II - Nala

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Le mardi suivant en début d'après-midi, l'alarme de la manufacture résonna dans l'entrepôt et interrompit son travail.

« Sortez tous, ordonna leur contremaître d'une voix peu amène, le travail est terminé pour aujourd'hui !

— Que se passe-t-il ? demanda Nala tout en se levant.

— L'usine d'à côté dévoile les nouvelles machines de guerre sur lesquelles elle a travaillé au cours des mois précédents, lui expliqua précipitamment son supérieur. L'Autorité Xaroth a exigé que tous les travailleurs de la ville participent à la démonstration. »

Lorsque Nala sortit de son lieu de travail, une animation inhabituelle agitait les Champs de Xaroth. Marchant dans tous les sens, des passants se pressaient vers l'allée principale où défilaient déjà les imposantes machines sorties de l'usine voisine. À cause de l'attroupement et de la distance, elle ne distinguait pas encore les engins avec précision, mais elle entendait déjà leur moteur rugissant par-delà les exclamations de la foule. Elle n'eut pas besoin de jouer des coudes pour s'approcher. Chaque fois qu'elle adressait un sourire aux hommes, ces derniers la laissaient passer devant eux avec un geste galant.

Elle obtint enfin une vue dégagée. D'impressionnantes structures de métal se mouvaient sur d'épaisses chenilles. Il s'agissait de gigantesques coques de plusieurs mètres de côté et protégées d'un épais blindage. Un immense « X » gravé sur le métal traversait la face avant de toutes parts ; au sommet de l'ensemble, un gigantesque canon de plusieurs mètres s'élançait vers l'avant. Nala n'avait jamais rien vu de tel. Ces tanks imposants se mouvaient par la seule force mécanique, comme animés d'une volonté propre.

« À quoi va nous servir ces engins porteurs de mort ? s'interrogea-t-elle tout haut.

— Jeune fille, j'aurais adoré participer à des combats avec cette arme invincible à mes côtés, lui répondit un homme approchant la soixantaine. Vous ne connaissez pas votre chance de vivre pareille époque. »

Nala se tourna vers l'homme, à qui il manquait un bras. Un ancien soldat, dénigré par le Conglomérat...

« Je comprends et je suis désolé, lui dit-elle avec un regard empreint de pitié.

— Ces chars sont une aubaine, ajouta un autre individu. À ce qu'il paraît, le Conglomérat subit une invasion en ce moment même !

— Mon dieu... ! s'emporta Nala d'une voix rauque. Par les Helkaris ?

— Tout ce que je sais, je le tiens d'un soldat, répondit l'homme en haussant les épaules. Les derricks de l'Autorité Hellasius ont essuyé un assaut dévastateur, entraînant la mort de centaines de soldats et de civils !

— Il dit vrai, assura une femme qui se joignit aux commérages. Le mari de l'une de mes amies n'était pas rentré et des soldats sont venus chez elle pour lui annoncer son décès ! Officiellement à cause d'une grave explosion, d'un prétendu "accident industriel", mais c'est faux ! L'Aréopage ne dévoile pas qu'il s'agit d'une attaque.

— Alors nos frontières sont envahies... balbutia Nala, transie de peur. La guerre est inévitable... Elle vient sur nous à nouveau !

— Oui jeune femme, dit l'ancien soldat tout en posant son unique main sur l'épaule de Nala en guise de réconfort. Faites bien attention à vous dans les jours qui viennent... »

La liesse de la foule et ces armes de mort la rassuraient, à présent. Rien qu'un seul de ces tanks offrait un spectacle des plus impressionnants ; or le défilé s'étendait sur plusieurs centaines de mètres. Si un seul char d'assaut pouvait faire pencher une bataille en faveur du Conglomérat, un corps blindé entier pouvait s'emparer d'une nation ! Que pouvait opposer l'envahisseur face à de tels bijoux de technologie, face à de telles merveilles de destruction ?

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