Vendredi 6 septembre 2013

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Je m’étais présentée au bureau de Lannaux dès la première heure. Lorsque je lui avais annoncé ma volonté de mettre fin à mon contrat, il n’avait pas semblé accueillir la nouvelle de bon cœur. L’entretien ne fut pas particulièrement plaisant mais je ne m’y étais attendue.

Lorsque je passai devant le bureau de Monsieur Carlain, histoire de vérifier qu'il ne m’avait pas oublié, je trouvai sa porte ouverte. Il était au téléphone. Quand il m’aperçut, il me fit silencieusement signe d’entrer et de m’asseoir. Une fois sa communication terminée, il se tourna vers moi.

-          Bon, j’ai étudié votre demande. Julien Ronsard, l’un de nos autres semi pro – il est dans l’équipe de volley – est volontaire pour être transféré au club. Vous prendriez sa place.

-          Parfait, répondis-je, soulagée qu’une solution ait été trouvée rapidement. Et où travaille t-il ?

-          Ici, au secrétariat de direction, m’annonça Carlain. Vous seriez en charge des plannings, d’une partie de la comptabilité, de l’organisation des événements. Plus ou moins ce que vous faites déjà au club, en somme.

Je remarquai qu’il continuait à employer le conditionnel.

-          Très bien. Et vous pensez que je pourrais commencer quand ?

-          Avez-vous prévenu Monsieur Lannaux de votre décision ?

-          Oui.

-          Et qu’en est-il ressorti ?

-          Je peux mettre fin à mon contrat sous réserve d’effectuer un préavis d’un mois et que je me charge de la formation de mon remplaçant.

-          Très bien. Je vais voir avec Monsieur Ronsard quand il souhaite commencer. L’activité étant plutôt calme en ce moment, je ne suis pas contre le fait qu’il n’effectue pas son préavis jusqu’au bout. En ce qui concerne votre fin de contrat ainsi que les formalités y afférentes, je vous laisse voir avec Monsieur Lannaux.

-          D’accord. Je vous tiendrai au courant. Merci.

En sortant du bureau, je n’espérai qu’une chose : que ce Julien bouge ses fesses et qu’il ne me fasse pas poireauter quinze ans. 

Je repassai par mon bureau pour y prendre mes affaires. Tandis que j’éteignais mon ordinateur, Romain et David firent irruption dans la pièce.

-          Alors, t’es prête ? S’enquit mon cousin en se laissant tomber sur une des chaises.

Je partais dans une petite heure sur Paris, en car avec le reste de la troupe, pour la seconde épreuve qui aurait lieu demain.

-          Prête à partir où prête pour demain ?

-          Les deux.

-          Ça devrait le faire, répondis-je.

-          Tu passes devant le jury à quelle heure ? Demanda David.

-          Je saurais ça demain matin.

-          Tu ne seras toujours pas au match ce soir, déclara Romain à brûle pourpoint et en me regardant d’un air songeur.

Je me sentis mal à l’aise. Je ne leur avais pas parlé de ma décision de quitter le club. J’avais l’impression de les trahir mais je savais qu’ils tenteraient de m’en dissuader et je ne me sentais pas la force de les écouter.

-          Hum…, fis-je, évasive. Bon, je dois y aller, ajoutai-je en empoignant mon sac.

J’embrassai David puis Romain et me dirigeai vers la sortie.

-          A plus tard. Et bon match ! Ajoutai-je en tentant d’insuffler à ma voix l’enthousiasme qui était le mien auparavant.

-          Déchire tout demain, me lança mon cousin.

-          J’y compte bien.

Je leur fis un petit signe de la main et prit la direction de la loge, où j’avais déposé mes bagages ce matin.
 

***

Le trajet en car fut horriblement long et bruyant. Je ne parvins pas à me mêler aux conversations enthousiastes. Tout le monde était impatient et fébrile. Moi, je n’avais qu’une hâte : être devant le jury.

L’hôtel que nous avions réservé était typique de Paris. Petit, rustique, bruyant et pourtant déjà trop cher. Je partageais ma chambre avec Wendy et Camille. Je fus heureuse que ce ne soit que pour une nuit ; je n’avais pas envie de partager quoi que ce soit avec personne.

Les filles prirent soin de ne pas le mentionner de toute la soirée ; j’avais redouté que Wendy en profite pour me cuisiner. Camille avait dû l’avertir de s’abstenir parce qu’elle n’en fit rien.

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