Le footballeur infiltré II/II

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Une alarme aiguë vrilla les tympans de Caleb comme un million d'aiguilles chauffées à blanc. Il aurait voulu fuir loin de ce bruit insupportable, mais il poussa sur l'accélérateur, fonçant avec son 4x4 jusqu'au seuil de l'usine où il ouvrit précipitamment la portière du véhicule. Jamais il n'aurait dû consentir à ce que Matthieu pénètre cette forteresse. Il l'avait jeté en pâture aux créatures en toute connaissance de cause. S'il ne le retrouvait pas, il ne se le pardonnerait jamais. Sans reclaquer la portière dans l'autre sens, il courut à travers les prisonniers aux visages blêmes et cernés qui s'évadaient. Matthieu n'en faisait pas partie. A l'intérieur, une vingtaine de soldats fermaient la route à Matthieu et deux autres personnes. La fille était forcément Chiara. Du moins, Caleb l'espéra. Alexandre, en revanche, n'était pas là.

Les hommes firent reculer les trois fugitifs tétanisés jusqu'à ce que les murs bloquent leur repli. Matthieu tendait le couteau de Mandréline pour les tenir en respect, mais les geôliers rouges progressaient sans y prêter la moindre attention.

— Eh ! rugit Caleb.

Dans un parfum de mort, les gardes se tournèrent vers lui, un éclat écarlate dans les yeux. Fondant sur eux, il frappa un premier homme, puis un deuxième, un troisième, un quatrième, juste assez pour tous les énerver. Juste assez pour détourner leur attention.

Chiara, Matthieu et Massimiliano se dépêchèrent vers la grande porte pendant que Caleb se déplaçait entre leurs agresseurs avec agilité. Il cognait, ciblait les points les plus vulnérables de ses adversaires, de plus en plus fort.

— Caleb ! cria Matthieu pour l'avertir qu'ils étaient à deux doigts d'atteindre l'extérieur.

Les gardes se relevaient aussi vite qu'ils tombaient, leurs traits de plus en plus déformés. De plus en plus pâles. Leurs yeux de plus en plus pourpres. Caleb enchaînait toujours les coups, mais il fatiguait alors qu'eux gagnaient en puissance. Ils étaient trop nombreux, il l'avait su avant même d'entrer.

— Caleb ! hurla Matthieu.

Les créatures avaient sorti leurs griffes, le lacérant, jusqu'à ce que les appels de Matthieu les déconcentrent.

— Non ! grinça Caleb entre ses dents serrées tandis que les créatures changeaient de cible.

S'extirpant de la masse, il empoigna Matthieu et Chiara qui soutenaient Massimiliano, les poussant au-dehors, les créatures à leurs trousses, encore assez humaines pour que leur cruauté surnaturelle passe inaperçue auprès des moins avertis. Matthieu voulut refermer la porte de l'établissement afin de se couper de leurs assaillants, en vain. Elle était trop volumineuse, et Massimiliano bloquait ses mouvements de tout son poids.

— On s'en fout ! La voiture ! cria Caleb.

La portière encore entrouverte et les hommes dont le squelette s'étirait lentement derrière eux, Matthieu et Chiara installèrent Massimiliano sans grandes précautions, verrouillèrent les portières, et Caleb tourna la clef de contact.

— Ils arrivent ! lança Massimiliano en vérifiant les rétroviseurs tout en se redressant maladroitement.

Mais le véhicule démarra et les ravisseurs se firent de plus en plus petits, puis disparurent enfin, loin derrière eux.

L'adrénaline à peine redescendue, Chiara se jeta dans les bras de son père. Elle ne savait par où commencer. Sans compter que son souffle était encore court, et sa bouche encore sèche.

— Je pensais ne jamais te revoir, dit Massimiliano en blottissant sa fille contre lui, une main caressant ses cheveux.

— Comment tu te sens ? répondit-elle sur le qui-vive. Je te cherchais... Je suis allée à la brasserie, au lac, au parc, à l'école privée où tu as rencontré maman, j'ai fait toute la ville, mais ils...

Les enfants de Bellegardane - T. 1 : MandrélineOù les histoires vivent. Découvrez maintenant