XIII. Insomnie

921 39 11
                                    


Gabriel essayait de dormir dans la chambre sombre de chez Jordan, les murs étaient blancs, c'était une chambre sans personnalité, uniquement dans les tons beiges, très minimaliste. Il était dans un grand lit blanc, il se serait cru à l'hôtel. Cela faisait des semaines qu'il n'avait pas eu l'occasion d'aussi bien dormir. En effet, ses nuits étaient souvent tourmentées par les désirs de Stéphane qui lui interdisaient de dormir. Et Gabriel était contraint de les combler bien trop souvent.

Il se sentait mal dans son corps, cela faisait des mois qu'on l'abusait physiquement et mentalement. Il ne savait plus comment se comporter quand il n'y avait aucun danger, il était en hypervigilance permanente, ce qui l'empêchait de dormir. Il n'arrivait pas à croire qu'il ne lui arriverait rien cette nuit et qu'il était en sécurité. Il se tournait et se retournait dans un lit bien trop grand pour calmer les angoisses de quelqu'un d'aussi nerveux que lui.

Il était incapable de dormir seul. Il avait besoin de Jordan. Il sortit de son lit et se dirigea sur la pointe des pieds jusque dans sa chambre. Elle était spacieuse, avec une fenêtre qui longeait tout le mur donnant sur une magnifique vue de Paris (sûrement de l'argent détourné qui était parti là-dedans pour avoir un appartement aussi beau...). L'éclairage de la tour Eiffel baignait son dos d'une lumière céleste, révélant toutes les subtilités de sa musculature développée. Il s'arrêta un instant dans l'ouverture de la porte pour contempler cette image, le souffle coupé, par sa pureté saisissante.

Il n'osait pas s'approcher de lui. Il avait peur de le déranger ou qu'il le rejette, comme il l'avait fait auparavant. Il chercha une excuse pour justifier sa présence dans la chambre de Jordan. Un cauchemar ? Non il n'avait plus 6 ans. Mais il pouvait lui dire qu'il n'arrivait pas à dormir comme ça, seul et confronté à ses angoisses, sans la moindre échappatoire.

"Jordan ?" chuchota Gabriel. Le jeune homme s'anima légèrement dans son sommeil. "Jordan ?" murmura-t-il en haussant légèrement sa voix tout en se rapprochant de lui. "Mmh ?" répondit Jordan à moitié endormi. "Je n'arrive pas à dormir." "Il y a des somnifères... Dans la salle de bain..." répondit-t-il en se rendormant. Il ne saisissait pas . "Est-ce que je peux venir avec toi ?". Pas de réponse. Il l'implora de nouveau. Pas de réponse. Le fait était que Gabriel avait vraiment du mal à dormir et qu'il avait vraiment envie de dormir avec Jordan.

Il se glissa timidement dans le lit et se blottit contre le dos de Jordan. Il écoutait sa respiration attentivement. Elle était calme et profonde. Il n'aurait jamais cru qu'un homme aussi imposant et agité que lui puisse s'abandonner au sommeil avec tant de facilité. La tension qu'il avait toujours ressenti en eux lors de leurs débats et de leurs entrevues privées s'effaçait soudain au profit d'une douceur éthérée qui les enveloppait tous deux. Un sentiment de sécurité qu'il n'avait jamais ressenti auparavant l'envahissait. Sa respiration résonnait dans tout son corps, collé au dos protecteur de Jordan. C'était devenu évident, il l'aimait.

Il vit toute leur histoire se dérouler devant lui : l'intégration de Jordan dans le parti présidentiel, la réunification politique de la France et surtout eux, unis face à toutes les épreuves qui croiseraient leur chemin. Et il savait, en fermant les yeux, qu'il serait prêt à tout abandonner pour faire exister cette réalité. 

Un point partout (Attal x Bardella)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant