Un point partout (Attal x Bardella)

L. Déchirure

Un enfant courait entre les jambes d'adultes beaucoup trop grands pour qu'il puisse même discerner leurs visages. L'adrénaline le parcourait, il imaginait déjà ce qu'il allait faire après avoir reçu l'argent. Le gentil monsieur de tout à l'heure, lui avait expliqué précisément ce qu'il devait faire. Il avait précisé que c'était un secret entre eux. Je dois retrouver une carte de musée dans le sac avec l'image de poisson bleu et je pourrai ensuite recevoir vingt euros. Sa mère qui travaillait en cuisine, ne l'avait pas vu courir hors de son champ de vision, débordée par la réception.

Du haut de ses huit années de vie, Chahid ne pouvait retenir un sourire de fierté. On lui accordait enfin une vraie tâche importante, beaucoup plus intéressante que sortir pour acheter du pain. L'homme lui avait expliqué qu'il devait être très discret et qu'il n'aurait rien s'il se faisait remarquer. Chihad attendait le bon moment pour saisir sa chance. Il lui suffisait de se glisser sous la grande nappe blanche. Personne ne le remarquerait. Il s'accroupit et se jeta sous la table, son cœur battant à tout rompre. Il rampa discrètement jusqu'au sac et l'ouvrit. Les grandes personnes parlent tellement qu'elles ne se rendent même pas compte de ce qui les entoure. Il ouvrit le sac et se dépêcha de trouver la carte sans faire le moindre bruit. Il fouillait, la peur au ventre qu'il n'arrive pas à la dénicher. Il leva la tête et aperçut la carte accrochée à la taille de l'homme assis. Seul un misérable mousqueton la retenait. Trop facile. Il tendit sa main et décrocha délicatement la carte. Il tremblait de tout son petit corps. La tâche n'était pas si simple car l'homme gesticulait en parlant fort, heureusement il était beaucoup trop occupé pour le remarquer. Son coeur rata un battement quand la carte se détacha finalement de sa boucle. J'ai réussi. Il s'écarta de la table discrètement, attendant le bon moment pour sortir.

Il rangea la carte dans sa poche et sortit de sous la table, profitant du passage d'une grande dame pour se frayer un chemin hors de la salle. Il regarda autour de lui, inquiet. Personne ne m'a vu. Il chercha le point de rendez-vous que lui avait donné le monsieur de tout à l'heure et le rejoignit. Il ne remarqua pas qu'une ombre le suivait depuis tout à l'heure, croissant à chacun de ses pas. Isolé de tous, Chahid se dirigea vers l'endroit où le monsieur devait arriver. Il entendit une sorte de clic et se retourna avec un visage d'horreur.

Gabriel se dépêchait de rejoindre le point de rendez-vous qu'il avait donné à l'enfant. Jordan le suivait, silencieux, incapable de dégoter le moindre supplément d'informations sur ce qu'avait fait Gabriel. En arrivant, la bouche de Jordan s'entrouvrit. Un enfant pleurait en boule dans le coin de la pièce, un homme le menaçant avec un pistolet. « L'important c'est de sauver la carte, quoi qu'il en coûte » chuchota Gabriel à Jordan, qui n'eut pas le temps de s'indigner, l'homme pointant instantanément son arme sur eux en les voyant arriver.

Ni Jordan, ni Gabriel ne bougèrent d'un millimètre. L'enfant fixait Gabriel, mais celui-ci défiait l'homme du regard. Jordan observait l'enfant terrorisé avec un regard compatissant, comme pour lui souffler que tout irait bien maintenant qu'ils étaient là. "Il n'a pas pris longtemps avant de me cracher que vous étiez de mèche." dit l'homme en se rapprochant d'eux. "Laissez-le en dehors de tout ça, il n'a rien à voir avec cette affaire." lui répondit calmement Jordan, cherchant à protéger l'enfant en priorité. "Qu'est-ce que vous nous voulez ?" demanda Gabriel d'un ton agressif. "La carte." répondit l'homme en serrant les dents. Jordan réfléchit, cherchant à comprendre ce qui allait se passer s'ils refusaient le deal. "C'est bon, je vais vous donner la carte." souffla Gabriel en s'approchant de l'enfant, ignorant complètement la menace de l'homme. Jordan fronça légèrement les sourcils. Gabriel s'accroupit à côté de l'enfant en prenant un sourire étrange qui effraya Chahid qui lui tendit la carte. Gabriel se leva et se mit à côté de Jordan. Ce dernier le regardait du coin de l'œil. Gabriel était devenu parfaitement imprévisible, presque dangereux.