47. Yun-ah et Aaron

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Dès le lendemain, Aaron se mit en chasse de sa future conquête. Il avait analysé à la loupe le comportement de la jeune Coréenne. Avec Matthys, qui lui servait à la fois de lieutenant, de confident et de co-stratège, il décida de déployer un plan en dix étapes pour autant de jours. Tout serait terminé bien avant la fin novembre, un mois était bien plus de temps qu'il n'en avait besoin pour arriver à ses fins. En attendant, il s'interdisait tout contact avec Kilian et Martin. Officiellement pour ne pas les impliquer. Officieusement parce qu'il ne pouvait s'empêcher de culpabiliser. Même s'il appréciait Yun-ah et lui reconnaissait de nombreuses qualités, ce jeu dans lequel il s'était engagé ne lui procurait qu'un plaisir des plus limités d'autant plus qu'il avait parfaitement conscience de la turpitude de son comportement. Il en venait souvent, le soir dans sa chambre, à maudire sa foutue fierté qui le poussait à réagir de manière aussi stupide et immature qu'un petit blondinet qu'il n'avait que trop souvent en tête.

Yun-ah n'était pas une fille comme les autres. Elle était douce, intelligente et surtout, célibataire endurcie. Sans doute la sévérité de ses parents avait détourné la jeune fille des plaisirs et distractions de son âge. Avec la belle Coréenne, il ne pouvait ni utiliser ses artifices, ni la manipuler et encore moins la draguer gauchement. Il avait beau crier sur tous les toits que toutes les filles étaient les mêmes, il savait bien, au fond de lui-même, que la vérité était tout autre. Mais il ne pouvait l'admettre, il ne pouvait pas perdre la face devant Kilian. Il devait embrasser cette perle asiatique, même si pour cela, il devait se comporter comme un vrai salaud. Il en avait conscience. Cela le minait mais il ne se laissait pas le choix.

La dispute avec Martin avait eu lieu un lundi. Tout serait fini un jeudi. Son plan ne pouvait pas échouer.

Le mardi, il s'assit à côté de sa cible en technologie. La première approche devait être douce et discrète. Pendant que le professeur récitait son cours d'une voix monocorde, Aaron parlait à la douce brebis de l'Asie, ce continent merveilleux qu'il avait foulé à de nombreuses reprises dans sa tendre jeunesse à cause de ses parents. Même, à cause du travail de son père, il avait passé plusieurs années au Japon quand il était en primaire et au début du collège. Les cultures nippone et coréenne avaient beau être antagonistes sur de nombreux points, ce n'était pas du tout un problème dans la conversation. Au contraire, l'occasion d'échanger sur les différences entre ces deux pays était appréciable. C'est ainsi que Yun-ah découvrit l'ouverture d'esprit d'Aaron.

Le mercredi, le professeur d'histoire décida d'organiser un quiz pour célébrer ses élèves les plus cultivés. Il ne faisait aucun doute qu'un duel à trois féroce allait opposer le fier Adrien, la belle Yun-ah et le surdoué Aaron. Il n'y avait rien d'autre à gagner que l'honneur. Et le déshonneur des perdants bien sûr. Tandis que le reste de la classe s'endormait, que Martin dessinait dans son cahier des croquis du costume qu'il voulait porter lors de la convention de décembre, que Victor admirait son idole, que les fraicheurs commençaient à prendre un coup de chaud à cause du niveau intellectuel trop élevé pour elles, que Kilian admirait le paysage à travers la vitre et que Matthieu, le délégué, admirait les formes de Kilian à travers ses vêtements, la lutte était de plus en plus serrée entre les trois compétiteurs. Finalement, ce fut la Coréenne qui l'emporta d'une courte tête. Si Adrien fulminait à nouveau suite à cette défaite, le jeune brun, lui, félicita sa concurrente. C'est ainsi que Yun-ah découvrit qu'Aaron était bon perdant. Surtout quand il perdait volontairement, mais ça, elle ne s'en était pas forcément aperçue.

Le jeudi, le chasseur envoya son fox-terrier draguer ouvertement sa proie. Matthys connaissait son rôle et le jouait à la perfection. Il ne suivait pas Aaron comme Victor obéissait à Adrien. Son camarade avait été le seul à s'intéresser sincèrement à lui, à lui avoir parlé, à avoir fait preuve de sympathie. Il voulait lui être utile pour le remercier de sa gentillesse à son égard. L'idée venait de lui. Aaron avait commencé par refuser, puis devant l'insistance du frêle châtain, il accepta ce plan qui consistait à harceler Yun-ah jusqu'à ce qu'elle s'énerve, pour mieux permettre au jeune brun de s'interposer et de la défendre. Le moment était bien choisi. Les filles sortaient toujours plus lentement des vestiaires de la piscine que les garçons. Tandis que Kilian et Martin attendaient dans le car, la Coréenne était sans défense. Matthys lui mit la main aux fesses, Aaron vola au secours de la demoiselle en détresse. Le châtain accepta sans rechigner les faibles coups que le brun feignait de lui donner et s'en alla sans demander son reste. C'est ainsi que Yun-ah découvrit qu'Aaron était un fier chevalier blanc.

Ce qu'il aimaitOù les histoires vivent. Découvrez maintenant