XXXVI. Route barrée

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« Bon et bien parfait » conclut Leonardo. « Vous allez devoir amener un colis à l'adresse que je vais vous donner. Faites attention, c'est très fragile. » Ni Jordan ni Gabriel ne savaient jusqu'où il pouvait aller, mais ils prirent sa menace sérieusement.

Leonardo leur confia le paquet que Gabriel plaça précautionneusement sur ses genoux. Jordan démarra la voiture. Ils étaient enfin tous les deux. « Un manque d'énergie ? Vraiment ? » demanda Gabriel, agacé. « Toi aussi tu penses que je ne suis plus capable de faire quoi que ce soit ? » s'écria-t-il, blessé que personne ne le prenne plus au sérieux. « Tu ne comprends rien, laisse tomber. » répondit Jordan, frustré de ne pas avoir réussi à l'éloigner de cette affaire. La colère le faisait accélérer sans qu'il s'en rende compte. Incapable de dissocier sa conduite de ses émotions, il ne respectait plus du tout les limites de vitesse.

« Mais explique-moi, je n'attends que ça, moi, que tu m'expliques ! » lui cria avec emportement Gabriel. « Mais tu n'as aucun défauts qu'est-ce que tu voulais que je dise !? Tu es parfait et ça me rend fou parce qu'en te regardant je vois toutes mes failles ! La première fois qu'on s'est vu dans le restaurant tu crois que je parlais de qui !? Et tu as tout foutu en l'air alors que je voulais... » hurla Jordan, en se coupant, n'arrivant pas à lui révéler à quel point il tenait à lui. Gabriel se tut. Il s'attendait à tout de sa part sauf à ça. La voiture ralentit, alors que Jordan se calmait. Il regardait la route fixement, mais une expression de souffrance était discernable au fond de ses yeux. Celle d'admettre qu'il l'aimait malgré tout.

« Excuse-moi » dit Gabriel, doucement « Pour tout. » « Je ne veux pas de tes excuses, Attal. » répliqua-t-il, blessé. Gabriel s'abandonna à la fenêtre et prit la veste de costume de Jordan sur le siège arrière pour se couvrir avec. Ils devaient se rendre à Plaisance pour passer la nuit et par la suite rouler jusqu'à Rome, située à plus de 5h de route en voiture. Comme trop souvent, Gabriel s'endormit et Jordan ne put s'empêcher de garder un œil sur lui.

Au bout d'une heure, ils arrivèrent à destination. Il s'agissait d'une maison de location, assez isolée pour qu'ils soient loin du monde. Une petite villa typiquement italienne avec une belle cuisine en mosaïque verte. Il déchargea les valises qu'il mit dans chacune de leur chambre respectives et cacha le colis sous son lit, au cas où. Il ne restait que Gabriel, qui dormait profondément sur le siège passager. Jordan soupira lourdement et essaya de l'appeler pour le réveiller, sans succès. Il voulait le laisser là et aller se coucher, mais il en était physiquement incapable. Il se rapprocha de lui pour essayer encore de le réveiller, mais rien n'y faisait. Il tenait fermement la veste de Jordan, ce qui l'insupportait puisqu'elle allait être froissée et il serait contraint d'aller au pressing.

Jordan inspira lourdement. « Bon. Tu ne me laisses pas le choix visiblement. » se dit-il à lui même. Il détacha Gabriel et passa ses mains sous ses genoux et derrière son dos, pour le porter jusqu'à sa chambre. Il était léger comme une feuille pour Jordan qui commençait presque à prendre l'habitude de le traîner partout. Il le posa délicatement dans son lit, mais pour une raison qui lui échappait, Gabriel ne le lâchait pas. Il s'accrochait à lui, compliquant la situation. Il posa ses jambes sur le lit mais il n'arrivait pas à décrocher ses bras. « Gabriel, lâche moi » souffla Jordan, épuisé. Mais son sommeil l'empêchait de l'entendre. Après quelques minutes, Jordan réussit à le mettre au lit et s'apprêtait à quitter la chambre. « Bonne nuit Jordan... » murmura Gabriel, endormi.

Jordan ne put s'empêcher de sourire et quitta la chambre en éteignant la lumière pour aller se coucher. « Bonne nuit, Gabriel... » chuchota-t-il inaudiblement.

Le lendemain, une bonne odeur de café tira Jordan du sommeil. Il se dirigea vers la cuisine où Gabriel préparait le petit-déjeuner. « Qu'est-ce que tu fais, on doit partir. » demanda Jordan, d'un ton sec. « Bonjour Jordan, tu as bien dormi ? » répondit-t-il, faisant semblant de ne pas avoir entendu cette première interaction désagréable. Jordan s'assit en le regardant, sans répondre. « C'est pratique, le frigo et les placards étaient remplis. » s'exclama-t-il. « C'est bizarre, non ? C'est peut être empoisonné. » mit en garde Jordan. « Macron m'a dit que c'était sans danger. » Jordan le dévisagea. « Macron !? Tu rigoles ou quoi ? T'es malade de l'appeler, comment est-ce qu'il réagirait s'il savait  à conclure l'échange ? » demanda Jordan, enragé. « Je pense qu'il savait depuis le début qu'on allait échouer. C'est lui qui m'a appelé ce matin, pour savoir où on en était. Je suis sûr et certain, qu'il sait déjà que l'échange ne s'est pas fait. Donc, soit il essaie de nous couler depuis le début, soit il sait et il ne va donc pas nous pénaliser. De toute façon... il n'a pas donné de deadline donc... » expliqua Gabriel.

Jordan était impressionné par la déduction du jeune homme. « Bon... alors j'ai faim. » répliqua-t-il, neutre. Gabriel luuii tendit une tasse de café. Il retourna dans sa chambre pour récupérer le colis et s'installa à sa place. Gabriel monta dans la voiture à son tour. « Tu ne veux pas que je conduise ? » lança-t-il. Jordan hésita un instant avant de négocier « D'accord, mais on échange dans une heure. ».il Gabriel acquiesça, un peu frustré et prit place dans la voiture, tandis que Jordan s'assit du côté passager, le colis sur ses genoux.

« Attends. » exigea Gabriel. « On a pas tous les éléments en tête, je pense qu'il faut qu'on sache ce qu'il y a dans ces caisses avant de partir. Au cas où. » « Hors de question, ils nous ont dit de ne pas les ouvrir sauf si on nous le demande. Tu veux vraiment perdre la confiance du Président ? » avertit Jordan, piqué au vif. « Au vu de la situation dans laquelle on va se trouver, je pense sincèrement qu'il vaut mieux pour nous qu'on sache. » répliqua Gabriel en ouvrant le coffre. Il prit les clés pour déverrouiller l'une des deux grosses caisses. « Mon dieu... Et dire qu'il y en a deux. » constata-t-il. Jordan, qui, l'observait à travers le rétro, était en réalité aussi curieux que lui a l'idée de découvrir ce que ces boîtes renfermaient. Ne pouvant s'en empêcher, il le rejoignit et réalisa que les valises comportaient une immense somme d'argent liquide.

« Je n'ai jamais vu autant de billets de toute ma vie. » souffla Jordan, estomaqué. Il regarda Gabriel intensément, imaginant pendant une seconde, ce qu'ils pourraient faire avec autant d'argent. Ils pourraient s'enfuir, loin de tout, là où ils seraient autorisés à s'aimer librement. Mais il réprima aussitôt cette idée, ne pouvant s'autoriser à croire à un tel destin au vu des actions de Gabriel. Ce dernier referma la caisse et ils s'installèrent tous deux dans la voiture sans dire un mot.

Gabriel démarra et se mit à rouler. « Tu penses qu'il y a combien dans ces caisses, toi ? » interrogea-t-il, finalement. « Je ne sais pas, il doit y avoir presque 1 million. » répondit Jordan. «  Tu veux rire ? Si les deux sont pleines, il y a au moins 6 millions là-dedans. » asséna Gabriel, un sourire de satisfaction lui montant aux lèvres. Jordan le regarda interdit. Il réalisait soudain à quel point ils étaient en danger.

Alors qu'il regardait pensivement la route, cherchant une façon de se débarrasser de cette affaire, la sonnerie de son téléphone retentit. Un bref pressentiment le saisit lorsqu'il vit le numéro masqué apparaître mais il décrocha malgré tout. Une voix d'homme s'adressa à lui.

« La tua auto è seguita. Se vuoi uscirne, devi seguire le mie istruzioni. » Jordan se pétrifia, abasourdi. Gabriel le remarqua et l'interpella. « Qu'est-ce qu'il y a ? ».

« Gabriel, on est suivis. »

Un point partout (Attal x Bardella)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant