III - Ledtas

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Alors qu'il franchissait l'Agora, Ledtas porta un regard nostalgique sur l'Ecol Namy de l'autre côté de la place publique. Jamais plus il ne se rendrait dans l'établissement scolaire, qui appartenait désormais à son passé. À la place, il se tourna vers les deux structures les plus imposantes de la ville haute.

La Forteresse de Valor. Siège de l'Aréopage, elle servait également de résidence officielle pour les maîtres du Conglomérat : le Primat Valor, bien sûr, mais aussi le Haut-Commandant Tal'Garath et les six autres Autorités ; ou plutôt les cinq, car il était de notoriété publique que l'Autorité Xaroth, le précédent Primat avant Valor, préférait désormais loger dans sa propre cité. Le Capitole jouxtait la Forteresse sur son flanc sud. Centre de recherches de Kalsura et cœur intellectuel du Conglomérat, il était tel un cocon couvant les révolutions technologiques qui feraient bientôt partie intégrante de l'avenir de Kalsura.

Si la Forteresse de Valor était bâtie de marbre et de pierre dans une tendance éclectique mêlant les styles architecturaux de différentes époques, il en allait tout différemment du Capitole. Il n'aurait pas été possible d'imaginer deux structures juxtaposées plus différentes l'une de l'autre. Le Capitole se distinguait de la Forteresse par sa modernité. Les murs en ferro-ciment, aussi sombre que la nuit, étaient débarrassés de toute fioriture ; les angles étaient épurés, et les parois lisses. L'intimidante structure n'offrait aucun détail sur lequel le regard aurait pu s'attarder. Un dôme vitré de cinquante mètres de diamètre surplombait l'ensemble, lui-même soutenu par une armature en fer trempé. Aux endroits où les fenêtres remplaçaient les murs, le vert était recouvert d'un grillage. Oui, un grillage fin et régulier était apposé sur le dôme, si fin qu'il ne permettait aucun passage, que ce soit d'un homme ou d'un simple plan industriel.

L'ensemble de la structure était délimitée par un périmètre de sécurité au métal tout aussi noir, à l'exception d'une seule ouverture formée par une arche en brique rouge, vers laquelle Ledtas se rendit. Sur la façade, soudée en lettrine ferrée et pourvue en arc de cercle, était écrite l'inscription suivante :

L'innovation sauve le monde.

Un militaire armé d'un fusil à vapeur était posté en dessous de l'arche. Il sortit de sa poche une convocation et la présenta au garde. Celui-ci hocha de la tête et rehaussa une barrière pour le laisser passer.

Lorsque Ledtas pénétra dans le vestibule du Capitole, il se rendit compte que le plafond se prolongeait jusqu'au dôme, près de quatre-vingts mètres au-dessus de sa tête. Il fut d'autant plus frappé par le manque de luminosité régnant dans le hall et par l'ombre du grillage se reflétant sur sa peau. Comme dans l'élévateur, le poids de la claustrophobie s'abattit sur lui. Il n'y avait pas non plus de guichet d'accueil pour le guider vers ses départements, l'entrée étant seulement pourvue de quelques signalétiques. Livré à lui-même, il chercha son chemin. Comment s'y retrouver entre tous ces étages... ?

« Ex... excusez-moi, bégaya-t-il avec timidité. Où se trouve la section "Recherche & Développement N° 36" ? »

Mais les employés étaient trop absorbés dans leur travail pour lui porter assistance. Ledtas ne savait plus où donner de la tête. Il se fit chaudement réprimander lorsqu'il se trompa de département et rebroussa aussitôt chemin. Après avoir erré dans le Capitole pendant près de dix minutes, il trouva enfin sa section au troisième étage. Quel labyrinthe ! Heureusement qu'il était parti en avance... Il alla se présenter à son supérieur, un petit gars assez costaud et au crâne d'œuf.

« Bonjour monsieur, dit-il en présentant sa main. Ledtas Mataris. Je suis la nouvelle recrue.

— Ah oui, le deuxième diplômé. Bienvenue au Capitole, garçon ! s'exclama le gaillard d'une voix rocailleuse tout en serrant sa main d'une poigne solide. Je suis le contremaître Duncan Dekth et c'est moi qui serai votre responsable. Je vous attendais pour vous présenter nos activités, à vous et l'autre nouveau. »

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