Chapitre 68

11 2 1
                                    

GABRIELLA

L'obscurité... J'y avais plongé de tout mon être depuis que j'avais quitté ce parking de l'enfer aux côtés de Sophia. La dernière image qui m'était restée en tête était le reflet de Josh dans le rétroviseur alors que la voiture s'éloignait pour me ramener chez moi. Sa silhouette s'était peu à peu dissipée à mesure qu'on s'était engagée sur la grande avenue. Je l'avais vu frapper sa moto d'un coup brusque et violent avant que je ne scelle mes yeux. Je ne me souvenais plus de comment j'avais réussi à me relever pour atteindre la voiture, ni même comment j'avais réussi à passer outre l'interrogatoire de ma famille pour atterrir dans mon lit, sans même avoir pris la peine de me déshabiller.

Je pouvais quand même entendre la voix de Sophia se mêler à celles de mes parents et de mes frères au rez-de-chaussée. Mais plutôt que de tendre l'oreille, je m'engouffrai sous ma couette, étouffant le bruit de leur conversation sous le coton épais. Je pouvais déjà deviner le sujet de leur conversation et j'étais déjà bien trop anéantie pour en écouter davantage. Je ne ressentais presque plus rien, si ce n'est le vide immense qui s'était creusé à l'intérieur de moi.

Je n'avais qu'une hâte, m'endormir pour ne plus avoir à sentir mon coeur se tordre douloureusement, ou encore faire cesser le flot de larmes qui coulait inlassablement le long de mes joues. Comme une âme en peine, j'attendais que le sommeil m'emporte avec lui et je priais intérieurement que le soleil ne vienne pas m'agresser de ses rayons de sitôt.

Je ne savais pas combien de temps j'avais dormi mais je ne fus pas surprise de voir un fin rayon de lumière traverser mon volet. Même si je sentais la chaleur de ce dernier emplir ma chambre, je restais frigorifiée. Mon corps était lancinant, victime des tensions de la veille. Peu à peu, je reprenais douloureusement conscience de mes membres. J'avais la sensation d'être passée sous une multitude de camions, et que je m'en retrouvais totalement brisée, incapable de bouger mes jambes ni même mes bras sans que je n'ai à étouffer un cri de douleur. Je frottai mécaniquement mes yeux, me familiarisant de nouveau avec le semi éclairage de la pièce. En balayant ma chambre des yeux, je tombai sur le sweat à capuche de Josh, soigneusement posé sur ma chaise de bureau, et ce fut comme si un nouveau ras de marée m'emportait avec lui, réveillant chaque émotion de la veille.

Je me redressais dans mon lit sans jamais quitter des yeux le vêtement. Je restais là à le regarder comme on pouvait admirer une pièce d'un musée, vestige d'un passé qui me semblait si proche et lointain à la fois. Un passé dans lequel il m'avait promis le monde, un monde qui n'avait finalement existé que dans mon imagination. Le bip aigu de mon téléphone attira mon attention et je l'avisai avec beaucoup d'appréhension. Ma main était tremblante et fébrile en le prenant, comme si j'étais prête à désamorcer une bombe. Voir figurer le nom de ma meilleure amie à côté de l'enveloppe ne m'apaisa pas pour autant. Je décidai de retourner l'appareil face contre table. Je n'étais clairement pas prête à affronter de nouveau cette comédie. Je n'avais ni la tête, ni le coeur, ni l'énergie à accueillir un nouveau mensonge. Ces dernières vingt-quatre heures avaient bouleversé toutes mes croyances mais aussi toutes mes espérances, et j'allais devoir vivre avec.

Quand deux petits coups retentirent contre ma porte, je compris que ma courte hibernation avait touché à sa fin et que j'allais devoir à nouveau affronter la réalité. La tête brune de Sophia passa dans l'embrasure et je la vis me jeter un coup d'oeil soucieux.

- Tu peux entrer. L'invitai-je, en lui faisant signe de la main.

Elle avança timidement, la mine crispée, et vint s'assoir au bout de mon lit. Elle baissa les yeux, tout aussi gênée que moi par cette situation.

- Je suis désolée Sophia pour tout ça. Pour t'avoir mêlée à tout ça, pour t'avoir obligée à subir toute cette histoire.

Par ma faute, elle avait dû assister à tout ce mélodrame. Elle s'était disputée avec mon frère, puis avec son cousin et même si les deux avaient mérité son courroux, je me sentais terriblement coupable. Je n'avais pas pour habitude de créer d'histoires autour de moi, et encore moins en être au centre.

From the shadow to the lightOù les histoires vivent. Découvrez maintenant