36. L'épilogue

11 0 0
                                    

••~••
Samedi

Abdel se réveilla, les yeux encore gonflés. Il avait dormi d'un sommeil de plomb, sans rêve, juste pour évacuer le trop plein d'émotion. Il ignorait qu'elle heure il était. Tout ce qu'il savait, c'était qu'il était contre Chiheb. Et c'était tout ce dont il avait besoin pour le moment. Chiheb qui lui avait pardonné. Chiheb qui lui avait fait ouvrir les yeux. Chiheb qui l'avait ramassé pour le coucher contre lui. Alors à cet instant, être entre ses bras étaient le plus beau cadeau du monde. Mais il sentait quelque chose lui faire mal, et les souvenirs de la nuit lui firent monter les larmes aux yeux. Il chassa toutes ses sensations, toutes ses odeurs, tous ses bruits de sa tête. Il n'avait presque aucun souvenir visuel, ses yeux avaient été bandés. Il remua contre le torse chaud de Chiheb pour lui faire comprendre qu'il était réveillé, et lui avoua d'une petite voix :

— Faut que j'aille me désinfecter...
— Tu es blessé ?
— Dans le dos. Je ne pourrais pas atteindre je pense...

Chiheb l'aida à se relever. Il n'avait pas pu se rendre compte de son état, étant donné qu'il portait encore son gros manteau. Mais il savait qu'il avait dû pas mal saigner, juste à la douleur qu'il avait ressentie quand le couteau avait séparé sa peau.

— Qu'est-ce qu'il s'est passé ?

Abdel soupira, ne se sentant pas d'en dire plus. Mais en même temps, il ne voulait pas que Chiheb ait une frayeur en voyant l'état de son dos, dont il ignorait tout. Alors il avoua :

— Il a sorti un couteau...
— Putain...

Chiheb, en signe de soutien, lui serra le bras avec douceur, juste pour lui faire sentir sa présence. Ils se rendirent dans la salle de bain et Abdel commença à se déshabiller, étrangement pudique. Ce n'était pas dans ses habitudes, de se montrer si honteux de son corps. Il était plutôt d'avis qu'il n'avait pas à rougir pour ça. Mais Chiheb le regardait, et il ne savait plus à quoi ressemblait son corps, alors...

— Oh merde...

Abdel avait à peine fini de retirer son teeshirt que Chiheb avait soupirer ces deux mots. Il ne comprit pas, même si, il savait que ce ne devait pas être beau à voir.

— Tu... tu sais ce qu'il a écrit ?

Il se figea, pas sûr de comprendre.

— Quoi ? Il a écrit quelque chose ?
— Oui...
— Quoi ? Quoi !
— Salope...

Son souffle se coupa alors qu'il se remettait doucement de l'annonce. Il n'avait pas compris que cet inconnu qui ne lui avait même pas donné son nom avait osé graver à même sa peau une insulte. En même temps, c'était ce qu'il était, une salope. Comme Chiheb l'avait dit, il avait consenti à se faire agresser. Il n'y avait plus rien à sauver chez lui. Il ferma les yeux, sentant qu'il allait de nouveau craquer. Devant savoir qu'il ne dirait plus rien, Chiheb sortit du désinfectant, qu'il pulvérisa sur ses plaies. Il eut un sursaut, la douleur refaisant son apparition au contact du liquide. Il rouvrit les yeux et vit Chiheb sortir des compresses. Il les posa sur son dos pour éponger le sang, qui au vu de la couleur qu'elle avait quand il les jetait dans la poubelle, était conséquent. Aucun doute qu'il en gardera la cicatrice. Tout ça parce qu'il avait accepté de suivre un porc.

— Je sais que tu n'as pas envie d'entendre ça mais...
— Je ne porterais pas plainte.
— C'est grave ce qu'il t'a fait.
— Et qui me croira ? J'ai accepté de le suivre après tout.
— Oui mais tu as une preuve !
— Je ne sais même pas comment il s'appelle.

Chiheb soupira et abandonna, continuant à étaler les compresses sur les plaies. À ce rythme, il n'en aurait pas assez. Il enroula ensuite un bandage autour de son torse, et mit les vêtements imbibés dans le panier de linge à laver. Il sortit ensuite de la salle de bain, sans attendre Abdel. Alors il sortit à son tour et récupéra son sac devant l'entrée, cherchant un nouveau pull pour se recouvrir. Quand il releva la tête, il vit que Chiheb était assis sur son lit, se tenant la tête entre ses mains. Prudent, Abdel s'approcha et s'assit juste à côté de lui, alors même qu'il ne bougeait pas. IL savait que Chiheb avait enduré beaucoup de choses lui-aussi. Que les disputes à répétition, que ses sautes d'humeur, ses mutilations, ça lui pesait. Abdel ne pouvait plus penser qu'à lui-même, il était en couple, et il voulait assumer. Il posa sa tête sur son épaule, murmurant :

—C'est dur pour toi aussi. Tu as dû faire face a beaucoup de chose ces dernières semaines... mais tout va bien maintenant, c'est fini.

Abdel le prit par les épaules se collant d'autant plus contre son corps qui s'était mis à sangloter.

— Moi aussi, je prendrais soin de toi dès à présent.

PHOBIA TO EUPHORIAOù les histoires vivent. Découvrez maintenant