Chapitre XXXIX

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Je m'appliquai à éviter Jade tout le reste de la journée. La situation ne s'améliora clairement pas grâce à ça, mais au moins je n'avais pas à subir la vague de désespoir qui m'envahissait à chaque fois qu'elle se tenait devant moi. Dès que je rentrai chez moi, je ne pus m'empêcher d'appeler ma sœur. Il fallait que je lui parle de toute urgence. Mon premier appel fut un échec cuisant. Elle qui avait son téléphone greffé à la maison, ça m'étonnait vraiment de sa part. Je fus rassurée quand, quelques secondes plus tard à peine, ma sœur me rappela.


- « Salut frangin ! Comment ça va ? »

- « Pas très bien. » lui avouai-je de but en blanc.

- « Qu'est-ce qu'il y a ? » s'inquiéta-t-elle. « Ça fait super longtemps que j'ai pas eu de tes nouvelles, je commençais à me dire que les choses allaient mieux. »

- « Loin de là. »

- « Bon bah raconte au lieu de faire du suspens ! »


Je soupirai.


- « J'ai couché avec Jade. »

- « Bordel de merde Marco mais t'es complètement con ou tu le fais exprès ? Mais t'as une bite à la place du cerveau mon pauvre j'ai rarement vu ça, je suis ... »


Je décollai le téléphone de mon oreille, attendant que ma sœur ait fini de hurler. Lorsque finalement je n'entendis plus rien d'autre que le silence, je repris la conversation.


- « T'as fini ? » soupirai-je. « Je t'ai pas appelée pour avoir une leçon de morale, sinon j'aurais carrément prévenu papa. »


Ma sœur soupira à son tour, visiblement plus calme.


- « Je suis désolée, j'ai juste été ... surprise. » lança-t-elle. « Continue, je t'écoute. »

- « C'était génial. Elle est drôle, brillante, sensible, sublime ... tout allait vraiment bien, mais à peine deux jours plus tard, je me fais convoquer par le proviseur de mon lycée avec Jade et son connard d'ex qui nous a accusé de coucher ensemble. »

- « En même temps il avait pas tort. » grommela ma sœur.

- « Alice, bordel ! »

- « J'arrête, j'arrête. Et ensuite ? »

- « Ensuite, j'ai dit à Jade qu'on ne pouvait plus continuer. » lui révélai-je, le cœur serré rien que d'y repenser.

- « Elle l'a pris comment ? »

- « Beaucoup mieux que ce que je pensais. Elle n'a ni crié, ni pleuré. »

- « C'est ça pour toi bien prendre les choses ? »

- « J'en sais rien Lili ! Je sais plus quoi penser là ! » m'emportai-je.

- « Cette pauvre fille doit sûrement être très mal. T'es malheureux toi, alors tu crois vraiment qu'elle est au top elle ? T'as rien compris aux filles mon pauvre. »

- « Alice merde ! »

- « Désolée Marco, mais là j'ai plus le choix. T'as été un vrai crétin tu vas assumer mon pote. Bon, je dois y aller frérot, j'espère que tu m'en veux pas, mais j'ai pas le choix. » me lança-t-elle avant de raccrocher précipitamment.


Bon... ok. Apparemment j'allais devoir me débrouiller tout seul. En même temps je l'avais peut-être mérité. J'allais devoir faire face aux conséquences de mes conneries tout seul. Et j'allais surtout devoir affronter le regard de Jade tous les jours jusqu'à la fin de cette putain d'année scolaire, et Dieu sait qu'elle allait être encore très longue. La semaine passa tellement lentement, que j'avais du mal à imaginer comment le reste de l'année allait se dérouler. Chaque jour de cette semaine de merde me parut plus long que le précédent. Les pires heures de la semaine avaient bien évidemment été celles où j'avais eu la classe de Jade. Cette dernière s'appliquait à éviter mon regard avec un peu plus de motivation que nécessaire. Elle me haïssait de tout son cœur, je le sentais. La colère qui émanait d'elle à chaque fois que je passais à côté d'elle suffisait à me le prouver. Elle avait pris ma décision beaucoup plus mal que prévu en réalité ... J'avais été vraiment con de penser que nous pourrions faire comme si de rien n'était. Comme si il ne s'était jamais rien passé entre nous. Certes, ça n'avait pas duré longtemps, mais la passion qu'il y avait entre nous était beaucoup trop ardente pour être oubliée si vite. Pour être oubliée tout court même, j'en avais bien peur ... J'étais raide dingue d'elle. J'avais vraiment besoin de me changer les idées. Nous étions samedi soir, et là tout de suite maintenant, j'avais juste envie d'aller me bourrer la gueule avec mes potes. Je passai donc quelques coups de téléphone, et à peine un quart d'heure plus tard, mes amis débarquaient chez moi pour me traîner dans un bar. Nous étions tous là, sauf Rafa qui stressait de plus en plus pour l'accouchement imminent de Chloé. Tant pis, l'alcool aurait le même goût avec ou sans lui ...







