Roulez, roulez si vous le pouvez II/II

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Les wendigos avaient cessé de se faire repousser. Ils avaient laissé s'évanouir leur apparence humaine, découvrant crocs et griffes repoussantes. Leurs cris stridents, sifflants, accompagnaient leurs assauts. Du sang coulait déjà sur les pelages, les trois métamorphes peinant à leur bloquer le passage.

— Dépêche-toi ! somma Katharina tandis qu'Olive tournait la barrette dans tous les sens dans l'espoir de discerner un click.

— Le mécanisme est rouillé, ça marche pas !

— Allez, bouge-toi, la dégagea Katharina avant de reculer pour assener le cadenas de coups de carabine.

Derrière eux, les bêtes les protégeaient toujours des wendigos, mais plus pour longtemps. Des couinements se substituaient aux grognements, les griffes jaunes lacéraient les flancs. Enfin, au onzième chargement de crosse, le verrou céda. A la hâte, Katharina le décrocha et poussa Massimiliano puis Chiara à l'intérieur, bientôt suivis des autres. Mandréline était la dernière, les yeux rivés sur Luna et les deux Loups aux robes humectées de leur propre sang. Katharina jeta un dernier regard au Loup brun, les oreilles et la queue affaissées, les babines retroussées et les yeux féroces. Puis elle empoigna Mandréline et referma derrière elles. Sous le plafond où serpentaient de vieilles tuyauteries étaient plantées de longues cuves grisâtres reliées à des tuyaux désagrégés. L'entrepôt sentait l'essence et le vieux métal.

— Matt et moi, on surveille l'entrée, trouvez le carburant, décréta Katharina en armant sa carabine.

— Qui a les briquets ? demanda Mandréline qui reprenait ses esprits.

— C'est moi, dit Chiara.

— Et moi. Ce serait là-dedans ? demanda Olive en désignant les containers. On peut les ouvrir sans que ça nous explose à la figure ?

— Il aurait dû nous conduire dans une station essence, conclut Liam qui n'avait aucune envie de risquer une déflagration.

— C'est ça ! Jensen, il doit y avoir des jerricanes quelque part ! s'exclama Olive alors que les cris, grognements et jappements se rapprochaient.

Le garçon se précipita vers le fond de la salle, à la recherche d'un embranchement, et repéra une première porte qui s'ouvrit sur des rangées de fûts s'étendant à perte de vue.

— J'ai trouvé des barils ! triompha-t-il au même moment.

— Ici, il y a des bidons, intervint très calmement Massimiliano à quelques mètres de lui.

La pièce regroupait les jerricanes à destination des enseignes automobiles.

— Bravo, papa ! s'exclama Chiara.

— Il faut accélérer, leur cria Katharina qui entendait la fréquence des jappements et des chutes animales, plus lourdes et molles que celles des autres créatures, augmenter chaque seconde.

Chacun s'empara d'un bidon et en aspergea le sol du hangar. Quand il fut aussi brillant que glissant, Mandréline et le reste du groupe rejoignit Matthieu et Katharina derrière l'entrée.

Olive et Chiara dégainèrent leurs briquets, qu'elles partagèrent avec les autres pour accélérer la propagation du feu. Tout près de la porte, ils allumèrent l'énorme flaque ensemble avant de courir dehors, surprenant même les wendigos entre les jambes desquels ils fuirent vers les 4x4. Les Loups refoulaient les monstres vers l'usine, mais Mandréline leur cria :

— Ça risque d'exploser, courez !

Katharina et elle se mirent au volant, leurs amis bondissant dans les voitures. Les trois métamorphes attendirent que le moteur tourne, et galopèrent aux côtés des véhicules pendant que les flammes grandissaient dans le bâtiment, s'attaquant aux murs, aux portes et enfin aux cuves qui déflagrèrent en gerbes de feu assourdissantes, engloutissant les créatures cadavériques et ébranlant les voitures qui s'éloignaient.

Les enfants de Bellegardane - T. 1 : MandrélineOù les histoires vivent. Découvrez maintenant