Samedi 9 juillet 2016 /2

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Je jetai un œil distrait au GPS : ma destination devait se trouver à cent cinquante mètres sur la gauche. Lorsque je me rendis compte que je serais arrivée dans quelques secondes, je freinai brusquement. Mon rythme cardiaque, qui s'était plus ou moins tenu tranquille pendant le trajet, s'affola soudainement.

Je laissai mon regard errer devant moi, observant les alentours. C'était une petite rue bordée de maisons de vacances plutôt cossues qui se terminait en cul de sac. Tout au bout, à quelques centaines de mètres, je pouvais apercevoir les premières dunes de sable. J'eus immédiatement envie d'aller y plonger mes pieds nus. J'ouvris la fenêtre et l'air iodé envahit l'habitacle. Je respirai à pleins poumons, espérant que cela m'apporterait un peu de calme.

Je ne me sentais pas sereine, loin de là. Fermant les yeux un court instant, je me concentrai sur ce que je ne manquerais pas de ressentir dans quelques minutes, quand Dan se trouverait face à moi. En plus du stress de le revoir, j'allais devoir dissimuler mes émotions à ma famille et mes amis. J'avais souvent imaginé ce moment et, à chaque fois, nous étions seuls, pas entourés d'une dizaine de paires d'yeux curieux.
J'allais devoir rester concentrée, me focaliser sur autre chose que lui. Tout en me montrant aimable et détendue. Rien que ça.

Mes mains serraient fort le volant, au point que mes doigts laissèrent une trace dans le cuir tendre. Après une dernière grande inspiration, je réenclenchai la première vitesse, et me dirigeai vers la dernière maison sur la gauche.

L'endroit était fidèle aux descriptions enthousiastes que m'en avait fait Margot. La maison surplombait un joli jardin sur le devant, à la pelouse parfaitement entretenue. La piscine et la terrasse devaient se trouver à l'arrière. Ce n'était pas clôturé et je reconnus les voitures de Romain et de David, ainsi que celles de mon oncle et de ma cousine, garées dans la longue allée. Je m'avançai dans cette dernière et stoppai la voiture, les mains moites. Et je les vis, attablés autour d'une longue table de jardin au centre du jardin arrière.

Ce fût comme si mon regard avait immédiatement su où se poser. J'aurais pu anticiper ce moment pendant des semaines que je n'aurais pas pu contrôler les émotions qui m'assaillirent. J'occultai instantanément tout le reste pour me focaliser sur son visage. Il était le même que dans mes souvenirs, quoique ses cheveux me semblaient un peu plus longs. Sa barbe aussi. J'étais trop loin pour distinguer convenablement ses yeux mais je pouvais voir son sourire. Toujours aussi renversant.

Du coin de l'œil, je vis Romain s'approcher de ma voiture. Je me secouai brusquement et ouvris la portière, la main tremblante. Plaquant un sourire de circonstance sur mon visage, je sortis.

- Maman commençait à s'inquiéter, m'accueillit-il. La route s'est bien passé ? Ajouta t-il en m'embrassant.

- Affreusement longue.

La voix de Margot me fit tourner la tête.

- Regarde qui voilà, ma chérie.

Elle déposa Cléo au sol et ma petite nièce se précipita vers moi de sa démarche mal assurée.

- Ata !

Je la pris dans mes bras, heureuse de cette diversion. Je pourrais peut-être essayer de cacher mon embarras derrière son petit corps. Margot me salua à son tour.

- Viens, on t'attendait pour commencer l'apéro.

- J'arrive à point, souris-je.

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