Samedi 5 octobre 2013

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Le téléphone de Dan sonna et le nom de Teresa s'afficha. Il décrocha.

- Salut, Dan, ça va ? S'enquit-elle.

- Oui. Et toi ?

- Bien. Ça te dit un ciné cet après-midi ?

- J'ai pas franchement envie de mettre le nez dehors, répondit-il.

- Allez, je m'ennuie, insista t-elle. T'en as pas marre de rester enfermé?

Dan garda le silence un instant.

- Tu veux aller voir quoi ? Demanda t-il finalement, redoutant sa réponse.

Il l'avait accompagné trop souvent voir des comédies à l'eau de rose.

- C'est toi qui choisis. Regarde les programmes et passe me chercher.

Dan ne put s'empêcher de lever les yeux au ciel.

- Mais bien sûr, soupira t-il.

- Super. A tout à l'heure !

Teresa raccrocha et Dan se connecta à contrecœur sur le site du cinéma le plus proche. Il choisit un film au hasard, s'assurant juste qu'il ne s'agirait pas d'une belle histoire d'amour qui finit bien. La séance débutait à 16h15 ; il passerait chercher Teresa vers 15h30. Il lui envoya un message pour l'en informer.

Puis il se laissa tomber sur son lit, les muscles endoloris de l'entraînement du matin. Alors que ses pensées vagabondaient vers le prochain match, une musique s'éleva du rez de chaussée ; sa mère devait écouter la radio. En tendant l'oreille, il reconnut la mélodie de Tom Odell. Celle qui parlait d'un amour diffèrent et intense. Son cœur se serra et une douloureuse bouffée de nostalgie l'assaillit. Il avait écouté cette chanson si souvent en pensant à elle. Elle tournait en boucle dans sa voiture. Quand il lui avait demandé pourquoi celle là, elle avait répondu qu'elle n'aimait que ce qui était unique en le regardant au fond des yeux.

Quinze heures approchant, Dan se fit violence pour refouler ses souvenirs et se releva. Il descendit au salon, informa ses parents qu'il sortait, prit ses clefs de voiture et sortit. Bien que les températures soient encore douces, l'air ne tarderait pas à devenir beaucoup plus froid. Dan avait hâte que les premières neiges arrivent ; c'était quand il était recouvert de son manteau blanc qu'il aimait le plus le Québec.

Il arriva devant l'appart de Teresa une demi heure plus tard. Elle habitait un bel immeuble situé en plein cœur du quartier le plus huppé de Montréal. Avec le compte en banque de parents comme les siens, elle aurait été incapable de se contenter d'un trois pièces. Il se gara en double file et l'appela pour lui dire de descendre. Teresa franchit le magnifique portail de la résidence, vêtue comme si elle se rendait à une soirée de gala. Elle s'installa sur le siège passager, tout sourire, et l'embrassa sur la joue.

- Je suis contente que tu te sois décidé à sortir de ta tanière, dit-elle joyeusement.

Dan lui jeta un coup d'œil mais garda le silence et redémarra. Il se demandait vaguement si Teresa avait quelque chose en tête en lui lançant cette invitation. Il avait toujours du mal à lui faire confiance. Lorsqu'ils arrivèrent devant le cinéma, il était bondé. Ils patientèrent dans la file d'attente et Teresa lui demanda des nouvelles de sa famille. Il lui rendit la politesse -bien qu'il ne fut aucunement intéressé par les activités de Monsieur Je-ne-vis-que-pour-amasser-un-maximum-de-fric- et ils parvinrent enfin au guichet. Danick paya et dévisagea Teresa du coin de l'œil. Il était évident qu'elle n'avait pas envisagé une seconde de régler sa place. Il se retint de pousser un soupir en songeant, qu'elle, aurait insisté pour partager les frais. Ce sujet avait toujours donné lieu à des discussions épiques. Elle qui refusait de se faire entretenir et lui qui tenait à ce qu'elle ne manque de rien.

- On achète du pop corn ?

La voix de Teresa brisa le cours de ses pensées. « Tu m'achètes du pop corn, Dan ? » répéta une petite voix cynique dans sa tête. Elle lui faisait penser à une petite fille. Il passa à la caisse pour la seconde fois puis ils montèrent à l'étage pour la projection.

Le film n'était pas un joyau du septième art mais il se laissait regarder. Dan fut soulagé que son ex ne tente rien. Sa main resta sagement sur son genou et elle ne tourna que rarement son visage vers lui. Tant mieux, il n'était pas d'humeur à repousser ses avances. Peut-être avait-elle dit vrai le soir du barbecue chez Vincent.

Lorsqu'ils sortirent de la salle, Teresa insista pour qu'ils prennent un verre dans le café d'en face. Dan se laissa entraîner vers une petite table de bar au fond de la pièce. Ils discutèrent un instant du film puis Teresa le regarda avec sérieux.

- Tu n'as pas l'air heureux, déclara t-elle.

- Ça va, répondit machinalement Dan.

- Pourquoi vous êtes vous séparés ? Continua t-elle soudainement.

Il lui lança un regard d'avertissement, sur la réserve. Teresa leva les yeux au ciel.

- Ne me regarde pas comme ça. Je te demande ça en tant qu'amie. C'est normal.

Dan se détendit légèrement et haussa les épaules.

- Elle n'a pas souhaité me suivre.

- Pourquoi ?

- Elle aussi a une carrière à faire décoller.

- Ah bon ? S'exclama Teresa, sceptique.

- Je me doute que tu dois être surprise, vu que tu l'as prise pour une secrétaire, dit-il un peu agacé.

- Excuse moi mais elle était à l'accueil quand je suis passé à l'Harmotruc, répliqua t-elle. Quelle genre de carrière ?

- Elle est danseuse.

- Danseuse..., répéta Teresa, songeuse.

- Oui. Et alors ?

- Et alors rien, répondit-elle en souriant.

Dan n'insista pas mais il croyait avoir vu une ombre passer sur son visage. Il la laissa terminer son verre et se leva.

- Je te ramène ? Dit-il, ressentant soudain l'impérieux besoin d'être seul.

Elle fit la moue mais le suivit. Dan la déposa chez elle et rentra chez ses parents.

De retour dans sa chambre, Dan alluma son pc. Il ne savait pas si c'était le fait d'avoir parler d'elle pour la première fois depuis qu'il était rentré, mais il se connecta au site de l'Harmonium. Ça lui fit un drôle d'effet de revoir les images de cet endroit où il s'était vraiment sentit bien. Où il l'avait rencontré. Dan fit glisser la souris sur le menu et cliqua sur l'onglet « Côté danse ». Il trouva rapidement la page consacrée au championnat. Il espérait que le webmaster de l'Harmonium s'intéressait suffisamment au sujet pour enrichir le site. Dan fit défiler les noms et trouva enfin le sien. Quand il prit connaissance des résultats individuels, il s'étonna qu'elle ne soit pas dans le haut du tableau. Le niveau devait être élevé. Il resta pensif un instant mais dû rapidement brider son esprit. Il ne devait pas songer à ce qu'était devenue sa vie. C'était encore trop douloureux. En fait, il se demandait si la douleur disparaîtrait vraiment un jour.

Canada Blues 2Où les histoires vivent. Découvrez maintenant