XLIV. Crash

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Jordan fut réveillé par un doux courant d'air. Il s'étala dans le lit, recherchant le contact de son bien-aimé, mais il ne trouva qu'un coussin imprégné par l'odeur florale de ses cheveux qui le faisait tant sourire. Il l'appela doucement, toujours somnolent et entreprit de se lever pour le chercher dans la maison. Il était assis à une table, concentré sur son ordinateur. Jordan s'approcha de lui doucement et mit ses bras autour de lui pour regarder ce qu'il était en train de faire. Gabriel le remarqua et se retourna pour l'embrasser, remplissant Jordan de papillons.

"Bien dormi ?" demanda Gabriel tout en tenant une de ses mains. Jordan acquiesça en l'embrassant dans son cou. Il lui demanda ce qu'il était en train de faire tout en s'approchant pour regarder clairement son écran. C'était une page avec des recensements d'adresse. "Je cherche le hangar." expliqua Gabriel, concentré. "Quel hangar ?" interrogea Jordan en prenant une chaise pour s'asseoir à côté de lui.

"Celui où se trouve le tableau." lui répondit-t-il. Jordan écarquilla les yeux. "Tu sais où il est ?" s'écria-t-il, surpris. "Pas vraiment non. Mais j'ai une piste. Et c'est tout ce qu'on a." répondit Gabriel, déterminé. Jordan soupira. L'homme avait raison, il fallait vraiment être dans le déni pour imaginer pouvoir mettre la main sur ce tableau. "Tu as pensé à la possibilité qu'on ne le retrouve jamais ?" demanda Jordan, se reculant sur son dossier. "Non. Ce n'est pas une option envisageable." rétorqua froidement Gabriel. Jordan l'observa un long moment avant de se diriger dans la cuisine pour prendre un café. "J'ai trouvé !" hurla Gabriel depuis le salon. Jordan se précipita pour voir, n'y croyant pas. "C'est là, le hangar secret de Dimitri Vladlov. Il utilisait un faux nom depuis le départ mais grâce aux données du gouvernement j'ai réussi à le retrouver. Et de toute façon, il n'y a pas 36 000 hangars perdus en Sibérie, c'était encore plus facile que ce que je pensais." expliqua-t-il, fier de lui. "Et donc quoi maintenant ?" questionna Jordan, sachant exactement où Gabriel voulait en venir. "On va y aller et récupérer le tableau, tout simplement." expliqua Gabriel en se levant pour préparer ses affaires. "D'ailleurs j'ai appelé Léonardo ce matin et il m'a donné quelques renseignements supplémentaires." cria Gabriel depuis la chambre.

Jordan le rejoignit pour finir de préparer ses affaires. Ils sortirent rapidement pour se mettre en route. Jordan prit le volant. Gabriel s'assit à côté de lui pianotant sur son ordinateur pour obtenir plus de détails. L'adresse était à seulement une heure. "Léonardo m'a dit que le hangar était hyper sécurisé. Il y a plusieurs gardes de tous les côtés." annonça Gabriel. Jordan haussa les sourcils, incapable de croire qu'ils pouvaient y accéder. "On ne va jamais y arriver." déclara Jordan, dégoûté. Gabriel soupira un grand coup à cause de la démoralisation dont Jordan faisait trop souvent preuve. "En même temps, tu n'y mets jamais aucune volonté. Prêt à abandonner depuis le début. C'est étonnant que tu sois arrivé jusqu'au poste de Premier Ministre vu ta mentalité..." jeta Gabriel sèchement. Jordan se vexa immédiatement. "Retire tout de suite ce que tu viens de dire." ordonna Jordan, blessé. "Rien ne t'empêche de rétrograder en porte-parole du gouvernement si ça t'enchantes. C'est sûr que ça demande moins d'efforts... Mais personnellement je préfère encore crever que reprendre mon boulot de merde à être le putain d'animateur de l'Elysée." asséna Gabriel crûment. L'expression de Jordan se ferma, touché en plein dans son égo par ses accusations. Le silence régna pendant une quinzaine de minutes mais il ruminait ce que Gabriel lui avait dit, cherchant quelque chose à lui rétorquer pour se défendre.

"Alors vas-y, explique moi comment tu comptes t'y prendre pour rentrer dans le hangar vu que tu sembles tout savoir." reprocha Jordan. "Il faut que tu te fonces en plein dedans." annonça Gabriel. Jordan le dévisagea. "Mais ça va pas ? Hors de question, tu es devenu fou ?" s'exclama-t-il, outré. "C'est le plus logique, il faut attirer l'attention des gardes, et quoi de mieux qu'un accident pour les faire réagir et surtout se déplacer ? Sinon, trouve une meilleure idée." argumenta Gabriel neutre. Ils étaient presque arrivés au lieu. "Par exemple, je pourrai aller leur parler et faire diversion pendant que tu rentres dans le hangar." déclara Jordan, d'un ton hautain. "Ah oui ? Tu crois que je n'y ai pas pensé ? Bonne chance pour réussir à les convaincre de venir te parler en ne sachant absolument aucun mot de russe. Et je ne parle même pas de tenir une conversation retenant leur attention." poursuivit Gabriel, fixé sur son écran. Il avait un point et cela rendait fou Jordan.

"Sauf si c'est parce que tu n'es pas capable de le faire ?" le provoqua Gabriel. "Ça n'a rien à voir, c'est juste débile de ruiner la voiture pour si peu." déclara Jordan, frustré. Ils se rapprochaient dangereusement du hangar qui était assez isolé, juste à côté d'un village. "Nous sommes là parce qu'on veut aller au village quelques kilomètres plus loin. Je vais m'isoler pour passer un appel à une dépanneuse et toi tu vas les occuper comme tu peux en faisant semblant d'avoir mal tout en balbutiant des choses en anglais. Le but c'est que tu me laisses 10 minutes pour aller chercher le tableau." instruit Gabriel tout en rangeant son ordinateur.

Jordan se mit à freiner instinctivement. Tout son corps lui hurlait de s'arrêter. Même s'il détestait la manière dont Gabriel avait abordé le sujet avec lui, il lui faisait confiance. C'était la seule chose qui l'autorisait à réaliser un tel acte. "Je te fais confiance, si ça tourne mal, je te tue." confia Jordan, vaincu. Gabriel se mit à sourire, content que son plan ait marché et l'embrassa sur la joue.

Jordan maintenait sa vitesse légèrement en dessous de 45 kilomètres, incapable d'aller plus vite, certain qu'ils n'allaient pas s'en sortir vivants. 50 mètres. Le jour où il a rencontré Gabriel. 40 mètres. La première fois qu'ils s'étaient embrassés. 30 mètres. Toutes les fois où ils avaient dansé ensemble. 20 mètres. Il voulait rester avec lui pour toujours. 10 mètres. Toute leur relation. Droit dans le mur.

Un énorme fracas se fit entendre. La voiture s'écrasa contre le mur du hangar. Jordan, assommé par le choc, essaya de se reprendre comme il pouvait. "Gabriel..?" souffla Jordan en le cherchant de la main pour s'assurer qu'il allait bien. Mais Gabriel était déjà debout, exécutant son plan. Plusieurs hommes se précipitèrent à sa fenêtre. Jordan feignit d'être inconscient pendant un moment, économisant un maximum de temps. Les gardes le sortirent de la voiture. L'avantage de Jordan était qu'il mesurait plus d'un mètre quatre-vingt-dix, obligeant plusieurs hommes à l'aider à sortir.

De son côté Gabriel s'était déjà écarté après avoir prétendu appeler une dépanneuse. Il se dirigeait vers le hangar, cherchant un moyen d'y pénétrer autrement que par la porte. Il cherchait une bouche d'aération. Après avoir tourné discrètement autour du bâtiment, il trouva un couloir de ventilation juste assez large pour qu'il puisse s'y introduire. Heureusement, les gardes tournaient uniquement autour du hangar et sinon Jordan accaparait toute leur attention.

Jordan avait un mal fou à retenir les gardes. Il faisait semblant d'avoir mal à la jambe depuis déjà plusieurs minutes mais il n'avait aucune idée de combien de temps Gabriel allait prendre. Quatre gardes étaient autour de lui, essayant de lui parler, mais ils avaient un très mauvais anglais. Jordan essayait d'expliquer sa douleur pour leur faire perdre du temps à essayer de le comprendre, s'accrochant à eux pour les obliger à rester. Un homme inspecta la voiture précautionneusement pour s'assurer que cet accident était bel et bien accidentel, mais Gabriel avait prit le soin de ne rien laisser derrière lui, certain que les personnes sur place prendraient le temps d'examiner la voiture.

Gabriel finit par rentrer dans la pièce par un conduit d'aération. Il regarda autour de lui. Le hangar était vide. Complètement vide.

Un point partout (Attal x Bardella)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant