6. La meilleure amie

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Samedi

Allongé dans son lit, Abdel songeait. Déjà un mois qu'il fréquentait Fabien, et leur relation allait pour le mieux. Il n'avait pas à se plaindre. Même que de temps en temps, Fabien savait se montrer doux et patient avec lui. Ça lui plaisait. Ce moment de séduction qui précède l'acte en lui-même. Fabien commençait à comprendre ce qui lui plaisait, et faisait des efforts pour le satisfaire également. Ce n'était pas le cas de tous. Ils avaient débuté un rituel. Chaque vendredi soir, il sortait ensemble. La semaine prochaine, il savait que Fabien ne le pouvait pas, ayant une générale pour son spectacle. Mais ce n'était pas grave, puisqu'Abdel avait promis de venir voir le spectacle le samedi.

Le seul point noir, c'était que maintenant qu'Abdel avait accepté d'être pris en levrette, Fabien le lui demandait à chaque fois. Et ça ne lui plaisait toujours pas. Alors bien sûr, Fabien cherchait à le mettre en condition avant, ayant compris que c'était difficile pour lui. Mais en fait, Abdel ne ressentait rien dans cette position. Ni plaisir, ni douleur. C'était comme si son corps était anesthésié. Il avait l'impression d'être une personne d'autre à chaque fois, qu'il n'était plus dans son corps, mais ailleurs, très loin. Ça le déroutait à chaque fois. Et puis, dès que Fabien se retirait, il revenait à lui. Il ne savait pas quoi en penser.

En ayant marre de réfléchir à ça, il se redressa et s'habilla d'un simple teeshirt blanc et d'un jeans, n'ayant pas envie de faire d'effort. De toute façon, s'il sortait, ce n'était pas pour rencontrer quelqu'un ce soir, mais juste pour se changer les idées. Il prit son carnet qu'il rangea dans son sac, ses écouteurs et son skate et enfila son Trench Coat noir, pour rejoindre le salon.

— Tu sors ?

Il se tourna vers Will, interpellé. Il était devant son ordinateur en train de retoucher des photos. Il ne lui avait même pas jeté un coup d'œil. Ce n'était pas étonnant, Will était si dévoué à son art...

— Ouais, j'rentre pas trop tard.
— Tu sors avec qui ?
— Je sors seul. Je vais me poser pour écrire.
— Profite bien alors !

Il sourit et sortit de l'appartement en claquant la porte. Une fois dehors, il posa son skate et posa son pied gauche dessus. Il s'élança. La vitesse faisait battre le vent contre ses cheveux bouclés, et rafraîchissait sa peau. Il aimait faire du skate. Dès que ses parents lui avaient offert sa première planche, il était tombé amoureux de la discipline. Aujourd'hui encore, il adorait en faire, mais n'en prenait plus le temps. Avant, il allait au skate parc. Aujourd'hui, cela ne lui rappelait que sa grande solitude. Et il n'allait pas s'encombrer de son skate en boîte. Alors il profitait du peu de fois où il pouvait en faire.

Il arriva en un quart d'heure au bar qu'il voulait. C'était peu, mais cela lui avait tout de même fait plaisir. Il s'installa en terrasse, sortir son paquet de cigarettes, son carnet, son stylo, ainsi que ses écouteurs qu'il enfonça dans ses oreilles. Le serveur lui demanda ce qu'il voulait et il prit une simple bière ambrée. Dès que la musique s'empara de son esprit, il prit son stylo à plume et écrit tout ce qui lui passa par la tête, sans chercher à créer du sens ou une quelconque cohérence. Juste des phrases à la suite des autres, des rimes sans queue ni tête, pour s'évader de sa vie en la couchant sur le papier.

Pourquoi diable la mort me terrifie
Je sens si souvent ses bras m'engourdir
Mais à quoi cela sert-il de fuir
Après tout je n'attends déjà plus rien de la vie

J'ai croisé son regard en ses jours fanant
Des yeux aussi beaux n'appellent que la luxure
De ceux qui sont complices d'un mensonge aussi dur
Je m'enfonce dans l'erreur en le comprenant

PHOBIA TO EUPHORIAOù les histoires vivent. Découvrez maintenant