Gabriel était attendu à l'Elysée ce matin-là par Macron, qui l'avait fait venir en urgence pour un motif indéterminé. Malgré les difficultés qu'il avait à se lever ces derniers temps, il arriva à l'heure, curieux de savoir ce que le Président pouvait bien lui vouloir.
Celui-ci prit tout de suite la parole en le voyant arriver : « Bonjour mon cher Gabriel. Je suis heureux que tu aies pu te libérer aussi facilement. Je voulais te voir concernant une mission que tu vas avoir à réaliser cet après-midi. Un organisateur est tombé malade et c'est pourquoi on voudrait t'envoyer à sa place. Il s'agirait d'animer l'ouverture d'un parc animalier d'oiseaux en Corse. » Gabriel était bouche-bée, révolté qu'on ait pu penser à lui pour accomplir une tâche aussi ridicule. "L'ouverture d'un parc animalier en Corse ?" répéta-t-il, incrédule. Il avait espéré une nouvelle fois récupérer un poste plus valorisé au sein du gouvernement, et la désillusion n'en était que plus grande. "Oui, c'est pour revaloriser les espèces aviaires en danger, c'est une tâche de première importance faite pour quelqu'un comme toi. Je suis sûre que ça améliora ton image, qui s'est un peu dégradée depuis ta destitution."
Gabriel regardait dans le vide, incapable de réaliser complètement l'aberration de cette proposition. Il se sentait déjà épuisé en imaginant le bruit et l'agitation qu'il y aurait là-bas. "Mais... vous avez dit cet après-midi, donc ça veut dire que..." réalisa-t-il soudain. "Oui, votre avion est dans deux heures, j'ai déjà contacté un de vos proches qui viendra avec vous pour vous accompagner." Gabriel était donc dans l'impossibilité de décliner. Avec un avion décollant dans 2h, il avait à peine le temps de faire sa valise. Il se précipita chez lui et enfourna quelques chemises et pantalons dans un sac avant de quitter précipitamment son appartement. Il avait certainement oublié un tas de choses, mais il n'avait pas le temps de vérifier.
Son chauffeur le conduit à l'aéroport en urgence. Là-bas, il reconnut avec surprise un visage familier. "Antoine! Je ne pensais pas que Macron penserait à toi pour m'accompagner à cet évènement." Il grimaça en évoquant la tâche pénible qu'il allait devoir accomplir. Antoine le remarqua immédiatement et tenta de lui rendre le sourire "Ouais, c'est vraiment un enfoiré de t'infliger ça. Mais écoute, quand ce sera fini on en rira!" affirma-t-il avec une ironie qui fit du bien à Gabriel.
Ils s'installèrent côte à côte dans l'avion et Antoine leur commanda deux sandwichs, avant de se mettre à discuter. "Mais donc... tu vas mieux ? On m'a dit que tu avais été gravement malade." demanda-t-il avec délicatesse. "Non, j'ai juste eu un accident c'est tout mais je suis déjà remis comme tu peux le voir." répondit amèrement Gabriel. "Et avec Bardella, ça donne quoi depuis la dernière fois ?" interrogea son ami, toujours méfiant à son égard. "Je ne sais pas trop. C'est compliqué." lui répondit Gabriel, avec un regard douloureux. L'évocation de Jordan le plongeait dans un état de trouble intense. Il se remémorait sa crise de la veille avec lassitude. Depuis combien de temps ne l'avait-il pas revu? Leur relation n'était plus constituée que d'échanges de SMS formels.
"Tu sais Gabriel, je pense vraiment que tu devrais couper les ponts avec lui. Il te fait du mal et clairement, il ne va pas changer pour toi. Ses décisions sont atroces et menaçent nos droits." affirma Antoine d'un ton paternaliste. Gabriel prit un temps pour réfléchir. Il avait toujours évité de regarder le bilan des décisions que Jordan avait prises depuis sa nomination. Il savait que ce serait probablement l'élément de trop qui le ferait craquer. "De toute manière, je pense que ça va bientôt se terminer. Il ne me parle même plus. Il ne respecte pas ses promesses, comme d'habitude." admit Gabriel, défaitiste.
Ils arrivèrent vers 14h en Corse, où un soleil ardent les attendait. Ils passèrent par leur hôtel avant d'aller à la cérémonie où il s'habillèrent plus légèrement, comme le requérait la cérémonie axée sur la nature.
La cérémonie fut aussi grotesque et pénible que ce à quoi il s'attendait. Après avoir récité un long discours écrit à la va-vite, il fut contraint d'échanger des poignées de mains solennelles avec des fonctionnaires démotivés. La fatigue et l'ennui se lisaient sur le visage des spectateurs qui avaient payé pour venir. Ce parc, moins grand que ce qu'on lui avait annoncé, n'avait aucun charme. Mais la présence d'Antoine à ses côtés parvenait à égayer autant qu'il était possible cette horrible inauguration. Sa déchéance lui semblait plus supportable lorsqu'elle était prise avec la légèreté dont il faisait toujours preuve.
Après le désastre de l'après-midi, Gabriel devait également se rendre à un gala d'inauguration pour compléter l'ouverture du parc. « Bois, ça fera passer le temps plus vite », l'incita Antoine en lui tendant une bière. Gabriel la saisit et se laissa peu à peu happer par la fête. En enchaînant les verres, il en venait presque à trouver l'occasion agréable. La chaleur, l'alcool et la foule lui faisaient tourner la tête. Antoine lui proposa de sortir un instant prendre l'air. La cérémonie se tenait dans un petit château au Sud de la Corse. Situé en hauteur, il leur donnait, depuis le jardin, vue sur une mer d'étoiles reflétée dans l'eau.
« Je veux me baigner. » déclara Gabriel. Antoine se retourna vers lui d'un air amusé. « Ça ne te ressemble pas de dire ça. » « Mais si, regarde comme c'est beau, j'ai envie d'en profiter. » insista Gabriel, éméché. Il récupéra une bouteille de vin restante sur le buffet et traina Antoine avec lui pour se rendre sur la plage.
Ils se déshabillèrent dans la nuit, avant de se jeter à l'eau. L'ivresse lui faisait perdre l'équilibre, il n'arrivait plus à marcher droit et manqua de tomber dans l'eau. Inquiet, Antoine se précipita vers lui afin d'empêcher Gabriel de chuter. Il s'arrêta avant de regarder le vide intensément, les larmes aux yeux.
"Tu sais, je m'en fous de Jordan. Le rencontrer c'est la pire chose qui me soit arrivée. Je l'ai attendu toutes les nuits pendant des semaines et il n'est jamais venu. Il m'a rendu fou. J'ai tout abandonné, je l'ai laissé prendre ma place sans me débattre parce que je l'aimais, j'ai fini à l'hôpital parce que je me ruinais la santé pour le voir, Macron m'a abandonné à son profit. Et tout ça pour rien. Lui il à tout gagné au change. Et moi, j'ai gâché ma vie, il ne me reste plus rien à vivre." avoua Gabriel, désespéré. Il but une gorgée de vin. "Tu peux me faire oublier, juste pour ce soir ?" demanda Gabriel, sans même vraiment comprendre où il voulait en venir. Antoine le dévisagea, dans l'incompréhension. "Embrasse-moi." l'implora Gabriel. "Juste le temps d'effacer le vide." Antoine approcha ses lèvres mais se retint au dernier moment. "Tu es sûr que c'est ce que tu veux?" lui demanda-t-il, inquiet. Gabriel soupira. « Je n'ai plus rien à perdre. »
Confus, Antoine le regarda une seconde avant de l'embrasser. Gabriel cherchait à faire cesser sa souffrance mais Antoine ne lui procurait aucun sentiment particulier. Dans son étreinte, il cherchait à se prouver à lui-même qu'il était capable de passer à autre chose, que Jordan ne comptait plus pour lui.
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Un point partout (Attal x Bardella)
FanfictionA seulement 26 ans, Jordan Bardella est le président du premier parti d'extrême droite français et prédestiné à un grand avenir. Mais il doit sans cesse se confronter à un autre prodige de la politique : le jeune Premier ministre Gabriel Attal, qui...