Exploser

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Un climat serein s'était installé au fil des jours suivant mon anniversaire. 

J'avais pris le temps de respirer, sans stimulation extérieure, en évitant le plus possible mon téléphone. Ce mode déconnection avait réellement pour but, de prendre de la distance...Cette distance nécessaire, que Chris avait appelé la neutralité.

Julian était bien le seul à utiliser notre ligne fixe, et ne s'était pas privé pour enfoncer le clou planté par son compagnon. J'avais acquiescé dans une mouvance de résignation, quand il m'avait fait les éloges d'Arthur...Qui selon lui, était bien la meilleure chose pour moi...La meilleure personne pour me comprendre, même mieux que moi même.

Je savais depuis trop longtemps, que c'était bel et bien le cas. Pourtant, son amour inconditionnel n'avait pas fait le poids face à l'attraction qu'Amélie avait eu sur moi. 

En ce qui la concernait, je ne pouvais m'empêcher de me questionner: Comment vivait-elle ma prise de distance? Mon absence de réponse poétique, à son simulacre de retour dans ma vie??

Je me décidai après moultes hésitations, à checker mes messages. Je squeezai volontiers ceux de Laurie, qui me demandait bien trop souvent si j'avais des nouvelles des chevaux...Sans vraiment comprendre que ça me brisait le cœur.  

Je trouvai vite ce que je cherchais, ne m'étonnant pas vraiment que celle que je m'efforçais de considérer comme une amie, n'ait pas pu résister au besoin de m'écrire. Je découvris avec fébrilité, ce qu'elle avait dans le cœur:

"Comme le jour dépend de l'innocence. Le monde entier dépend de tes yeux purs. Et tout mon sang coule dans leurs regards."

Mon cerveau ne me demanda aucunement l'autorisation pour se mettre en ébullition. J'analysai chaque mot, me demandant vraiment si cela m'était adressé. J'étais loin de l'innocence, et mes yeux avaient été happés, pour regarder une fille que je ne devais pas convoiter...Amélie voulait-elle me faire mal?? A moins que...

Je pris la décision de répondre, sans aucune forme de poésie...Le pragmatisme et ce qu'évoquait la dernière phrase en seule ligne de mire:

"Tu es retournée au boulot?? Ca s'est mal passé??"

A peine mon écrit terminé, les lettres fusèrent sur mon écran:

"Ce n'est pas le plus important...Ces rêves en pleine lumière, font s'évaporer les soleils. Me font rire...Pleurer. Parler sans avoir rien à dire"

Pour la première fois depuis longtemps, je passai de la torpeur à l'énervement...Ne pouvant même plus contenir la fureur qui m'animait.

 Utiliser l'un de mes poètes préférés, pour me faire passer des messages détournés...Elle osait...

Le timing était pourtant bel et bien désastreux. Mon cœur oscillait entre les sentiments, me faisant me sentir mal avec moi même. Je m'étais jurée de ne jamais lui en vouloir, garder l'essence amicale intacte...Malgré tout, je m'étais trop souvent contenue, laissant libre pouvoir à mes doigts pour se déchainer:

"C'est pour te foutre de ma tronche, que tu utilises des jolis mots?? Notre histoire était basée sur du mensonge, et de la tromperie je te rappelle!! Si on te malmène au boulot, je ne peux rien pour toi! Ouvre ta gueule pour te défendre pour une fois!! Cauchemars et nuit...Bien meilleurs comme mots que toute cette poudre aux yeux que tu m'envoies! Pour parler, il faut avoir des choses à dire. Pour rire, il faut être sur la même longueur d'onde. Pleurer, je l'ai déjà trop fait!!"

Je balançai mon téléphone de rage, ne me reconnaissant plus.

 Une constriction m'oppressa la poitrine, alors que mon souffle s'emballait à outrance...La crise d'angoisse arrivait à grand pas. Cela faisait une éternité que je n'en avais pas faite de sérieuse. A chaque fois, ça avait été un point de non retour...M'amenant vers des décisions décisives dans ma vie. 

Quand nos yeux ont comprisOù les histoires vivent. Découvrez maintenant