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Bonjour, je sais que ça fait très longtemps que je n'ai pas écrit cette histoire mais j'ai brusquement eu envie de la reprendre et d'y mettre un point final. Je vous présente toutes mes excuses. Je ne sais s'il y aura qqn pour lire cette fin après si longtemps, mais de mon côté, j'aurais enfin un goût d'achevé. 

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 Une boule d'angoisse s'était logée au creux de mon estomac depuis trois jours déjà. On allait me couronner... Moi, petite fille de la mine terrifiée, j'allais recevoir sur ma tête la couronne d'Ehiropa. 

Je lissais les pans de ma robe de satin poudré et tentais d'inspirer profondément. Un attelage devait venir me chercher d'une minute à l'autre... Je souris malgré moi, un carrosse comme dans les contes de fée que me racontait maman avant de m'endormir le soir étant enfant. Je n'avais jamais cru qu'un jour, on en dépêcherait un rien que pour moi. Il était vrai que le choix c'était porté sur ce moyen de locomotion simplement parce que les réservoirs de toutes les voitures du pays étaient complètement à sec, mais, moi, je ne pouvais m'empêcher de trouver cela excitant. C'était en fait la seule perspective joyeuse qui me permettait de tenir debout, en ce jour qui s'annonçait si solennel. 

Je soupirais et tentais de contrôler le tremblement de mes mains. Qu'allai-t-il se passer ensuite ? Je me mordis la lèvre inférieure en secouant mes mains vivement. Calme-toi, Magnificence, calme-toi, me morigénais-je mentalement. Il fallait que je paraisse sûre de moi, invincible. 

La porte s'ouvrit derrière moi et je sursautai violemment. Le visage doux d'Ewen s'offrit à ma vue et je lui adressai un pâle sourire. Il s'approcha et me prit les mains. 

- J'ai toujours su que ce jour arriverai, Magnificence, mais j'aurais aimé que cela se fasse dans d'autres circonstances. 

Je hochai la tête. Moi, j'aurais voulu que ce jour n'arrive jamais... Je ne voulais pas être reine, je voulais rentrer chez moi, cultiver mon jardin, sourire à ma mère, embrasser mon père, chatouiller Damien, rire avec Travis, enlacer Laïa... Je voulais... Des larmes me montèrent aux yeux. Mon bonheur était à des années de ce grand château en ruine, de cette robe de satin et de soie moussant allègrement autour de moi. Il prit mon visage entre ses mains et déposa un chaste baiser sur mes lèvres. Je fermai les yeux. Je sentis une douce caresse sur ma joue et rouvris les yeux pour les plonger dans les siens. 

- Tu peux toujours renoncer, chuchota-t-il doucement. 

Sa gorge s'était nouée.. Je posais ma main au dessus de la sienne toujours sur ma joue et secouai la tête. Il n'irait pas aux galères, et je le protégerai de toutes mes forces en devenant reine. S'il y a une seule chose que je serais en mesure de faire, c'est le protéger de ma toute nouvelle grandeur royale. Personne ne le toucherait... Je sentis ses bras autour de moi et je me laissais aller tout contre son torse. Ewen... 

La porte s'ouvrit une nouvelle fois mais sur un jeune homme en uniforme de la garde cette fois. Nous rompirent rapidement notre étreinte sous son regard surpris. Il se décala pour me laisser entrevoir ma calèche. Je m'avançais, ma main fermement enlacée à celle d'Ewen. 

- Votre Majesté, pardonnez ma hardiesse et permettez moi de vous conseiller, pour votre propre bien et pour celui de notre belle nation, de laisser cet homme ici, Votre Majesté. Un criminel ne peut décemment se tenir à vos côtés pendant une telle cérémonie. 

Je ne lui adressais même pas un regard et tirais Ewen derrière moi. Il ne dit rien et me suivit. Nous montâmes dans la calèche. Je regardais distraitement le paysage lorsqu'il prit la parole. 

- Je ne crois pas qu'il ait totalement tort, Magnificence, chuchota-t-il. Je ferai mieux de rester dans la calèche pendant la cérémonie. 

Je refusai violemment. Je n'allais certainement pas vivre ça sans lui ! J'avais besoin de lui à mes côtés, de sa force, de son amour. Il me sourit. 

- Si je descends, je ne réussirai qu'à nous faire tuer. Le peuple me hait. Je ne veux pas qu'il te tue parce que je me tiens à tes côtés. Je ne me le pardonnerai jamais, Magnificence. 

