Souffle la liberté

4.

HajarRegragui, un petit chapitre pour toi !! J'espère que ça te plaira ! Merci pour ton soutien ! <3

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Voilà comment ce soir-là, je me retrouvais devant ma famille, lors du souper, à demander si je pouvais participer. D'abord, ils rirent. Ils ne me prenaient pas aux sérieux ! Comment leur en vouloir, moi non plus parfois, je ne me prenais pas au sérieux... C'est vrai ! Moi, petite grise anthracite insignifiante, j'allais tenter de devenir reine ? Oui, ils avaient le droit de crier à la bonne blague ! Mais je ne me laissais pas démonter pour autant. Je répétais fermement que j'en avais l'intention. Mon père manqua alors de s'étouffer. Il recracha presque sa maigre soupe de poireaux et toussa frénétiquement. Je le regardais avec effroi. Il tapait du poing sur sa cage thoracique tentant de se reprendre. Ses yeux larmoyants semblaient exorbités. Enfin, après plusieurs minutes, il se calma.

- Tu ... tu quoi ?

Je répétais de nouveau mon intention.

- Il n'en est pas question, asséna-t-il en secouant vivement la tête.

J'en restais sans voix. Pourquoi ?

- Mais papa...

- Non, me coupa-t-il. Il n'est pas question que MA fille aille se mêler à ses voraces monstres des castes supérieures ! Qu'elle aille courber l'échine devant le roi et son fils ! Jamais ! De mon vivant Fifi, je jure que je n'accepterais pas une telle chose.

Il agitait son doigts et faisait de grands gestes, scandalisé.

- Pourquoi crois-tu que nous, non, que TU descends dans cette mine ! Pourquoi, hein, cria-t-il. Parce que des gens, CES gens ont décidés que tu ne valais pas autant qu'eux ! Que tu étais une souillon, un paillasson sur lequel ils s'essuient les pieds royalement ! Pour chauffer leur maison, ils donnent la vie de pucerons comme nous ! Alors non ! NON ! Jamais ma fille tu ne te mêleras à ces gens, jamais tu n'imiteras leur mode de vie, jamais tu cracheras semblablement sur les tiens, les mineurs au fond de leur tombeau de charbon ! Jamais tu ne seras l'une des leurs ! Jamais, tu m'entends !

Je restais saisie, les larmes pointant au bord de mes yeux. Jamais je n'avais vu mon père dans un tel état. Jamais. Les yeux grands ouverts, écarquillée, je le fixais. La colère... Cette colère profondément ancrée en lui, je la devinais dans son ironie acerbe. Mais il ne l'avait jamais laissé ainsi le gagner totalement et dévoiler aux grands jours se yeux brillants d'une fureur inconnue. Je retenais inconsciemment ma respiration.

- Mange ta soupe, Fifi, dit-il alors d'une voix qui se voulait plus tendre mais où pointait toujours les vestiges de son emportement passé.

Je baissais les yeux sur ma soupe et tentais de respirer calmement. Une telle fureur cachée sous les traits de premier homme de ma vie me tétanisait. Je portais donc d'une main tremblante ma cuillère jusque ma bouche. Une main se posa sur mon épaule. C'était maman. Elle me couva de son regard réconfortant et m'adressa un doux sourire. Je le lui rendis. Les yeux sombres de ma mère se posèrent alors sur son mari, absorbé dans l'ingurgitation énervé de son repas.

- Tu devrais la laisser faire, Joshua, murmura ma mère.

Mon père releva brusquement la tête et manqua une nouvelle fois avaler de travers la si précieuse pitance.

- Honnêtement, Joshua chéri, expliqua ma mère d'une voix calme, Crois-tu que le roi laissera une grise anthracite entrer au château ? Même la porte des cuisines nous serait fermée au nez. Laisse-là faire ça propre expérience des choses. Il est grand temps qu'elle apprenne par elle même.

Mon père pinça les lèvres mes médita les paroles de ma mère. Et finalement, d'une simple geste brutal de la main, il me donna la permission de faire ce que je voulais. Je souris à ma mère, fine diplomate sachant gérer les humeurs de mon père. Elle me répondit pas une tendre caresse du bout de ses doigts froids sur ma joue.

- Saches que tu n'entreras vraiment pas, chuchota-t-elle. Alors ne te fais pas d'illusion. Ils ne voudront pas de toi, là-bas.

Je hochais la tête alors que mon père exprimait d'un grognement son mécontentement. Je ne le faisais pas pour moi... Mais pour Laïa ! Elle m'avait tant de fois soutenue et même si elle disait que c'était réciproque je savais que c'était simplement un moyen de me déculpabiliser. Je comptais toujours beaucoup (trop) sur elle. Et pour une fois, j'avais la possibilité de lui rendre la pareil ! Pour une fois j'allais pouvoir l'aider ! Les rôles allaient s'inverser. Et je ne la laisserai pas tomber ! Car elle a toujours été là pour moi ! A mon tour d'être là pour elle !