Chapitre 5.3

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— Les niveaux communiquent entre eux par les piliers centraux D1, D2 et D3, mais pas seulement, indiqua-t-il en centralisant son plan de recherche de failles. J'ai réfléchi. Et je me suis souvenu comment Mason était sorti de la P3 sans que l'armée le suive.

— Les colonnes d'évacuation de déchets, se souvint l'homme en portant la main à son bras cicatrisé.

— Les colonnes d'évacuation de déchets, confirma Errol. Trois par dômes, isolés dans des complexes gigantesque, surveillés et sondés au moins une fois par jour, mais le seul accès physique par lequel on peut les avoir. Si on arrive à pénétrer dans une colonne, on pourra se hisser au niveau 1.

— Et ensuite ? s'enquit Thembi, intéressée.

— Ensuite, c'est plus compliqué.

La tireuse faillit relever que la manœuvre était déjà compliquée, mais elle s'en abstint. Elle regarda le plateau vide du premier niveau. Kai n'était pas parvenu à se procurer la maquette tridimensionnelle du dôme supérieur, mais il savait que son frère la connaissait. Il n'avait de plan précis, pas de direction, seulement des certitudes.

— Je sais qu'on est pas très nombreux, et qu'on est pas suffisamment solides si on se retrouve avec l'armée, mais je pense vraiment qu'on peut atteindre le niveau 1. On a déjà récupéré pas mal d'informations dessus. Notre problème se situe encore en haut, mais dans l'hypothèse où l'on réunirait assez de données, on pourrait établir une stratégie précise pour remonter au niveau 2 et l'isoler du reste. Le niveau 2 ne fonctionne pas sans les serveurs et les approvisionnements des niveaux inférieurs. Si on les isole, alors on aura un moyen de marchander.

— Non, répliqua Kian.

Errol leva les yeux vers son frère, surpris. L'agacement se réveilla, la peur, et les incertitudes qui l'habitaient depuis le jour où il s'était enfermé.

— Comment ça « non » ? répéta l'homme.

Kian ramena ses poings à sa nuque et réfléchit un instant. Il avait longtemps vécu au niveau 2, et il l'avait souvent analysé pour comprendre pourquoi de telles différences existaient entre les différents étages. L'élite avait besoin de la production de base des étages inférieurs, mais pour le reste, elle tirait ses forces directement des souterrains.

— Tu ne pourras pas marchander, expliqua l'homme. Le niveau 2 est quasiment indépendant.

Errol se leva brusquement et posa ses mains sur la table. Emily s'écarta, de peur de recevoir un coup involontaire.

— Alors quoi ? On abandonne et on attend sagement qu'il nous ouvre ses portes ?

— Il ne le ferait pas, répliqua Kian.

— Bien sûr qu'il le fera pas ! s'emporta Errol. C'est une putain de forteresse isolée ! Mais si on veut réussir, il faut l'atteindre. C'est toi qui l'as dit : monter les niveaux et attaquer au cœur du problème. Alors si c'est juste pour lâcher un « non » dès qu'on propose quelque chose alors que t'as rien en tête, ferme-la. On est déjà assez sous tension à cause de ta mise à prix, viens pas aggraver ton cas. Si tu veux repartir faire mumuse avec les gars niveau 2, je t'en prie, nos portes sont ouvertes. T'auras d'autres lâches dans ton genre pour te guider dehors.

Le souffle court, la colère bouillonnant en lui, Errol serra les dents. Le manque d'investissement de son frère commençait à l'agacer. Bien que ses aides ponctuelles envers Kai aide Nwelwe à se sortir des situations délicates, jamais il ne participait vraiment au mouvement. Il se contentait de s'isoler, de profiter de leurs ressources et d'attendre, comme si rien de plus ne l'attendait. Pourtant, à cet instant, Nwelwe avait besoin de lui. Elle l'avait accepté en son sein parce qu'ils partageaient des valeurs, qu'il avait des compétences à mettre à son service.

La Fourmi FantômeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant