Chapitre 5 - Partie 1

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Vendredi trois décembre deux mille vingt-et-un

Sibylle plia sa feuille pour la ranger dans sa poche en suivant Gaël qui sortait du bar. Son ami l'attendait en lui tenant la porte et ils prirent la direction du bâtiment dans lequel Marco était entré ce matin. Ils espéraient que l'homme ne mange pas sur place pour pouvoir continuer de le suivre et avoir un peu plus de détail sur lui. Ils ne voulaient pas tout savoir de lui, la vie de l'homme ne les intéressaient pas, mais ils souhaitaient voir ses petites manies. Où est-ce qu'il mangeait, est-ce qu'il était sociable ou alors introverti ? Ils avaient besoin de donner du corps à ce personnage, et plutôt que de tout inventer de A à Z, ils allaient s'inspirer de l'original.

Sibylle se sentait horrible de suivre un homme comme ça, elle n'aimerait tellement pas que ça lui arrive. Mais son ami avait raison, en lui posant une question assez banale sur sa façon de créer les personnages, il l'avait convaincu de le suivre. Comment faisait-elle pour les rendre réels ? Et elle lui avait répondu machinalement que c'était les petites manies et les défauts qui donnait un personnage vraisemblable. Et comme elle ne voulait pas se retrouver à en chercher plus tard et qu'il était déjà l'heure du déjeuner, elle s'était laissée embarquer dans cette chasse à l'homme. Cachée par sa capuche, elle attendait sur le trottoir en face d'un bâtiment gris. Elle tourna la tête quand Gaël mit son téléphone entre eux, son ami lui dit que comme ça ils auraient l'air de deux touristes qui cherchent leur chemin et non deux psychopathes. Elle se pencha sur le téléphone en faisant semblant de chercher un chemin de randonné.

De toute façon ils n'étaient pas sûr que leur homme sorte manger, il y avait peut-être une cantine ici, ou alors il adorait cuisiner, ou alors sa mère ou sa femme ou son mec lui faisait ses gamelles, ou alors il commandait et se faisait livrer. C'est ce qu'elle espérait à moitié, ne pas être obligée de le suivre, mais en même temps, ça l'arrangerait qu'il sorte pour qu'elle puisse enfin commencer à écrire quelque chose.

Elle leva les yeux pour regarder le ciel gris. Jamais, au grand jamais, elle n'avait dû faire quelque chose comme ça pour un de ses livres. Tous ses personnages lui venait naturellement. Qu'elle ait besoin d'un grand moment de réflexion pour ses histoires fantastiques, en fonction des pouvoirs et des caractéristiques de chacun, ou alors que ça lui vienne en écrivant pour ses histoires de noël, un petit défaut qui faisait tomber l'autre amoureux doucement et sans s'en rendre compte, ou une manie qui le fait rire, mais la rien. Encore une fois c'était le vide, le néant dans son esprit.

Son cœur se mit à battre rapidement et son souffle se coupa un instant quand son ami lui mit un petit coup de coude dans la bras. Elle tourna la tête vers la porte du bâtiment. « La pompe aux pommes est sorti du four ». Elle déglutit en le voyant rire avec ce qui semblait être deux collègues et discuter un instant de la direction qu'ils allaient prendre. Elle marcha machinalement quand Gaël attrapa sa main pour la tirer derrière eux. Elle espérait seulement qu'ils n'allaient pas faire de connerie en le suivant.



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