Canada Blues 2

Mardi 12 juillet 2016 /1

La matinée était déjà bien avancée lorsque j'ouvris les yeux et la chambre était une véritable étuve. Je rabattis les draps sur le côté, trempée de transpiration. Je savais que la chaleur n'était pas la seule fautive ; mes songes de la nuit devaient également y être pour quelque chose. Le corps nu de Dan contre le mien, sa bouche sur la mienne, son souffle dans mes cheveux, ses mots doux, ses doigts sur ma peau... Il était parvenu à rendre ma nuit agitée sans même être près de moi.

Le souvenir de la veille me donna encore plus chaud. Je sentis mon visage s'embraser. Et pas seulement mon visage. J'avais l'impression que ses doigts étaient encore en moi, à aller et venir, chauds, doux et brutaux à la fois. Il m'avait donné le meilleur orgasme de ces trois dernières années, sans même me faire l'amour. Et je crevais d'envie de recommencer. Je voulais qu'il me possède à nouveau, comme avant.

Je me sentais terriblement coupable. J'avais franchi une limite que je ne pensais jamais dépasser. Mais comment aurais-je pu résister ? N'importe quelle femme aurait succombé. Dan n'était pas un homme auquel on pouvait rester insensible. Étais-je faible de le laisser faire de moi ce qu'il voulait ?

Et lui ? Pourquoi n'était-il pas resté sagement dans sa tente ? Que cherchait-il ? Je ne le comprenais plus. Dan était fidèle et loyal, pas le genre à tromper sa copine dès qu'elle avait le dos tourné. Alors que lui était-il donc passé par la tête ? Il nous mettait tous les deux dans une situation impossible. Et je lui en voulais pour ça.

Agacée, sur les nerfs, je me levai avec le besoin pressant de respirer l'air frais. Je jetai un œil à mon portable : 11h36. Et un message de Matt :

« Bien dormi bébé ? Tu me manques. Je t'aime. »

Mes entrailles remuèrent douloureusement. Je ne me sentis pas la force de répondre. Je sortis de la chambre et j'aperçus au travers de la baie vitrée les garçons installés sur la terrasse. Je traversai discrètement le salon pour me rendre dans la salle de bain. Tout en évitant mon reflet, je me rafraichis rapidement, brossai ma tignasse emmêlée et enfilai un short et un tee-shirt. Puis je sortis dans le jardin. David, Martin et Dan terminaient leur petit-déjeuner. A peine avais-je mis un pied sur la terrasse que mes yeux se posèrent sur Jamie qui sortait de sa tente. A poil. Je me retournai vivement, mains sur les hanches.

- Putain, Jamie ! Râlai-je.

- Désolé, s'excusa t-il en se marrant, provoquant les rires de nos amis par la même occasion. C'est bon !

Je fis prudemment volte face. Il avait heureusement revêtu un short. Je lui lançai un regard noir, furax.

- T'as vraiment un problème !

- Ça va, c'est pas comme si tu m'avais jamais vu, rit-il en faisant allusion à la fois où je l'avais surpris dans les vestiaires de l'Harmonium.

Cette époque me semblait bien lointaine. Jamie se laissa choir sur sa chaise, toujours hilare.

- C'est pas simple de se changer dans une tente, tu sais.

- La maison est équipée d'une salle de bain, au cas où tu ne l'aurais pas remarqué, répliquai-je.

Je pris place autour de la table, toujours sur les nerfs. Le regard de Dan que je sentais peser sur moi ne m'aidait pas à me détendre.

- T'as l'air d'excellente humeur, me salua ironiquement David en haussant un sourcil.

- Mal dormi. Passe moi le jus d'orange.

Je me servis un verre sans lever les yeux.

- Où sont les filles ? M'enquis-je.

- En courses avec Romain.

J'acquiesçai en silence et me concentrai sur le beurrage de mes tartines. Le reste de la semaine allait être affreusement long.