Kalam frissonna. Le climat d'Alembras lui convenait moins que celui du désert ! Les températures estivales suffoquaient tous les habitants d'Amaris, sauf ceux qui, comme lui, avaient toujours été habitué à la chaleur étouffante du désert. Il portait des vêtements trop légers mais n'osa pas réclamer une cape à son père. Un vrai guerrier ne se plaignait pas. Il endurait, il attendait des jours meilleurs.
Il se frotta discrètement les bras et admira les feuillages verts qui s'étendaient à perte de vue au-dessus de sa tête. Depuis son départ du désert, il découvrait une multitude de nouveautés éblouissantes. Tout était si différent de la vie qu'il menait au sein de son clan !
La faune, la flore, les coutumes...Son clan ne possédait pas de livres mais les anciens transmettaient le savoir à l'oral. Kalam adorait les écouter parler du monde qui s'étendait au-delà de la mer de sable et du soleil flamboyant. Il ne s'attendait pas à poser un pied dans cet univers si étrange !
Il trébucha sur une racine à cause de ses observations rêveuses. Son père, qui menait la tête de leur expédition, émit un claquement de langue agacé.
- Surveille tes pieds Kalam.
Le garçon obéit tant bien que mal. Il n'avait pas l'habitude de tous ces obstacles sur sa route ! Mais cette excuse ne fonctionnerait pas pour attendrir son père. En tant que meilleur guerrier de la tribu, Reydan se montrait strict, en particulier envers son fils. Il lui apprenait à se battre depuis que Kalam était en âge de marcher.
Grâce à son père, Kalam maniait déjà la lance à double tête des guerriers avec une certaine aisance. On lui répétait souvent qu'il deviendrait un grand combattant, encore plus puissant que son géniteur.
- Nous allons bientôt atteindre le château, déclara Reydan au reste du groupe.
Il pressa le pas, obligeant les plus jeunes et certaines femmes à trottiner. Plus ils progressaient vers Alembras, plus son père accélérait l'allure. Kalam songea qu'il s'inquiétait pour les Hérances restés dans le désert. Sur le conseil des anciens, Reydan avait divisé le clan en deux. Il lui faudrait effectuer le trajet quatre fois mais cela ne le dérangeait pas puisqu'il en allait de la survie du continent et donc, par extension, des Hérances. Kalam admirait la patience et la persévérance de son père.
Cependant, il regrettait beaucoup que sa mère ne les accompagne pas. Il aurait adoré partager ce voyage avec elle. Plus expressive et chaleureuse que son époux, elle discutait énormément avec Kalam et ils passaient beaucoup de temps ensemble. Leur complicité agaçait souvent Reydan, qui déclarait que Kalam se transformerait en femme à force de s'accrocher aux jupons de sa mère.
Le garçon parvint à suivre le rythme imposé par son père en exigeant un effort supplémentaire de ses jambes déjà courbaturées. L'impatience l'aida à surmonter la douleur : il désirait voir ce château depuis l'annonce de leur départ ! Il imaginait une construction dix fois plus imposante que les grosses maisons en pierre ou en bois qu'il avait vu durant leur périple jusqu'à Alembras. Rien à voir avec les tentes des Hérances, bien que sa préférence allait à celles-ci.
Il esquiva une racine et manqua de se prendre une branche dans le visage. Le chant d'un oiseau résonna du haut d'un arbre et un insecte bourdonna juste sous son nez. Il grimaça en rentrant la tête dans les épaules. Voilà ce qu'il détestait le plus : ces horribles petites bêtes vicieuses avec des tailles et des formes diverses.
Il haïssait particulièrement les moustiques. Il n'y en avait pas dans le désert : il faisait trop chaud. Mais ici ils pullulaient et attaquaient sans répit ! Il avait des cloques qui le démangeaient nuit et jour sur tout le corps.
Ils arrivèrent face à une rivière. Un pont relevé se tenait sur l'autre rive, gardé par des hommes armés. Les guerriers en dehors du désert portaient des pièces métalliques lourdes et encombrantes sur le corps. Comment pouvaient-ils se mouvoir convenablement en combat avec cet attirail sur le dos ?
Peut-être qu'ils suivaient un entraînement très différent de celui des Hérances. Kalam comptait bien en apprendre le plus possible durant ce voyage pour transmettre ses découvertes aux anciens et permettre à leur clan de gagner en puissance.
- Nous sommes les Hérances, cria son père en langue commune. Nous venons pour le dieu endormi.
