fort que mes petites mains le permettent, si bien que mes doigts en deviennent rapidement blancs.

- Rachel est au courant ? Me souffle Owen.

- Non...

-Il vaudrait mieux qu'elle l'apprenne de ta bouche et non de ces connards du bahut, Holly.

J'ai une forte envie de l'applaudir pour avoir eu cette brillante idée ! Evidemment, je ne laisse pas transparaitre mon côté ironique ce matin. Bien évidemment que je sais que c'est à moi d'annoncer la nouvelle à ma meilleure amie et non aux sangsues se nourrissant de ragots que comportent ce lycée. Voilà encore un matin compliqué, oh si vous saviez à quel point je rêve de vacances loin d'ici, loin de toute cette agitation et de cette pression exercée par la moindre personne ayant le malheur de m'entourer.
Je reste silencieuse tout le reste du trajet et lorsqu'Owen se gare sur le parking du lycée, j'aperçois la chevelure blonde de Kerian au loin, mon cœur s'accélère instantanément et ma respiration devient saccadée. Lui, au contraire, accourt jusqu'à la voiture un large sourire aux lèvres. Je ne vois Rachel nulle part en revanche. Lorsque je sors enfin de la voiture de mon aîné, j'ai la vague impression de sentir tous les regards se poser sur moi. Une nouvelle fois, je me sens comme un vulgaire animal de foire scruté de tout part. Ce sentiment semble disparaître à la minute même ou les lèvres de Kerian s'écrasent sur les miennes, comme si tout ce qui avait le malheur de se trouver autour disparaissait, nous laissant, Kerian et moi, dans une utopique bulle l'espace d'une minute.

- Tu n'es qu'une salope, Holly Jensen.

Le beuglement viril derrière moi me fait sursauter, je reconnais cependant instantanément la voix de Leo et lorsque je me tourne dans sa direction, le brun à la mèche pendante semble hors d'haleine.

- Pardon ?

- Tu as très bien entendu. Tu retournes vers ce connard comme si de rien n'était. Comme s'il n'avait pas joué avec toi.

Le grognement de Kerian qui se trouve posté derrière moi me fait rire. C'est incroyable, avec tous les problèmes que nous avons depuis le début de notre relation, n'importe quelle personne saine d'esprit aurait décidé de couper court à ce carnage ! Il faut croire que la folie du beau blond m'a bel et bien atteinte.

- Ce ne sont pas tes affaires, Leo. Tu n'as pas à me dire avec qui je sors.

Il s'approche de moi en furie et en moins d'une demi seconde, je me retrouve derrière Kerian, ce dernier fait désormais face au grand brun tandis que sa main empoigne fermement mon bras sans doute dans le but de me faire me tenir à l'écart.

- Ça l'est si tu n'arrêtes pas de faire des allers retours entre ce connard et moi.

Tous les regards s'étant posés dans notre direction semblent accusateurs, il a raison, depuis le début je n'arrête pas de faire des allers retours entre Leo et Kerian. Je m'en veux qu'il ait pensé que je pourrais vouloir quelque-chose de sérieux avec lui, après tout, sortir avec lui n'a toujours été qu'un moyen de ne plus penser à Kerian. Je n'ai pas l'habitude d'agir de la sorte avec les gens et je le regrette fortement. Je ne sais pas si, un jour, j'aurais pu tomber amoureuse de Leo comme je le suis de Kerian à ce moment précis, pas même avec la meilleure volonté du monde.

- Tu as raison, elle a fait des allers retours, puis elle s'est rendu compte qu'un gamin comme toi ne l'intéressait pas. Holly ne sera jamais avec toi, elle ne t'aimera jamais et tu sais pourquoi ? Parce-que tu n'as été qu'une putain d'éponge pour absorber ses larmes le temps qu'elle se rende compte de qui elle aime vraiment.

La voix sèche de Kerian me fait froid dans le dos, il vient tout juste de dire à Leo l'intégralité de ce que j'ai toujours ressenti envers lui, et c'est à mon plus grand désarroi que je ne parviens pas à me sentir coupable. Je ne parviens pas le moins du monde à me sentir mal de l'avoir traité de la sorte, je m'en veux simplement de l'avoir fait espérer de la sorte, mais en aucun point de l'avoir utilisé comme bouquet misère.
Les yeux de Leo sont rougis par la colère.

- Très bien, mais... je t'aime Holly, je t'aime et je te respecterai toujours plus que cet idiot. Je te promets qu'un jour tu seras mienne, je n'aurais cas attendre sa prochaine erreur, et cette fois je ne te laisserai plus repartir. Cette fois, je te rendrais plus heureuse que tu ne l'as jamais été, plus de bagarre, plus de sang, plus de pleurs et je te promets que je ferai de toi la femme la plus heureuse du monde. Je t'attendrai Holly.

J'en reste sans voix, son discours me prend littéralement aux tripes. Et s'il avait raison ? Si Kerian faisait de nouveau une erreur ? S'il fautait encore une fois, je ne le supporterai pas. Et à cet instant, qu'est-ce que je ferais ? Une fois que je l'aurais réellement perdu pour de bon, une fois qu'il m'aura tant déçu qu'il m'aura dégoûté de lui ? Est-ce que je pourrais revenir vers Leo ? Il est évident que je n'aime pas Leo, pas le moins du monde, j'aimais cependant la simplicité de cette courte relation. Je n'ai pas le temps de répondre qu'il tourne les talons sans toucher un cheveu de Kerian. Tant mieux, je commence à en avoir assez de toutes ces bagarres, je crois avoir explosé mon cotât pour l'année.

- Et bien, les matins dans ce bahut sont toujours aussi agités ! Chantonne Jil tout en déposant son coude sur l'épaule de Kerian.

Sandy explose de rire tandis que la rouquine se tourne dans ma direction, un demi-sourire aux lèvres.

- Ecoute, Jensen, toi et moi on ne sera jamais de grandes amies mais... je crois qu'on pourrait essayer d'avoir des relations... normales, je veux dire, sans risquer de se tuer à chaque intercours si tu vois ce que je veux dire !

Je glousse. Je pensais ne jamais avoir cette discussion avec Jil. A vrai dire, depuis qu'elle m'a tout révélé à propos des manigances de Kerian je ne voyais plus réellement Jil comme à proprement dit mon ennemie. Je me contentais d'observer sa manière de changer au contact de Sandy, et ces changements me plaisent. En voyant mon air interloqué, elle reprend :

- Encore une chose demi portion, pas de soirée pyjama débiles pour « sceller notre amitié » ni de bracelet bidons et encore moins de... câlins et toutes ces conneries.

Cette fois, j'explose de rire. Disons que je m'en contenterais, il est pour ainsi dire impossible de balayer des mois de haine avec quelques excuses et je suis consciente qu'elles n'auraient jamais eu lieu sans l'arrivée inopinée de Luna.

Soulmate - Tome 2Où les histoires vivent. Découvrez maintenant