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Mes lèvres furent brutalement arrachées de celles, si douces, d'Ewen. Mon bras était violemment tiré en arrière et il me fallut quelques minutes pour me rendre compte de ce qui venait de se passait... Non ! Je.. J'avais embrassé ... Le prince ! Je piquais un fard monumental, les yeux écarquillés et le souffle court. 

- Sauvons-nous, cria Aimée-Rose en me tirant davantage. 

Mon cœur battait fort dans ma poitrine lorsque mon esprit sembla sortir de sa torpeur effrayée pour entrer brutalement en contact avec la cacophonie extérieure. Mes doigts s'agrippèrent férocement à ceux d'Ewen. 

- Venez, ... Votre Altesse, criais-je, tentant de cacher mon hésitation. 

Il me fixa et secoua la tête. 

- Partez, vous. Sauvez-vous. Aimée-Rose, emmenez-là. 

Quoi ?! Il plaisantait ?! Mademoiselle de la Rochefoucauld me tira violemment vers la porte. Je hurlais : 

- Ewen, que faîtes-vous ? Arrêtez ça ! Je vous en prie ! 

- Un capitaine coule toujours avec son navire, Magnificence. 

Ce fut un coup monumental portée sur ma personne. Couler ? Mes yeux se remplirent de larmes. Non... Non... Pas question ! J'administrais à la blondinette un magistral coup de pieds qui la plia en deux et je rejoignis le prince en courant. Désespérée, je m'agrippais à son costume abîmé, posant ma seconde main sur sa joue... 

- Vous ne pouvez pas..., balbutiais-je, pleurant. 

Je sentis sa main caresser ma joue. 

- Je le dois... 

- Non ! 

J'avais hurlé ce refus brutale qui me venait des tripes. 

- Je suis le capitaine de ce château, je dois... 

Je me redressais et le toisais furieusement. Mais il allait cesser ses âneries, oui ?  

- Je dois mourir avec eux, continua-t-il. Comprenez... 

- Vous avez tort, contrais-je. Totalement tort. Vous n'êtes pas le capitaine de ce château ! Vous êtes le capitaine de tout un pays ! Ehiropa est VOTRE NAVIRE. Alors cessez de vouloir déserter, capitaine ! Notre vaisseau traverse une énorme tempête, un véritable typhon, alors au lieu de vous terrer sur un canot de sauvetage qui s'ébroue, courrez à la barre, guettez l'accalmie et GUIDEZ-NOUS ! 

Je saisis son visage entre mes mains, doucement, contemplant ses yeux bleus, brillants. 

- Demain, le peuple aura besoin de vous, son capitaine. Mort, vous ne pourrez plus les guider... Alors, venez... Venez avec moi... 

Il me serra brusquement dans ses bras, cachant ses larmes dans mes cheveux. 

- Ma reine... Vous êtes mon phare... Je suivrais votre lumière... 

Il pleurait. 

- Sauvez-nous ! 

Je me redressais et essuyais les larmes coulant sur ses joues rougies. Glissant ma main dans la sienne, je lui chuchotais doucement "venez". Il hocha la tête simplement, les yeux emplis de larmes. Impulsive, je lui écrasais les pieds, en souvenir de tout ce que nous avions déjà partagé lui et moi. Il m'adressa un pâle sourire. Courage, Ewen, le suppliais-je mentalement, ne flanchez pas maintenant... Et priez pour qu'il y ait des survivants ! J'agrippais Aimée-Rose au passage et les guidais vaillamment. 

Que faire ? Comment partir ? Où aller ? Je me sentais prise de nausée, au bord de l'évanouissement... L'odeur forte du sang m'emplissait les narines et je n'osais poser les yeux sur le sol, de peur de voir des cadavres connus... Allez, Magnificence... Avance... Encore... Oublie les cris, les pleurs, l'odeur, ta peur... Avance ! 

Souffle la libertéOù les histoires vivent. Découvrez maintenant