Il avait une nouvelle fois poser sa main sur ma joue. Je ne pus m'empêcher d'afficher une moue boudeuse. Je le voulais avec moi. Il me demanda d'être raisonnable. Ce n'était pas facile pour lui de me laisser affronter le peuple seule mais j'avais plus de chance de revenir vivante s'il n'était pas là. Le peuple devait me voir comme sa reine, non comme son ennemie. C'était une question de survie. Je détournais la tête avant d'acquiescer. Je savais qu'il avait raison mais... J'avais peur... Tellement peur... Le peuple grondant, je ne le comprenais plus ! 

Enfin, nous fûmes arrivés. Il serra ma main dans la sienne plongeant ses yeux si bleus au fond des miens. Il me chuchota de lui revenir reine. Je souris. Je n'avais pas d'autre intention. 

Je sautais de la calèche et me réceptionnais habilement sur les pavés. Mon coeur bondit lorsque je vis la foule amassée des deux côtés de l'église. Ils étaient... des milliers ! A peine avait-il vu ne serait-ce qu'un bout de ma robe qu'ils se mirent à hurler mon nom, à crier de joie, et même pour certains à pleurer. Je m'avançais sans pouvoir m'empêcher de regarder partout autour de moi. Des visages inconnus tendus vers moi à perte de vue, une marais humaine plus grosse et plus épaisse que tout ce que j'aurais pu imaginer. Mes mains se mirent à trembler et je déglutis difficilement, accélérant le pas. Je me retenais de courir me réfugier à l'intérieur, mais je devais paraître digne, paraître reine. Alors je ralentis, affichais mon plus grand sourire et poussais le vice jusqu'à adresser un petit signe de la main. Les hurlements s'amplifièrent brutalement. Mon cœur bondit de plus belle alors que je sentais l'odeur du sang, j'entendais les cris d'effroi et le roi, bien droit, demandant en un rugissement qui voulait se venter d'avoir tuer le roi. 

Je serrais les poings de toutes mes forces et au bout de ce qui me parut une éternité, j'atteignis la large porte de fer. Elle était grande ouverte, et enfin, me parvinrent les bribes d'une musique douce. Je m'arrêtai quelques secondes sur le parvis, alors que dans l'église, les heureux élus qui assisteraient à cet instant aux premières loges se tournaient vers moi. Leur visage plein d'une félicité sincère me prirent de surprise. Je tentais un sourire et entrais doucement.

 Devant moi, se tenait le Conseiller Mattéoli, tout sourire, ainsi que le Conseil de Régence Provisoire au grand complet. Je m'agenouillais sagement devant eux et devant la figure tutélaire de notre Dieu, les mains jointes, la tête baissée. Tous les membres de la Régence se placèrent bien droit à mes côtés. Je ne bougeais pas et gardais ma posture pieuse pendant que le grand prêtre du royaume commençait à parler. Au bout de quelques minutes seulement, il me fit me relever, en me prenant la main. Il évoquait la lourde charge que le Seigneur allait déposer entre mes mains, celle de guider mon peuple vers la lumière de Dieu. Il m'embrassa sur le front en psalmodiant et me laissa ensuite faire face à l'église pleine, se reculant doucement. Lorsqu'il revint, il portait une large couronne en or, sertie de milliers de diamants. Il s'avança et je plongeais en une révérence parfaite. Alors que mon coeur battait la chamade, que mes mains devenaient moites, je sentis se déposer sur la tête un poids lourd. J'eus brusquement peur de la faire tomber. Je me redressais précautionneusement sous les hourras et les cris. Mon regard croisa les yeux pétillants de fierté de mon père au premier rang. Il m'adressa un large sourire. Mon petit papa... Il n'avait sans doute jamais imaginer qu'une telle image s'imposerait un jour à lui. Mon coeur se serra alors que je n'avais qu'une envie, courir vers lui et me jeter dans ses bras en lui promettant de rester à jamais sa Fifi. 

Le Conseiller Mattéoli annonça solennellement la reine et les vivats résonnèrent si fort dans l'église que la musique en fut couverte. Je m'avançais, la gorge nouée. Je parvins jusqu'au parvis et les cris de la foule m'y attendant se firent encore plus virulent. Vive la reine, vive la reine Magnificence, entendais-je de partout et nulle part à la fois. Je les saluais d'un signe de la main et là encore, l'allégresse que souleva ce simple geste fit bondir mon coeur violemment. Leurs regards tendus vers moi pleins de larmes et de bonheur me remplissait de joie et d'effroi. 

Soudain, une salve de trompette résonna, et brusquement, tous s'agenouillèrent respectueusement. Une marée humaine de dévotion gisait ainsi à mes pieds. 

Souffle la libertéOù les histoires vivent. Découvrez maintenant