Gabriel ouvrit les yeux avec difficulté. Un mal de tête aigu lui vrillait les tempes. Il observa la pièce dans laquelle il se trouvait. Un plafond blanc lui faisait face, et il réalisa qu'une sonde perforait son bras.
Quelques coups retentirent et une infirmière passa le seuil de la porte. « Bonjour Monsieur Attal. Comment vous sentez-vous? » s'enquit-elle en vérifiant les données affichées par son électrocardiogramme. Il cherchait à comprendre ce qui lui était arrivé mais rien ne lui revenait. « Qu'est-ce-que je fais ici? » interrogea-t-il d'une voix faible. L'infirmière s'approcha de lui pour lui expliquer : « On vous a transféré dans cette clinique en urgence hier soir. Vous avez fait un arrêt cardiaque après votre discours. Heureusement ce n'était pas trop grave mais il va falloir que vous preniez du repos. ». Il fronça les sourcils, incrédule. « Il faut que je sorte de là aujourd'hui, j'ai des affaires de première importance à régler. » affirma-t-il en tentant de se relever. Mais ses maux de tête reprirent de plus belle et il retomba sur le lit. L'infirmière lui adressa un regard compatissant : « Il va falloir attendre quelques jours avant de reprendre le travail » lui glissa-t-elle d'un ton de pitié qui le fit bouillir. « Non, vous ne comprenez-pas... » chercha-t-il à se justifier mais son épuisement l'empêcha de poursuivre.
« Je sais que c'est difficile pour vous, mais on va tout mettre en oeuvre pour que vous soyez sur pied le plus rapidement possible. Mais pour ça, il faut aussi que vous y mettiez du vôtre. » lui répondit-elle avec une sympathie qu'il perçut comme de la condescendance.
Malgré ses demandes répétées, les différents médecins qui passèrent le voir lui refusèrent catégoriquement de quitter sa chambre. Il finit par s'abandonner à la fatigue et retomba dans un sommeil profond qui lui évitait de se laisser envahir par l'angoisse.
Vers la fin de l'après-midi, il fut contraint de se réveiller pour rencontrer un énième docteur. Un homme grand et mince, aux cheveux blancs mais à l'âge indiscernable lui faisait face.
"Je me présente, Ludwig Von Lugbeid, mais vous pouvez m'appelez Docteur Lugbeid. Je suis un psychiatre de renom dans le monde des personnalités publiques." Gabriel le dévisagea avec méfiance. "Je suis ici, car le Président m'a prévenu que vous pourriez avoir besoin de mon aide." s'introduisit-t-il. "Mais qu'est qui vous fait dire que j'ai besoin d'aide ?" rétorqua Gabriel, sur la défensive. "Je pense que dans tous les cas, vous avez besoin de quelqu'un à qui parler." Gabriel se tut, incapable de le contredire. Il avait touché juste, comprenant son irrépressible envie de se confier. Le docteur attrapa une chaise pour s'asseoir à côté de lui. "Pourquoi êtes-vous autant sur la défensive ? Vous êtes méfiant en général ?" interrogea-t-il, en lui lançant un regard vif. "Non, au contraire, j'ai toujours été quelqu'un de sociable, c'est juste que ces derniers temps, c'est plutôt à mes dépens." "Vous pensez que souvent les gens abusent de votre gentillesse ?" reprit-t-il, inquisiteur. "Parfois oui. Surtout que je me donne beaucoup de mal pour répondre aux attentes des autres." soupira Gabriel, en oubliant ses réticences face au docteur. "Qu'est-ce qu'ils attendent de vous, à votre avis ?" Gabriel prit un instant pour penser. "Que je pardonne leurs erreurs, même s'ils ne s'excusent jamais et ne me prouvent jamais vraiment qu'ils tiennent à moi." laissa-t-il échapper douloureusement. Cela faisait plusieurs mois qu'il n'avait pas pris pleinement le temps de réfléchir à ses propres sentiments et les exprimer à voix haute le bouleversait. "Est-ce que vous pensez qu'ils méritent votre pardon ?"
Gabriel marqua une pause. Il n'avait jamais vu les choses sous cet angle et cette perspective l'emplit de tristesse. "Mais je ne veux pas les perdre" avoua-t-il avec fébrilité en baissant les yeux. Le docteur le regarda intensément, détaillant les nuances de son expression blessée, et se leva. "Je pense que vous avez été assez éprouvé pour aujourd'hui. Je repasserai tous les jours cette semaine et ensuite vous pourrez choisir de poursuivre nos rendez-vous comme il vous convient. Bonne journée Monsieur Attal."
