Enroulée dans mes couvertures, je tentais de me reprendre. Les larmes avaient fini par se tarir mais je me sentais toujours mal... J'enfouis ma tête dans les coussins, inspirant profondément leur douce odeur.
La porte s'ouvrit brusquement et je me redressais. Un coussin vola directement vers mon importun visiteur qui le rattrapa habilement.
- Tu aurais dû me le dire, reprochais-je d'une voix boudeuse où l'on percevait quelques résidus de ma crise de larmes.
- Pardonne-moi, dit-il simplement.
Il vint s'asseoir sur le bord de mon lit et tourna la preuve de mon crime dans tous les sens avant de me la jeter également. Je rattrapais l'oreiller tout en le toisant.
- J'ai essayé de te le dire, je te le jure mais... Comment pouvais-je te dire cela ?
Je lui lançais de nouveau le coussin qui lui atterrit cette fois dans la figure. Il retomba ensuite mollement entre nous deux.
- Tu aurais dû quand même, reprochais-je de nouveau, alors que je ne pouvais m'empêcher de m'attendrir devant la figure de mon interlocuteur, ébouriffée par l'oreiller.
Il passa une main dans ses cheveux, mal à l'aise et s'excusa encore. Je ramenais mes genoux contre ma poitrine et les entourais fermement de mes bras. Nous passâmes plusieurs minutes à nous fixer ainsi, sans un mot.
Mes pensées tournaient en boucle dans mon esprit. Qu'allaient dire mes parents en me voyant ? Me reconnaîtraient-ils là où, moi-même, je n'y parvenais plus ? Et Damien ? Et Travis ? Qu'allaient-ils tous penser ? J'étais passée dans le camps adverse, celui du gaspillage, du paraître, de la méchanceté, et de l'avarice, celui où l'homme n'avait plus de valeur... Mais également celui du savoir, du raffinement, de l'élégance...Celui d'Ewen. Et cela dans un moment où le clivage entre les castes s'agrandissait, se fortifiait... Où en étais-je dans cette transformation ? Qui étais-je devenue ? Maintenant, étais-je une grise anthracite ou une candidate du Choix donc un pupille de la nation ? Mais qui es-tu, Magnificence, avais-je envie de hurler. Qui es-tu ?
J'enfouis de nouveau mon visage dans un coussin. Mes identités allaient bientôt entrer en collision. Grise Anthracite, Pupille de la nation... L'heure du choix approchait... Et je me sentais totalement perdue, brusquement. Comme si le simple fait de rentrer chez moi allait sonner l'heure véritable de cette décision. Et c'était sûrement le cas.
S'ajouter à cette crise identitaire aussi soudaine que décisive, une crise émotionnelle grave. Je me sentais sciée en deux de l'intérieur. Complètement. D'un côté, la Fifi qui pleurait Laïa sans vouloir s'arrêter, et de l'autre, Magnificence, la jeune femme en devenir qui souhaitait oublier.... Mais où en étais-je ?
Je me claquais la tête contre le tissu fin et odorant. Cette crise intérieure se jouait devant un prince complètement coi. Je devais pisser la détresse comme on pisserait le sang après un combat perdu. Et le mien semblait perdu d'avance...
- Tu n'es pas contente de retrouver tes racines, ta famille ? Il y aura ton petit frère, Damien.
Ah bon ! Je savais pas ! Je relevais la tête, un sourcil dressé, illustrant mes pensées. Pour dire cela, autant qu'il se taise. Je replongeais dans mon coussin salvateur, ignorant sa question.
- Je ne comprends pas, Magnificence, chuchota-t-il. C'est le film qui te met dans cet état là ? Parce qu'il faut que tu saches que ces images n'étaient pas réelles. C'était un montage fait par mon père spécialement pour toi. C'est un avertissement.
Je me redressais brusquement. Un avertissement ? Il manquait plus que ça !
- Un montage pour m'avertir ?

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Souffle la liberté
FanfictionMoi, je vais tenter de devenir reine. Moi, fille inconnue du royaume d'Ehiropa je vais participer au Choix. Le peuple, pour la première fois, va élire son futur souverain. Tout le monde peut participer... dont l'adolescente de la caste des Gris Anth...