Les soldats abaissèrent le pont sans exiger d'explications supplémentaires et Kalam frémit d'excitation. Ils arrivaient enfin ! Leur longue marche à travers le continent prenait fin ! Il ne comptait plus les ampoules et les courbatures ! Cette épreuve serait bénéfique pour le renforcer, comme son père le lui répétait souvent. Il traversa le pont, un grand sourire sur le visage.
Il trépignait d'impatience alors que les soldats d'Alembras les accompagnaient et laissa échappa un « ouah » de surprise lorsque les tours du château se profilèrent derrière les arbres. Il était immense ! Il se retint de courir pour l'admirer. Un guerrier digne de ce nom ne courrait pas pour satisfaire sa curiosité, il se maîtrisait dans toutes les situations. Il évita de dépasser son père car celui-ci ne lui pardonnerait pas cet affront.
Des gardes en uniforme, des gens avec des vêtements plus communs et même des enfants attendaient dans une grande cour pavée. Une fontaine spectaculaire occupait le centre de cette place grouillante de monde. Kalam n'en avait jamais vu d'aussi belle !
Une tente se dressait dans un coin, étroitement surveillée. L'œuf du dieu endormi devait se trouver là-dessous. Son père scruta la foule avec attention pendant que le public salua leur arrivée. Le cœur de Kalam se gonfla de fierté.
Ils avaient réussi ! Malgré la météo parfois atroce, les insectes, les brigands ! Il rayonnait de bonheur. Sa mère serait si heureuse pour lui ! Elle devait se faire un sang d'encre, toute seule dans leur grande tente. Il chassa son souci pour sa mère en se promettant de lui ramener des souvenirs d'Alembras pour apaiser l'inquiétude causée par leur longue séparation.
Un homme se détacha de la foule et sa chevelure flamboyante impressionna aussitôt Kalam. Il n'avait jamais vu des cheveux de cette couleur ! L'homme les portait longs, en tresse. Son teint pâle, bien plus pâle que celui des autres habitants de ce pays, tranchait avec les étranges traits noirs sur ses joues. Il imposait le respect dans son uniforme rouge et jaune.
Il se planta face à son père et lui tendit une main épaisse. Kalam n'arrivait pas à se faire à ce salut. Il préférait celui de son peuple qui consistait à enlacer, c'était plus chaleureux. Son père empoigna la main de l'homme et la serra avec conviction.
- Vous avez fait bon voyage ? s'enquit le soldat à la crinière de feu.
- Il fut long : les miens sont épuisés.
- Des chambres vous attendent dans le château, ainsi qu'un repas chaud. Vous passerez face au dieu endormi dès que vous serez reposés. Notre roi vous remercie infiniment pour votre venue, il sait l'effort auquel vous avez consenti.
- C'est normal, l'avenir d'Amaris nous tient à cœur. Je n'ai avec moi que la moitié des Hérances, il me faudra revenir, expliqua Reydan.
- Très bien, ce n'est pas un problème. Nous attendrons le temps qu'il faudra et le château sera toujours prêt à vous accueillir. Veuillez me suivre.
Cet homme si étonnant dont la voix d'une gravité surprenante surprenait Kalam autant que ses cheveux se dirigea vers le château. Le petit garçon se mordit la lèvre pour étouffer un cri de victoire. Une visite du château ! Il en rêvait ! Il arpenta le hall et grimpa l'escalier de pierre avec émerveillement.
Toute cette hauteur, cet espace...Il avait l'impression de marcher dans une grotte aménagée par les dieux. Le soldat à l'uniforme flamboyant les mena dans un long couloir percé de portes à droite et à gauche. Un rond de peinture blanche ornait les trois premières de chaque côté du couloir.
- Vous pouvez vous installer dans les chambres dont la porte n'a pas de rond blanc. Celle-ci sont encore occupées. Il y a plusieurs lits dans les autres, vous ne manquerez pas de couchages. S'il y a le moindre problème, n'hésitez pas à vous adresser à mes camarades. Ils seront aussi compétents que moi pour répondre à vos besoins.
Le sens de l'hospitalité des habitants du château chassait déjà la fatigue de Kalam. Son père installa les membres de leur clan en répartissant au mieux les diverses familles dans les chambres. Il partagea la dernière avec son fils. Kalam déposa son maigre bagage ainsi que sa lance en bois, la seule arme autorisée pour son jeune âge. Il n'en posséderait une en fer que lorsqu'il qu'il deviendrait un guerrier confirmé.
- Tu t'es bien comporté durant ce voyage Kalam : je suis très fier de toi.
Il profita du compliment : il n'en avait pas souvent.
- Père, est-ce que je peux visiter les environs ?
- Fais selon tes envies mais rentre avant la nuit. Ici ils dînent tous ensemble dans une grande salle. Je ne veux pas que tu sois en retard et qu'on te remarque.
Il acquiesça et fila avant que son paternel change d'avis. Il n'emporta que sa lance dans sa grande aventure. Il explora les couloirs avec émerveillement. Il croisa des gardes qu'il salua d'un signe de la main et qui lui rendirent son salut sans le chasser. Il mit ensuite le nez dehors, où le soleil brillait. Des enfants jouaient autour de la fontaine en s'éclaboussant. Certains avaient son âge mais il préféra délaisser ce petit groupe pour trottiner jusqu'aux écuries.
Les chevaux piaffèrent avec son arrivée. Une odeur de cuir, de paille et de crottin lui piqua le nez. Il était tombé amoureux des chevaux durant leur voyage. Il avait croisé le tout premier à Talenza, alors que des soldats du roi Lothaire les escortaient le long d'une route mal famée. Il préférait largement ces animaux au poil lisse et à l'allure élégante aux chameaux.
Il admira les bêtes athlétiques et bien entretenues sans trop oser les toucher, avant de poursuivre sa promenade ailleurs. Il effectua le tour de la cour puis s'isola dans la forêt. Il se réfugia loin dans les bois, pour s'assurer qu'on ne le retrouverait pas.
Il s'étira pour échauffer ses muscles fatigués et brandit sa lance. Avec le voyage il manquait d'entraînement. Son père le testait régulièrement et s'il s'apercevait que le niveau de Kalam baissait, il augmenterait l'intensité des exercices. Le petit garçon effectua les gestes de base, ceux qu'on enseignait aux enfants de cinq ans mais qu'il exécutait depuis ses trois ans. Il complexifia ses mouvements, devint plus audacieux, plus rapide.
Un bruissement dans les fourrés le déstabilisa et sa lance lui échappa. Il reçut un coup sur la tête, poussa une exclamation de surprise et essaya vainement de rattraper son arme. Heureusement que son père n'était pas là pour voir ça ! Il se massa le crâne, ennuyé.
Une branche craqua dans son dos. Il sursauta et ramassa aussitôt sa lance pour se placer en position d'attaque. Est-ce qu'il y avait des prédateurs dans cette forêt ? Ou alors des brigands ?
Plutôt que de s'enfuir, il avança vers le bruit, arme en avant. Un vrai guerrier ne fuyait pas au moindre danger : il l'affrontait courageusement, la tête haute ! Il traversa quelques fougères et écarta un buisson. Il s'attendait à rencontrer un animal sauvage ou alors un homme à la mine patibulaire.
Au lieu de ça, il faisait face à un garçon à peine plus jeune que lui. Recroquevillé sur lui-même, la tête dans les genoux, il pleurait en silence. Ses longs cheveux noirs entouraient son visage. Kalam se racla la gorge, mal à l'aise.
Il n'avait pas l'habitude de voir quelqu'un pleurer car les Hérances évitaient de montrer le moindre signe de faiblesse. Lui-même avait rarement pleurniché durant son enfance. Il essaya de se souvenir comment sa mère le réconfortait et s'accroupit à hauteur du garçon pour demander dans la langue commune :
- Tu vas pas bien ?
Il prononça les syllabes maladroitement. Il préférait manier la lance plutôt que d'apprendre la langue commune auprès des anciens. C'était une grossière erreur, il s'en rendait compte à présent. Le garçon releva la tête et ses yeux cerclés de rouge se posèrent sur Kalam. Leur couleur doré, comme celle du sable illuminé par le soleil, stupéfia le petit garçon. L'autre sécha ses larmes et Kalam remarqua ses mains couvertes d'égratignures.
- Toi tombé ?
- Non, renifla le petit garçon.
- Pourquoi pleurer ?
- Pour rien. Qui es-tu ?
- Kalam. Je venir du désert du Souan, très loin ici.
Le petit garçon aux longs cheveux noirs avisa sa lance.
- Tu es un Hérance ?
- Tu connais ?
- Oui, mon père est né là-bas !
Kalam haussa les sourcils tout en dévisageant ce garçon. Avec ses yeux en amande et la drôle de couleur de sa peau, il n'arrivait pas à croire qu'il puisse être le fils d'un Hérance. D'ailleurs, pourquoi un Hérance quitterait-il le clan ? Seuls les exilés partaient. Il proposa :
- Toi veux l'essayer ?
La tristesse de l'autre garçon s'envola. Il bondit sur ses pieds, essuya son nez et demanda timidement :
- Je peux vraiment essayer ?
- Oui. Tiens.
Kalam lui confia sa lance. Si ce garçon était bel et bien le fils d'un Hérance alors il ne pouvait pas le priver du plaisir de manier une lance à double tête. Il lui expliqua les bases en s'aidant de gestes pour faire passer le message. Il profita de l'exercice pour faire connaissance avec le garçon.
Il se nommait Nerva, un mot qui signifiait courageux chez les Hérances. Celui-ci oublia vite sa peine, fasciné par cette arme particulière. Kalam s'étonnait de la facilité avec laquelle il faisait tournoyer la lance. Il possédait un talent naturel ! S'il s'entraînait régulièrement, il deviendrait meilleur que Kalam.
Ils discutèrent et s'amusèrent jusqu'à ce que le soleil se couche.
- Je vais arrive retard pour le dîner ! s'exclama Kalam.
- Mais non, suis-moi !
Son nouvel ami attrapa sa main et le tira entre les arbres. Il parcourait le terrain accidenté avec aisance et Kalam tenta de suivre son exemple avec plus de maladresse. Ils regagnèrent le château dans les temps. Nerva le tira jusqu'à un couloir humide et surchauffé.
- Où on va ? Dans la salle de repas ?
- Non : dans les bains ! Il faut être propre avant de passer à table, expliqua Nerva.
Kalam se plia à cette drôle de coutume. Il se dévêtit en suivant les conseils de son ami et entra dans une pièce à la moiteur étouffante, bien loin de l'air sec du désert. Des bassins creusés dans le sol accueillaient des baigneurs et Nerva fit la moue tout en scrutant les lieux.
- Mon père n'est pas là...Je voulais te le présenter ! Tant pis, on va se doucher vite ! On le trouvera pour le dîner avec mon oncle Gébald !
- Toute ta famille est soldat ? l'interrogea Kalam en cherchant ses mots.
- C'est compliqué. J'ai été adopté par mes pères.
- Tes pères ? s'étonna le jeune Hérance.
- Oui, j'ai deux pères ! Un ici et l'autre au royaume des Dragons. Je les adore !
Kalam cligna vivement des paupières, confus. Il peinait à digérer l'information. Deux pères ? Étaient-ce une tradition pour un garçon adopté d'avoir deux pères ? Les filles adoptées avaient-elles deux mères dans ce cas ? Kalam haussa les épaules. Les habitants de ce pays avaient de drôles de coutumes qu'il ne critiquait pas malgré leur caractère bizarre.
Il nagea un instant dans l'eau brûlante, parmi les autres occupants des bassins. C'est la première fois qu'il prenait un bain, surtout avec de l'eau si chaude ! Il sortit, plus détendu que jamais. Son ventre gargouilla, ce qui fit rire Nerva.
Après s'être habillés, son ami le guida vers une grande salle où l'ambiance joviale étonna le garçon. Les plats passaient de main en main, l'alcool remplissait les coupes à ras bord et le brouhaha des conversations percutait les tympans. Cette atmosphère lui rappela les jours de fête chez les Hérances, lorsqu'ils célébraient une union ou une naissance.
Nerva parcourut l'assemblée bruyante de son regard ambré avant de pousser un soupir de déception.
- Mon père n'est pas là non plus...Ce n'est pas grave, il doit être à l'herboristerie ! Viens, je vois une place là-bas !
Ils s'assirent entre deux grands gaillards qui riaient à la plaisanterie d'une jolie femme blonde. Kalam se pencha vers les plats. Il ignorait le goût des aliments qui les composaient et mourrait d'envie de goûter à tout pour satisfaire sa curiosité. Nerva lui servit plusieurs petites portions en provenance de divers bols et plateaux en bois.
Dans le désert, ils utilisaient leurs doigts pour manger. Ici les gens maniaient d'étranges outils en bois et en fer qui n'avaient pas tous la même forme. Kalam essaya d'imiter son ami avec une certaine maladresse. Nerva éclata de rire, ce qui le vexa.
- Pardon, je ne voulais pas être méchant. Regarde, c'est comme ça qu'il faut les tenir.
