Chapitre 2

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Kerian

Comment se fait-il que Sandy soit ici ? Moi qui la pensais parti dans le Colorado. Putain, on ne peut même pas s'absenter pendant un moment sans que tout ne change dans cette foutue ville. Elle aussi doit me haïr. Comme à peu près tous mes anciens amis j'imagine !

- Sandy ? Qu'est-ce... qu'est-ce que tu fous là ?

Elle attrape mon avant-bras puis me tire en direction d'un box au fond de la pièce. Le whisky commence à faire son effet tandis que je titube jusqu'à la table en question. Je ne suis qu'à moitié surpris en voyant Jil.

- Comment tu te sens ?

La voix suraiguë de la rousse me donne envie de lui en coller une. Depuis quand prétend-elle me vouloir du bien ? Le rôle de petite fille modèle et bienveillante ne colle pas au personnage.

- Qu'est-ce que t'en a à foutre ?

Sandy me livre un violent coup à l'arrière de la tête tandis que je m'apprête à m'asseoir. Putain, je ne suis pas venu ici pour me faire emmerder par une conne et l'ex meuf de mon meilleur-pote.

- C'est ça ton problème, Kerian. Tu repousses quiconque essaye de t'aider. Tu n'es qu'un con, crache Jil avant d'avaler une gorgée d'une étrange boisson rouge.

- Je sais.

Elles restent bouché bée. Mais c'est la triste vérité. Je ne suis qu'un con, qu'un connard vulgaire et égocentrique loin d'être digne d'être aimé par une fleur si tendre qu'Holly Jensen.

- Holly revient toujours, Kerian, murmure Sandy tout en déposant sa main sur mon avant-bras.

- Pas cette fois, le jeu a été trop loin. J'aurais dû lui dire avant, et puis cette vidéo... elle ne me pardonnera jamais.

- Si j'avais été là j'aurai enfoncé mon poing dans la sale gueule de ce con de Peter.

Je ne peux m'empêcher de pouffer de rire. Je dois avouer que ce n'est pas l'envie qui me manque. Mais je ne peux m'en vouloir qu'à moi-même. C'est moi qui ai pris cette vidéo, moi qui lui ai montré, moi qui ai accepté le pari.

- En parlant de ça, qu'est-ce que tu fais là ?

- En fait, je suis arrivée il y a moins d'une heure. Il y a eu un problème avec mon bahut là-bas alors mon oncle a accepté de m'accueillir jusqu'à la fin de l'année.

Je dois avouer que Sandy m'a manqué, sa bonne humeur a toujours été communicative et son vocabulaire de charretier à mourir de rire. Je me demande bien ce qu'elle et Jil peuvent bien avoir à se raconter. Après tout, elles se haïssaient quelques semaines en arrière !

J'ai beau tenter de penser à autre chose, je n'y parviens pas. Je n'arrive pas à me la retirer de la tête. Je ne parviens pas à gommer son doux minois de mon stupide cerveau. Jusqu'à maintenant, Holly est toujours revenue. Et je savais pertinemment et de manière égoïste qu'elle reviendrai, je n'en doutais pas une seconde. Cette fois, c'est différent. Plus les heures passent, et plus je sens qu'elle m'échappe pour de bon. Je suis pour ainsi dire perdu, ne sachant ni quoi faire, ni quoi penser.

- Kerian, tu es avec nous ?

La voix de Sandy me ramène à moi. Merde, Kerian. Arrête d'y penser, arrête de penser à elle. Il est impossible qu'elle ait pris une si grande place dans ta vie.

- Quoi ?

- Je te demandais si tu t'étais pointé chez elle.

- Qu'est-ce que tu crois ? Mais... elle m'a dit de me tirer avant qu'elle ne se décider à appeler les flics.

- Tu dois la laisser réfléchir. Ce n'est pas quelque-chose d'anodin et je peux te jurer que la semaine a été très compliquée pour elle.

Jil a raison, cette semaine a dû lui paraitre interminable. Je n'ose pas imaginer tous ces gamins lui collant les basques, tous ces cons alimentant les bruits de couloirs. J'aurais dû être là, j'aurais dû casser la gueule à ces merdeux. Peut-être m'aurait-elle pardonné. Peut-être aurait-elle eu pitié de moi. Mais je suis un lâche, je me suis sauvé tel un putain de lâche dans le seul et unique but de fuir les problèmes.
Je m'apprête à ouvrir la bouche quand mon téléphone se met à retentir. Puis celui de Jil et pour finir, celui de Sandy. J'ose espérer que ce n'est pas cette foutue vidéo qui continue de tourner.

- Kerian, tu déconnes ou quoi ? On est juste à côté de toi ! Plaisante Sandy tout en balançant son téléphone sur la table.

- C'est vrai, j'avais oublié que j'envoyais des textos par la seule putain de force de ma pensée, Sandy !

Je jette un œil à mon mobile et crois halluciner en m'apercevant que ce message provient bel et bien de mon ancien téléphone.

- Ce n'est pas... mon numéro, je veux dire, c'est mon ancien numéro.

Un horrible mal de crâne s'empare de moi au moment même où je me mets à en lire le contenu.

"Rendez-vous devant le lycée demain matin".

Demain matin ? De qui peut bien provenir ce message ? Je n'ai pas le temps de me poser plus de question que la porte s'ouvre bruyamment sur un groupe d'adolescents déjà assez éméchés. Et là, mon sang ne fait qu'un tour et mon pouls s'accélère. Il est là, un sourire tout ce qu'il y a de plus faux aux lèvres, une légère mèche retombant sur son putain de visage de gosse, une horrible veste en cuir et de bruyantes boots. Leo. Je dois me faire violence pour ne pas me lever et le vider de son sang.
Nous voyant, l'air grave, elle s'approche de nous a pas de loups. Putain de merde, j'aurais dû rester chez moi.

- Vous l'avez reçu aussi ? Chantonne Evy tout en s'approchant de nous.

Le blaireau rejoint alors Evy. Je me demande bien pourquoi elle se coltine ce connard. Une nouvelle fois, je contiens en moi une irrépressible envie de cogner sa gueule faussement angélique contre la table.

- On peut au moins être sûr que ce n'est pas Holly. Sinon, elle ne t'aurais pas envoyé le message !

La remarque du blaireau me fait perdre tout contrôle. Je me lève d'un bond, attrape son cou que je serre si fort que mon poing me le permet avant de repousser son corps de petit merdeux contre un mur. Jil et Sandy accourt dans ma direction dans le but de me calmer mais ça ne marche pas. Je ne parviens pas à décoller mes mains de sa gorge.

- Ne parle pas d'elle ! Je hurle.

- Tu l'as perdu, Kerian. Et maintenant, à moi de prendre la relève.

C'est alors qu'une grande main s'empare de mon bras pour me tirer violemment en arrière. J'abdique, laissant le blaireau s'enfuir en courant. Quel connard, j'aurais sa peau. Je me refuse à le laisser s'approcher de ma Holly.

Soulmate - Tome 2Où les histoires vivent. Découvrez maintenant