61. Qu'il est doux, le temps qui passe !

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Entre Noël et le nouvel an, Aaron et Kilian ne se virent pas une seule fois, mais se parlèrent tous les jours. Les progrès de la science avaient au moins cet avantage ! Plus les gens sont loin les uns des autres, plus ils sont virtuellement proches. Quitte à n'avoir jamais adressé le moindre mot à son voisin de palier.

Les deux garçons n'avaient ainsi ni besoin de se voir, ni de se toucher pour rester proches. Le blondinet parlait de sa famille, le brun écoutait et conseillait. Aaron savait mettre son intelligence au service de la raison, ce qui fascinait Kilian. Il avait toujours la bonne idée, le mot juste, l'expression qui redonnait confiance. Autant virtuose au collège que penché sur un piano, il ne laissait pas un seul instant de répit à celui pour qui son cœur battait. Tout au long de la journée, il lui envoyait des SMS, parfois comiques, parfois juste gentils, ainsi que, par e-mail, des vidéos de lui sur son clavier. Et comme cela n'était pas suffisant, il lui passait quelques coups de fil, le soir, juste pour s'assurer qu'il allait bien.

À proprement parler, ce n'était pas vraiment la fête pour Kilian. Le réveillon avait laissé des traces. Plus que jamais, ses parents se haïssaient, et lui, au milieu de tout cela, il dépérissait. Il passait ses journées à l'escrime, chez Martin, chez Yun-ah ou enfermé dans sa chambre à échanger des messages avec Aaron. Même Cédric était impuissant et n'arrivait pas à rétablir le calme dans le foyer. Il avait tout fait pour que le Noël de son frère soit rayonnant, mais ses vieux avaient tout gâché. Il fallait attendre des jours meilleurs. L'année nouvelle serait celle du changement et celle de la paix retrouvée, il voulait y croire plus que tout. Pour s'assurer qu'au moins le premier de l'an se passerait bien, il décida de sortir avec des amis et Sandra le soir de la Saint-Sylvestre, en amenant avec lui son frangin. Au moins la soirée fut acceptable. Quand minuit sonna, les deux garçons se firent la promesse d'un nouveau départ. Pour Kilian, ce qui était surtout nouveau, c'était l'image qu'il avait de lui-même. Cédric lui trouvait quelque chose de changé, mais quoi ? Au-delà de la tristesse qui était depuis longtemps la sienne, il semblait amoureux et mélancolique. Il était les deux.

Quand le garçon aux yeux verts reprit le chemin de l'école à la rentrée, il arriva le premier devant les grilles du collège, à la grande surprise de Madame Stricker. « Il » lui avait trop manqué, il voulait le voir, lui saisir la main et lui glisser quelques mots à l'oreille avant le début des cours.

Depuis le petit message laissé dans la neige, Kilian s'était retenu de toute démonstration d'affection, même si cela le démangeait. Il ne se sentait pas encore tout à fait prêt. Il voulait tout d'abord apprivoiser cet animal au pelage brun. Il ne fallait pas qu'une seule personne à Voltaire se retrouve au courant de ce qui s'était passé. Après tout, il ne s'était pas vraiment passé grand-chose, ce n'était qu'un jeu qui ne les concernait qu'eux deux, rien de plus.

Mais comme souvent avec les jeux qu'on apprécie, il est difficile de s'arrêter après une seule partie. Et cela, Aaron l'avait parfaitement saisi.

Tout le mois de janvier fut le théâtre de leur rapprochement et de leurs activités secrètes. Toujours rares, mais pourtant si intenses. Le jeune prodige voulait faire plaisir à son blondinet. Il le trouvait si naïf et ingénu qu'il n'avait d'autre choix que de le prendre en main et lui faire découvrir tout ce qu'un adolescent en pleine puberté peut être amené à aimer.

Vers la mi-janvier, il le traina de force un dimanche à la piscine, celle-là même où Kilian l'avait observé en cachette. Le pauvre collégien souffrait de se faire chahuter et couler par son camarade dans l'eau tiède du bassin. Comment Aaron pouvait-il rester si impassible physiquement alors que leurs corps se touchaient et se frottaient à chaque empoignade ? Lui en était bien incapable et faisait tout pour ne pas éveiller les soupçons des autres nageurs. Et quand vint le moment d'enfin sortir de l'eau et de se changer, Aaron amena le bel éphèbe dans un vestiaire à peine assez grand pour eux deux et se proposa de le sécher. Le slip de bain aux mollets, et après quelques frictions énergiques, Kilian était parfaitement sec, mais aussi particulièrement gêné. En cause, l'afflux sanguin incontrôlable qui parcourait son entre-jambe et qu'ainsi dévêtu, il ne pouvait cacher. D'après le brunet, qui savait s'y prendre, un bon coup de poignet était encore la manière la plus rapide et efficace pour calmer une méchante excitation. Cela ne fut pas si rapide que prévu, mais tellement agréable.

Ce qu'il aimaitOù les histoires vivent. Découvrez maintenant