Le jour de sa nomination, Jordan se rendit à Matignon afin de s'installer dans son nouveau bureau. Il était impatient de revoir Gabriel afin de pouvoir s'excuser de son comportement des jours précédents et lui expliquer la stratégie qu'il avait mise en place pour qu'ils puissent rester ensemble, malgré leur situation difficile. Il marchait d'un pas pressé et souriait déjà en imaginant leur rencontre et le soulagement qu'il ressentirait en apprenant qu'il ne l'avait pas trahi de nouveau. Il toqua brièvement avant d'entrer brusquement dans le bureau, ne pouvant retenir son impatience.
Il était vide, rempli de cartons. Jordan l'appela. Aucune réponse. Un homme rentra à son tour dans la pièce. Croyant que c'était enfin Gabriel, il se retourna vers lui avec enthousiasme avant de se ressaisir aussitôt en réalisant qu'il s'agissait seulement d'un employé du ministère. "Bonjour, vous savez où est le Premier... enfin Monsieur Attal ?" le questionna-t-il, frustré de son absence. L'employé haussa un sourcil avant et lui répondit d'un ton surpris. "Vous n'êtes pas au courant ? Il est à l'hôpital, depuis son arrêt cardiaque." Jordan se pétrifia, incapable de répondre quelque chose. Comment l'information avait-elle pu lui échapper? On le lui avait forcément caché délibérément. Une colère sourde monta en lui.
A cet instant, Marine entra elle aussi dans la pièce. Un large sourire au visage, elle plaisantait avec une secrétaire de son ton enjoué habituel. En l'apercevant, elle se précipita pour le prendre dans ses bras, incapable de percevoir la rage qui l'habitait. « Jordan te voilà! Je t'ai cherché partout! Alors, tu te fais à ton nouveau bureau? » plaisanta-t-elle, exaltée. Froidement, Jordan s'écarta et demanda aux employés de se retirer. Restés seul, il se tourna vers elle avec emportement, luttant pour se maîtriser. Il devait à tout prix garder son calme. Sa stratégie en dépendait.
« Je viens d'apprendre que l'ancien Premier ministre était hospitalisé. Je suis surpris que personne n'ait jugé pertinent de me prévenir. » releva-t-il calmement. « Ah bon, tu n'as pas été mis au courant ? Ça doit être une erreur. » argua-t-elle, feignant l'ignorance. Elle n'était pas très bonne comédienne. « Enfin, de toute manière, tu m'as bien assuré que cet homme ne te détournerait plus de tes fonctions, n'est-ce-pas? » reprit-elle en lui lançant un regard pénétrant, cherchant à déceler toute trace de déviance chez lui. Le réalisant, il adopta aussitôt la posture détachée qu'elle l'encourageait toujours à prendre. « Bien entendu. J'espère seulement que ça ne posera pas de problèmes pour mon investiture. ».
Il devait feindre un désintérêt total pour le jeune homme. C'était une résolution qu'il avait prise lorsqu'il avait compris qu'il serait impossible pour eux d'assumer une relation au grand jour. Mais il acceptait maintenant de prétendre qu'il était quelqu'un d'autre devant tous pour sauver sa relation avec Gabriel. La priorité immédiate restait pour autant de trouver l'adresse de la clinique dans laquelle il était soigné.
Il se dégagea rapidement de la présence de Marine et alla trouver le Président. Il était, malgré leurs divergences politiques, admiratif devant le parcours et la prestance de cet homme mystérieux et toujours imprévisible.
"Bonjour, Monsieur le Premier Ministre" le salua-t-il avec un sourire énigmatique. Jordan n'était pas du tout habitué à cette appellation. "Bonjour Monsieur le Président, je m'excuse de vous déranger, mais j'ai besoin d'une information." annonça Jordan, déterminé. "Vous voulez l'adresse de son hôpital n'est-ce pas ?". Pris de court, Jordan ne sut quoi répondre, il n'avait pas réalisé à quel point Macron pouvait lire en lui. "Il n'y a pas de honte à avoir, je sais que ce c'est que d'aimer quelqu'un." Jordan était désemparé mais il devait lui fournir une réponse. "S'il vous plaît, dites-moi où il est." implora-t-il. Macron lui indiqua l'adresse. Aussitôt, Jordan le remercia et se dirigea vers la sortie. Mais Macron l'en empêcha. "Vous êtes Premier Ministre. A partir d'aujourd'hui votre priorité absolue doit être la vie des Français. Je suis désolé, mais vous ne pouvez pas le rejoindre maintenant."
Jordan savait que le Président avait raison. L'urgence n'était pas de voir Gabriel mais de rétablir l'ordre dans un pays que sa nomination avait ébranlé. Il se promit de se rendre à la clinique dès qu'il aurait accompli ses tâches du jour, et se jeta dans le travail à corps perdu.
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Un point partout (Attal x Bardella)
FanfictionA seulement 26 ans, Jordan Bardella est le président du premier parti d'extrême droite français et prédestiné à un grand avenir. Mais il doit sans cesse se confronter à un autre prodige de la politique : le jeune Premier ministre Gabriel Attal, qui...