Chapitre 47

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Kerian

Putain de journal, ça va faire deux jours que je ne me suis pas pointé au bahut, en réalité, j'ai fait l'effort d'y emmener Rachel, je suis descendu de la voiture, balayant du regard tout le parvis du bahut à la recherche d'Holly. Mais rien, elle n'était pas là et en voyant ma cadette la chercher du regard de la même manière que moi, je n'ai pas pu me résoudre à faire un pas de plus et me confronter à son regard empli de reproches et de colère.
Je comprends que ma sœur me déteste de la même manière que je comprends qu'Holly le fasse. Je ne peux m'empêcher de me demander comment cette dernière a bien pu tomber amoureuse de moi. Comment elle a pu tomber sous mon charme et continuer d'y croire alors que je ne faisais que réduire son cœur en miette. Je le détruisais un peu plus à chaque connerie. Je ne suis qu'un putain de connard égocentrique, mais ça putain de journal, tu le sais déjà. Comme tout le monde.

Refusant de me confronter à la tristesse d'Holly si cette dernière se pointait au lycée, j'ai donc décidé de me tirer. Regagnant ma baraque et plongeant presque instantanément et à moitié habillé dans la piscine. Je n'ai daigné retirer que mon teeshirt et mes boots, bien trop fatigué pour entreprendre de retirer ce putain de jean.
L'eau fraîche en contraste avec ma peau brûlante de colère ne m'a fait du bien que l'espace de quelques secondes. Puis tout mon mal-être semble avoir réapparu tel une immense vague se fracassant avec une violence inhumaine contre ma personne.
J'ai bien dû rester une bonne heure dans l'eau avant de regagner ma chambre et m'étendre sur mon lit pour écrire dans ce foutu journal. Qu'est-ce que je cherche à prouver ? Qu'est-ce que j'essaye de faire ? Attiser la pitié d'Holly si elle le récupérait ? C'est stupide. Elle n'a pas à avoir pitié de moi.

- Va te préparer, je t'emmène manger quelque part.

C'est la voix de Charlie qui me sort de mes pensées, me faisant bondir de mon pieu.
Je me demande bien ce qu'elle peut foutre avec moi. Je ne peut cesser de me demander comment une fille comme elle peut vouloir traîner avec un connard comme moi.

- Qui t'as laissé entrer ?

- Lucas. Allez, bouge toi d'aller te préparer.

Elle me reluque de haut en bas, se marrant en s'apercevant que je ne porte qu'un caleçon.

- Pourquoi ?

- Parce que, Kerian, c'est ton putain d'anniversaire. Et il est hors de question que je te laisse broyer du noir seul dans ton coin le soir de ton dix-huitième anniversaire.

Mes dix-huit ans. Putain quelle connerie. En France je pourrais enfin me bourrer la gueule légalement à cet âge là.
Qu'est-ce qu'elle peut bien faire ce soir ? Qu'est-ce qu'elle a bien pu faire aujourd'hui pour notre anniversaire ? Je veux dire, le sien. Avec qui est-ce qu'elle peut être putain ? Je donnerai cher pour le savoir. Pour pouvoir entendre éclater son rire à le seconde même où elle aurait ouvert les cadeaux que j'avais choisi pour elle. Cette journée devait nous appartenir, elle devait être à nous, rien qu'à nous. Pas de disputes, pas de Luna, pas de Leo ni aucun sujet disgracieux.

- Est-ce qu'il y a du monde chez elle ?

- Chez Holly ? Non. Je n'ai vu personne.

Putain, mais où est-ce qu'elle peut bien être ? Et si elle passait son anniversaire seule ? Non. C'est impossible. Owen, Jil, Sandy et Rachel ne la laisserait pas broyer du noir seule. Jamais. Du moins je crois. J'espère.
Merde, je dois à tout prix sortir de cette baraque, j'ai la vague impression de sentir le parfum fruité de la blondinette sur mon oreiller. D'entendre son rire éclater dans la pièce.
Charlie grogne bruyamment avant de se ruer vers mon armoire, d'en extirper un jean noir ainsi qu'une chemise bordeaux et de me les jeter au visage.

- Enfile ça.

- Hors de question que je porte une putain de chemise !

Je vois bien que je la rend folle, à cet instant précis elle aimerait m'en foutre une et de tirer de ma baraque ! Et en fait, je la comprends. A sa place je me serais tiré depuis longtemps. A sa place, je n'aurais même pas aidé cet ado paumé dans ce foutu bar il y a quelques années.

- Écoute moi bien petit con, tu peux t'apitoyer sur ton sort tant que tu voudras, ça ne la fera pas revenir. Tu as merdé, encore, alors putain cette fois essaye de passer à autre chose plutôt que de continuer à souffrir et la faire souffrir.

Elle n'a pas hurlé. Sa voix était incroyablement sèche et monotone, elle n'a pas non plus bougé d'un poil. Cet aspect stoïque le fout la frousse ! En réalité, Charlie est la seule personne de qui je pourrais pleinement assumer être terrifié.

- Bien. J'arrive.

Elle effectue un sourire tout ce qu'il y a de plus faux avant de tourner les talons et quitter la chambre. Cette nana est vraiment pas croyable ! Au fond de moi j'avoue plaindre le type qui fera sa vie avec elle. J'espère que cet idiot aura le cœur bien accroché !

Quand Charlie et moi arrivons sur Hollywood Beach aux alentours de vingt et une heure après avoir bu quelques bières au bar, nous entrons dans le premier restaurant situé sur le bord de cette vaste étendu de sable.

- Deux personnes. Ah et, c'est son anniversaire !

Je brandit un doigt d'honneur devant la face de la brune aux cheveux courts face à moi avant de suivre le serveur jusqu'à une table. Le petit jeune se marre. Quoi ? Il veut mon poing dans la gueule ?

- Et bien, encore un anniversaire !

Mon cœur bondit.

- Encore ?

- Oui. C'est aussi l'anniversaire de la jeune fille là-bas. Une soirée en amoureux, quoi de plus romantique !

Je suis la ligne du regard du serveur avant de reculer de deux grands pas. Putain de merde. Je dois me tirer d'ici. Il faut que je me tire tout de suite. En amoureux ? Je dois me barrer de ce restaurant avant que l'envie de péter la gueule de cet enfoiré de Leo ne s'intensifie.
Je me laisse cependant tomber sur ma chaise, comme si je n'avais même pas la force de prendre mes jambes à mon cou pour me tirer. Et plus je l'observe, plus ma respiration devient saccadée, mon pouls s'accélère et ma gorge se noue. Putain, qu'est-ce que c'est que cette merde qu'elle porte ? Une foutue robe rose. Elle déteste le rose. Pourquoi est-ce qu'elle porterai ça ?

- Je dois me tirer.

- Quoi ?

- Elle est là, je dois me tirer tout de suite.

Charlie fait volte-face avant de laisser échapper un petit cri la faisant se retourner. Je n'ose même pas croiser son regard.

- Putain, je te promet de tout t'expliquer mais... on doit se tirer d'ici tout de suite.

- Ok. On se tire.

Soulmate - Tome 2Où les histoires vivent. Découvrez maintenant