Chapitre 2

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« Rapport d'observation n°66S-1 – Sommet de la Gestion – Structure familiale :
L'étude n°2052-SVF-47 met en lumière la meilleure efficacité et la docilité des sujets éduqués hors noyau familial. Dans l'hypothèse d'une gestation naturelle impossible au cours des années à venir, nous pourrions envisager la création d'une aile d'éducation hors foyer pour former les sujets engendrés par gestation artificielle. »

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Errol balança la chaise à travers le salon. Hors de lui, il écrasa ses poignets ecchymosés sur la table, attrapa ses boucles et contint le cri de rage qui se réveilla. Paniquée, Emily se réveilla en sursaut et quitta leur chambre pour le rejoindre. Elle attrapa rapidement ses mains et le plaqua contre un mur. Les deux frères avaient la même tendance à attaquer leur cou lorsque l'angoisse les déchirait.

— Respire, Errol, ordonna Emily d'un ton glacial.

Les grognements de l'homme se perdirent dans un jappement éraillé. Il chercha à la repousser, mais la force des bras augmentés de sa femme surpassait de loin la sienne. Incapable de bouger, il s'épuisa à se débattre et à contrôler l'élan de colère sourde qui grondait en lui.

— J'y arrive pas, cracha-t-il.

— Si, t'y arrives, répliqua la femme. Concentre-toi.

— Tais-toi.

— C'est toi qui te tais. Obéis. Respire. La laisse pas gagner. T'es plus fort que ça.

Chaque fois que les mauvaises nouvelles s'accumulaient au point de ne plus lui laisser assez d'espace pour respirer, l'anxiété nichée au fond de lui remontait à la surface. Et chaque fois que l'anxiété dépassait ses limites, son corps se laissait submerger. Les bases branlantes de Nwelwe menacées par ses membres réfractaires à l'ordre, ses soutiens écrasés par le poids d'un espoir factice, les problèmes d'acheminement réseau, la pénurie de vivres, le manque d'oemfeim, les cauchemars, les cris, Kian, la peur, tout s'embrouillait au point de fermer ses poumons déjà avides d'air et de le faire exploser.

— Elle me rend malade, Emy, articula Errol en geignant. Elle me bouffe. Elle revient à chaque fois, elle me casse la gueule comme si j'étais un moins que rien, elle me démolit à chaque putain de fois qu'on me rappelle que j'ai foiré.

— Tais-toi, et reprends le contrôle.

Les membres tremblants de l'homme la repoussèrent, mais Emily ne le laissa pas faire. Elle contint ses coups, ses cris, ses insultes, ses halètements, comme elle en avait l'habitude depuis si longtemps jusqu'à ce que les lèvres d'Errol trouvent le chemin des siennes. Emily glissa alors ses mains dans les siennes de son mari et lui rendit son baiser enflammé, marqué par les bonds incessants d'une angoisse qui s'apaisait peu à peu. La panique se tut peu à peu derrière le choc de leurs dents, puis l'étreinte désireuse de leurs langues, pour laisser place au désir. Errol avait toujours pris la mauvaise habitude de taire ses angoisses par le sexe, et Emily à le désirer plus que tout lorsque seuls ses instincts primaires l'alimentaient.

Sa bouche chercha le menton, puis le cou de sa femme. Emily baissa leurs mains entrelacées le long de leurs corps, sa peau réveillée par les baisers successifs de son mari, et posa sa tête sur son épaule. Il commençait à se calmer, et elle à s'enflammer.

— Sur le canapé, avertit-elle en un souffle. Je viens de changer les draps les draps du lit.

— Tes désirs sont des ordres.

La Fourmi FantômeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant