Chapitre 40

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GABRIELLA

La mort de Betty m'avait complètement terrassée. Lorsque j'étais rentrée chez moi suite à ma visite à l'hôpital, je n'avais pas tenu grand discours auprès des miens. J'étais accablée par la tristesse, et je n'avais pas eu le coeur à converser ou m'étaler sur ce qui s'était passé. J'ai su que par la suite, maman avait appelé Isabelle et cette dernière l'avait informée du décès de madame Jones. Ce qui m'a valu une très longue conversation avec ma mère sur le cycle de la vie, le point final d'une longue route, l'inévitable tristesse de la perte, puis le temps qui répare et colmate le coeur abîmé.

Je n'avais fait qu'acquiescer tout au long de son monologue. Je ne pouvais pas dire que je n'appréciais pas sa sollicitude et son réconfort mais ma tête était dans un brouillard depuis plusieurs jours et ses mots ne me parvenaient qu'en échos lointains. J'avais l'impression que tous les évènements de ces derniers jours avaient balayé tout ce qu'il me restait d'équilibre. Je marchais sur un fil si fin qu'il me paraissait presqu'invisible. À chaque pas en avant, je manquais de chuter lourdement.

Lorsque ma mère avait quitté ma chambre après m'avoir pris dans ses bras et m'avoir laissé vider toutes les larmes de mon corps, j'avais sauté de mon lit pour reprendre mon petit carnet. J'avais passé la soirée à lire tous les passages de Madame Jones, me rappelant son bon souvenir. J'étais si heureuse d'avoir couché sur papier ses pensées, son histoire, ses réflexions. J'avais l'impression d'avoir gardé une empreinte d'elle à tout jamais, et ça m'avait permis de rendre sa mort plus acceptable, plus tolérable.

Mon seul regret avait été de ne pas avoir encore profité davantage d'elle, ni avoir eu le temps de lui dire aurevoir. Le lendemain matin, j'avais encore les yeux rougis par mes sanglot. Mon corps me semblait encore lourd de la veille, mais mon brouillard mental s'était quelque peu dissipé. J'arrivais à voir un peu mieux l'horizon, bien que celui-ci était bien moins lumineux qu'à l'accoutumée.

Plus tard dans la matinée, lorsque mon téléphone avait sonné et que le nom de Josh était apparut, j'étais partagée entre excitation et colère. Quand il m'a donné rendez-vous de l'autre côté de ma ruelle, j'étais restée un moment interdite. Mes parents étaient partis travailler, mais mes frères étaient encore à la maison. Je m'étais éclipsée le plus discrètement possible, passant au travers des radars de mes frères sans trop de problèmes. Quand je l'ai aperçu derrière les hauts buissons, mon coeur avait accéléré son rythme. J'en étais venue à me questionner si un jour je parviendrai à reprendre le contrôle de mes émotions lorsqu'il s'agissait de lui ? Si un jour j'arriverai à prendre des décisions censées le concernant ? Si ma raison me reviendrait un jour ?

L'éclat de ses pupilles était plus évocateur que ses propres mots et j'étais quelque part heureuse de constater que je n'étais plus la seule à marcher sur ce même fil. Cependant, je n'avais rien oublié de ma colère vis à vis de lui. Je sentais qu'il ne me disait pas tout et j'en ressentais une grande frustration. J'avais cru voir une lueur d'espoir quand il avait évoqué le coach mais comme à son habitude il m'avait encore écarté en refusant de me donner davantage de détails sur ce qu'il comptait faire ou dire. Et puisqu'il ne changeait pas de position à mon sujet alors j'avais fait ce qu'il attendait de moi, je m'étais tenue à l'écart.

J'avais ouvert la porte d'entrée avec prudence et l'avais refermée derrière moi de la même manière, sans un bruit. J'avais beau tendre l'oreille, je n'entendais rien à l'étage, mes frères devaient encore dormir. Je sentis mon téléphone vibrer dans la poche arrière de mon short et je en fus pas surprise de voir un message de Josh.

- Je sais que c'est compliqué pour toi, mais ça l'est tout autant pour moi. Sache-le. Je vais parler au coach de Max, je te demande juste de me faire confiance.

From the shadow to the lightOù les histoires vivent. Découvrez maintenant