Il plaça correctement les ustensiles entre les doigts de Kalam tout en lui expliquant leur utilité.
- Si tu n'y arrives vraiment pas, tu peux utiliser tes doigts. Gordon mange tout le temps avec ses doigts et pourtant il ne vient pas du désert.
Kalam suivit le regard de Nerva jusqu'à un grand homme blond au regard dépareillé qui dévorait une cuisse de poulet à pleines dents. Le garçon essaya de manier ses couverts. C'était bien plus complexe que de tenir une lance ! Il mit un point d'honneur à vider son assiette grâce à ses curieux ustensiles bien moins pratiques que ses dix doigts !
Un nouveau monde de saveurs lui éclata en bouche. Certains aliments lui arrachèrent une grimace et d'autres le firent saliver. Il ne cessa de demander le nom de ceci ou cela à Nerva. Son ami répondait patiemment et, en bon hôte, lui resservait ce qu'il appréciait le plus. C'était plus diversifié que leur alimentation dans le désert !
Kalam termina le repas avec le ventre plein à craquer. Beaucoup de gardes avaient déjà quitté la table. Des hommes et femmes discrets débarrassaient les assiettes abandonnées, sans doute des serviteurs. Kalam peinait à comprendre le sens de cette fonction.
D'après son père, il consistait à rendre la vie des gens aisés plus facile en les débarrassant des tâches ménagères. Chez les Hérances, tout le monde prêtait main forte pour les travaux quotidiens. Les hommes chassaient et cueillaient, les femmes préparaient la nourriture et entretenaient les tentes. Ils se passaient de serviteurs.
Il dégustait une moitié de pomme cuite au four et recouverte d'un nappage ambré et collant nommé caramel lorsqu'il demanda à Nerva :
- Tu déjà passer le test du dieu endormi ?
- Non, c'est inutile. Je suis déjà lié à un dragon, je ne peux pas avoir un second jumeau de la même espèce.
Lié à un dragon ? Son père lui avait expliqué le secret du château des gardes. Tout le continent le devinait plus ou moins depuis l'arrivée de l'œuf d'or. D'ailleurs les anciens racontaient tous que les dragons, descendants des dieux, foulaient cette terre depuis la nuit des temps et qu'ils se cachaient du regard des Hommes. Sauf que, depuis son arrivé, il n'avait pas aperçu l'ombre d'une écaille, d'une aile ou d'une corne.
- Où est ton dragon ?
- Je l'ignore. Il ne mange jamais avec nous. Il n'aime pas la foule.
- Et les autres dragons ?
- Ils se promènent sous forme humaine. Il y en avait à table, juste en face de nous.
- Vraiment ?! s'étonna Kalam.
Il se sentait à la fois impressionné et déçu. Il voulait tellement admirer un vrai dragon ! Le fait qu'ils puissent changer de forme et se fondre dans la masse le laissa cependant bouche bée. Les enfants des dieux étaient de loin supérieurs aux humains !
Il discuta longuement avec Nerva, jusqu'à ce que la bougie posée devant eux ait fondu de moitié. La fatigue lui arracha un bâillement sonore. Son ami et lui montèrent se coucher, chacun à un étage différent.
Kalam pénétra dans sa chambre sur la pointe des pieds, craignant de réveiller son père. A sa grande surprise, il découvrit le lit de ce dernier complètement vide. En y réfléchissant bien, il ne l'avait pas vu à table. Vaguement inquiet, il se glissa sous les draps.
Sa lance demeura posée contre le mur, près de la tête de lit et à portée de main. Il mourrait de fatigue mais n'osa pas fermer l'œil car l'absence de son père le taraudait. Il dérivait lentement vers le sommeil quand la porte s'ouvrit avec un infime grincement.
Kalam fit mine de dormir et retint le soupir de soulagement qui désirait s'échapper de sa bouche. Au son presque imperceptible de pieds nus sur le sol, il reconnut son père. Ce dernier s'assit sur le bord de son lit, dans le coin opposé à celui de Kalam. Il ne se coucha pas immédiatement, signe qu'il réfléchissait à un problème. Rassuré par sa présence, Kalam s'endormit dans la minute.
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Chevalier dragon, tome 4 : La guerre d'Amaris
FantasyDepuis la disparition de Lysange, Aymeric n'a qu'une idée en tête : la retrouver. Cela l'amènera à coopérer avec une vieille connaissance afin d'infiltrer le repaire du dragon rouge et sauver sa compagne. Cependant le temps presse et la fin du monde...