6h45. Lundi matin. Je me réveillai avec un mal de tête carabiné.Apparemment,mon samedi n'avait pas été suffisent pour décuver.Cela ne m'étonnait qu'à moitié à vrai dire, vu la cuite que j'avais pris. Je tenais à peine debout lorsque mes amis m'avaient raccompagné. Ils avaient certainement du se demander pourquoi je m'étais mis dans un état pareil, mais ils n'avaient posé aucune question, et tant mieux. Je n'avais pas du tout envie de parler de Jade. Je sortis tant bien que mal de mon lit et filai prendre un doliprane de toute urgence. Je ne déjeunai rien contrairement à d'habitude car je sentais que je vomirais le moindre aliment qui entrerait dans ma bouche. Je me glissai plutôt sous une bonne douche chaude, ce qui eut le mérite de me détendre immédiatement. Je restai dessus bien plus longtemps que nécessaire, profitant des bienfaits de l'eau sur ma peau. Malheureusement, j'y restai un peu trop longuement puisque lorsque je sortis enfin de la cabine, je me rendis compte que j'étais très à la bourre. Je m'habillais à la hâte et descendis les escaliers quatre à quatre pour monter en voiture. Je roulai comme un taré et arrivai finalement avec un peu d'avance. Je zappai néanmoins la salle des profs et montai directement dans ma salle. Je n'avais envie de voir personne. Je fis de même au troisième étage en évitant l'espace réservé aux profs de maths et filai le plus discrètement possible m'enfermer dans ma salle. Il me restait une petite dizaine de minutes avant que mes élèves arrivent. J'allais souffler un bon coup et tout irait bien ! Une fois cette première heure terminée et Jade loin de ma vue, tout irait mieux. Je m'assis péniblement à mon bureau et allumai le très performant ordinateur fourni par l'établissement.Le temps que la bête démarre, je fermai un peu les stores de toutes les fenêtres. Je décuvai encore et la lumière du petit matin n'allait pas tarder à me tuer les yeux. La sonnerie retentit soudain, me faisant sursauter. Bordel de merde. Jade et toute sa classe allait débarquer d'une seconde à l'autre. Un premier élève fit son apparition, puis un seconde, puis un troupeau, avant en fin de peloton Mathis, Léa et ... Jade ?! Bordel qu'est-ce qu'il lui était arrivée ??? Ses cheveux auparavant blonds, presque blancs, étaient à présent teints dans une superbe couleur brune avec des reflets chauds. Elle était sublime. A couper le souffle.Elle me regarda droit dans les yeux avant de finalement détourner le regard. Je la suivis des yeux jusqu'à ce qu'elle aille s'asseoir.Elle releva la tête par moi et m'aperçus en train de la fixer. Elle devait me prendre pour un abruti. J'étais en plein beug. Je n'avais envie de qu'une seule chose : l'embrasser comme un fou en passant la main dans sa nouvelle crinière de déesse. Elle semblait plus énervée qu'autre chose. Elle avait visiblement décrété que notre nouvelle relation se limiterait à des regards froids et gênés.En même temps, je ne pouvais pas lui en vouloir. Bordel, cette semaine s'annonçait aussi longue que la précédente ...

Une histoire impossibleOù les histoires vivent. Découvrez maintenant