Alliance explosive 1 (Terminée)

11 - Ne pas flancher

Novembre 2018

Les deux derniers jours de la semaine sont comme le final d'un orchestre symphonique : plus la fin approche, plus cela monte en crescendo.

Malgré ma bonne volonté pour résister aux esprits diaboliques de la boite, je manque craquer vendredi après-midi. Il faut dire que les remarques désagréables de mon supérieur sont difficiles à avaler. Tel un lion en cage à ne pas pouvoir user de la liberté de parole pour dire ce que je pense de cet être odieux, je rumine toute seule dans ma pièce et lorsque je vois ce dernier quitter son bureau, je rouspète.

« Putain de stagiaires qui ne savent rien faire »,répété-je en remuant la tête et refermant le dernier dossier que j'avais à traiter.

Cette fois-ci, les documents n'ont pas été pris dans la pile des refus. Enfin je l'espère du moins... Je soupire avant de réciter une autre insulte de Hutson. Je pourrais presque écrire un livre avec toutes ses remarques cinglantes. Il en sort tellement à longueur de journée que je me demande à quoi ressemblerait mon petit recueil de réflexions à la fin de mon stage... enfin, si j'en écrivais un, évidemment.

Parce que je sais désormais que c'est son heure de pause, je décide de me détendre moi aussi en sortant mon portable pour textoter avec Collen.

De Nikki à Co : « Alors Riley est toujours convoqué au tribunal ou vous avez pu gérer l'affaire ? »

Les pieds sur la chaise à côté de la mienne, les doigts tapant nerveusement sur mon bureau, j'attends la réponse de mon amie, qui ne tarde pas à arriver.

De Co à Nikki : « Non malheureusement. Son casier judiciaire... Je m'en veux tellement Nikki. Si seulement... »

Tout en reprenant une posture convenable, je me mords la lèvre en lisant la réponse de Colleen. Je déteste me sentir inutile et c'est ce que je suis en ce moment.

De Nikki à Co : « Ce n'est pas ta faute si un con t'a insultée. Ce n'est pas non plus la faute de Riley s'il a voulu défendre sa dulcinée. »

La réponse de cette dernière arrive quelques secondes plus tard.

De Co à Nikki : « Si seulement tu pouvais être son avocate ! »

Je soupire en lisant sa phrase. Ce n'est pas d'avocat qu'aurait besoin Riley, juste de personnes aptes à comprendre la situation et surtout que l'autre con reconnaisse ses torts et arrête de vouloir se faire passer pour la victime. Colleen m'a dit que Riley ne l'avait frappé qu'une seule fois et je suis certaine que l'autre a menti sur les faits.

C'est toujours comme ça de toute façon, l'attaquant se fait passer pour la victime et les gens qui jugent suivent aveuglement celui qui a plus de force et d'audace dans sa démarche... Il suffit de voir qui est responsable marketing et futur directeur de la boite entre monsieur Hills et Hutson... Cette faiblesse humaine et ce goût pour la perversion règnent partout dans ce monde.

Tout en verrouillant mon portable, je regarde mes stylos et secoue la tête. J'espère que ce n'est pas l'autre qui remportera l'affaire.

Je donne un coup d'œil vers l'horloge au-dessus de l'encadrement de la porte et après deux secondes d'hésitation, attrape mon téléphone et me lève. Pourquoi Hutson aurait le droit de se balader dans les couloirs et pas moi ? Encore un jugement basé sur un sentiment de supériorité ! Les employés ont autant le droit de se promener dans les couloirs que les patrons. Après tout, avant notre statut professionnel, nous sommes tous humains et avons les mêmes droits, non ?

Lorsque j'arrive dans la pièce principale, j'observe les employés. Voilà désormais une semaine que je bosse ici, ou presque et hormis lundi, je n'ai pas revu monsieur Hills. C'est comme s'il avait disparu. Et comment vais-je faire moi si je n'ai plus personne avec qui parler ?