Un livre de noël

Chapitre 22 - Partie 3

Dimanche douze décembre deux mille vingt-deux

Sibylle fit un dernier signe aux invités qui repartaient et rentra au chaud. L'après-midi avait été cool, elle s'était bien amusée et ça faisait du bien de ne plus penser à son livre. Elle regroupa les tasses qui traînaient sur la table basse et les mit dans l'évier. Ses parents discutaient encore avec ceux de Solange, alors que son frère emballait une part de tarte pour son amoureuse. Son téléphone posé sur le meuble de la télé attira son regard et elle alla le récupérer. Elle avait deux messages. Un du don du sang qui lui rappelait que les réserves étaient basse en cette période et un de Gaël qui était arrivé il y a dix minutes. « J'aime bien ». C'est tout ! Elle regarda les messages précédents, mais c'étaient les siens qui étaient restés sans réponse. Il aime bien et c'est tout. Il n'avait rien d'autre à dire ? Comment elle voulait reprendre quoi que ce soit avec ça ? Il ne l'aidait pas du tout. Elle avait besoin de savoir ce qui devait être retravaillé, besoin de savoir si certains passages étaient trop lourd, ou encore s'il manquait certains éléments, mais rien. Son ami aimait juste bien. Elle secoua la tête en montant dans sa chambre. Il l'avait aidé tout le long de l'écriture, alors pourquoi il l'abandonnait maintenant ? Pourquoi il n'avait rien à redire sur un des personnages ou sur une action de l'histoire ?

Sibylle alluma son ordinateur en râlant dans sa barbe. La bonne humeur que l'après-midi lui avait amené venait de disparaître. Maintenant elle se posait des milliers de questions. Son histoire ne lui plaisait plus. Trop futile, aucun message de passé, aucune morale. Rien. Ce n'était que des mots les uns après les autres qui s'enchaînaient pour ne rien dire. Son truc était d'un ennuie mortel, il n'y avait pas de magie, pas de poésie. Habituellement elle écrivait des histoires à l'images de l'après-midi qu'elle venait de passer, avec une odeur de chocolat chaud à la cannelle, des jeux, une ambiance cosy, des rires. Son truc ressemblait plus au ciel qui était resté gris toute la journée et qui s'assombrissait de plus en plus alors que la nuit s'installait. Lourd, déprimant. Une ambiance qu'on avait envie de fuir plutôt que de s'y jeter les deux pieds en avant.

Sibylle laissa son regard parcourir son écran et ses yeux se stoppèrent sur la date en bas à droite. Le douze décembre. Elle avait encore trois jours avant que sont histoire ne soit publiée. Moins un jour de correction, il fallait qu'elle envoie sa version définitive le quatorze avant neuf heure au plus tard. Elle ouvrit sa boite mail et tapa le nom de son éditrice. Elle avait encore le temps pour qu'elle le relise et lui fasse un retour avant d'envoyer la version définitive en correction. Ça sera rapide, mais toujours mieux que si personne ne le lit avant. Elle avait besoin qu'elle lui donne des directions marketings, ces petits trucs que les lecteurs attendent et qui feront vendre le livre. Au point où elle en était, c'était déjà une histoire commerciale, crée de toute pièce pour vendre et faire du chiffre. Il n'y avait aucune passion. Ce n'était pas une histoire imaginée, couvée et développée par amour de l'écriture, mais quelque chose qu'il fallait créer pour vendre. Alors elle allait l'envoyer à son éditrice pour qu'elle lui note ce qu'elle devait ajouter pour vendre. Elle avait l'impression d'avoir vendu son âme au diable avec cette histoire, comme si elle s'était trahi. Elle n'était plus l'auteure qui aime imaginer et rendre ça réel, elle n'était pas non plus une auteure qui aime les mots et qui écrit à la place des autres comme pour les autobiographies, elle était devenu vendeuse de mots. Elle avait l'impression d'être un producteur de musique qui cherche juste à trouver la prochaine tendance pour devenir numéro un des ventes ou tube de l'été, sans savoir qui va interpréter sa chanson et sans savoir si ce qu'il créer parlera à qui que ce soit tant que ça vende.  

SI vous voyez des coquilles n'hésitez pas à me le dire.