Enumérer les ratés

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Les  cours s'enchainèrent les uns derrière les autres, la rage mélangée à la peine me rendant hermétique aux échanges avec mes collègues, quels qu'ils soient.

Je n'avais pas eu accès non plus à l'humour, et étais restée impassible devant les délires adolescents de mes élèves...Alors qu'ils me connaissaient tous joviale et participative.

Quand dix sept heure sonna, mes œillères me conduisirent directement sur le devant du parking. Je cherchai presque paniquée la voiture de Julian, qui m'avait promis de ne pas me faire attendre.

Je fixai l'horizon, choisissant moi même de me mettre dans ma bulle...Tout en allumant une cigarette. 

Je respirais à plein poumons, alors qu'une voix bourdonnait déjà à mes oreilles. Je levai à peine la tête, même si je discernais des fragments de mon prénom. Un raclement de gorge rappela mon attention, pour finalement m'obliger à un face à face redouté:

-"Caroline, on peut discuter?!"

-"Pas vraiment, je ne vais pas tarder à partir."

-"S'il te plait. Je voulais seulement m'excuser...Vraiment."

J'osai transpercer mon "ex" d'un regard sombre. Malgré tout elle continua:

-"Je ne pensais pas...Euh...Je ne voulais pas te faire du mal...Te forcer."

Je bloquais en moi même, ne souhaitant pas raviver mes plaies. Le silence comme réponse, ne fut pas suffisant pour faire renoncer Amélie:

-"Je suis allée trop loin...Toucher tes cheveux...Ta nuque...Je me suis laissée aller."

-"Et moi, je me suis sentie agressée...Ouais...Agressée."

-"Humm...Mais..."

-"Quoi?! Tu veux mettre des limites, que tu ne t'imposes pas à toi même...Et on doit encore en parler??"

-"Tu sais que je ne ferais jamais rien, qui puisse te faire du mal...Je te jure."

Je soufflai hésitante, plus emprunte à une nouvelle salve de doutes et de peine:

-"Je...Je te fais confiance. J'ai juste besoin d'un peu d'air. On sait toutes les deux, que plus rien ne mènera nul part...Que c'est cramé."

Mes mots firent résonnance dans le cœur de mon ancien coup de foudre. Elle tenta de dissimuler la moue qui prenait possession de son visage, pour autant il n'en fut rien:

-"Putain...Si on m'avait dit que ça faisait si mal...C'est...Euh...J'ai plus les mots."

-"Parfois, il n'y en a pas...Et on n'y peut rien."

-"Tu as l'air tellement résignée...En colère aussi."

-"Je n'arrive même pas à t'en vouloir...Réellement. Je n'en veux à personne, à part à moi même."

-"Ce n'est pas juste...Je vois ce que tu portes, et ça me fait me sentir mal...Parce que je me sens impuissante."

Je ne commentai pas plus, relevant qu'Amélie n'avait pas changé...Alors que moi, je débloquais grave. Une nouvelle angoisse me bouscula les trippes...Celle de ne pas être à la hauteur, encore une fois. 

Je cherchai les iris ambrée de ma désormais "amie",  bien consciente qu'il ne restait plus grand chose à sauver entre nous:

-"Alors...J'aurais tout foiré...Même rompre, je ne suis pas capable de le faire proprement." 

-"Qu'est ce que tu racontes?! Si tu savais, comme j'ai envie de te serrer dans mes bras."

-"A part te crier dessus...Je ne sais plus communiquer...J'ai seulement envie d'hurler!!"

Quand nos yeux ont comprisOù les histoires vivent. Découvrez maintenant