La capitale était enfin en vue. Je soupirai de soulagement, tapotant mes souliers sur le bois vernis de la calèche. Comme j'avais hâte de bondir hors de cette habitacle !Je rêvais de courir jusqu'au château retrouver les miens avec délices.
- La reine ! C'est la reine ! La reine est de retour !
Le cri d'allégresse se propagea comme une traînée de poudre dans les rues de la capitale et je souris. Je me laissais aller tout contre mon siège. J'étais épuisée et en même temps débordante d'énergie, un mélange détonnant.
Le carrosse fut rapidement encerclée d'une large foule et je me redressais, anxieuse. Nous ne pouvions plus avancer, plus bouger. Les gardes royaux tentaient de faire circuler la foule, de nous frayer un passage, mais c'était peine perdue. La foule se faisait de plus en plus dense. Des coups furent portés sur la carrosserie et je sursautais violemment. Les cris de joies se muaient progressivement en hurlement de colère et de désespoir.
Je saisis la main d'Ewen dans la mienne alors que je sentais mon cœur battre plus violemment dans ma poitrine. La voix du roi résonnait encore dans ma tête : "alors qui veut se venter d'avoir tué le roi ?" Mon cœur se serra brutalement. Je les entendais m'appeler, hurler mon nom. Je serrais les poings et m'avancer pour ouvrir la portière. J'entendis vaguement Ewen m'inciter à la plus grande des prudences. A la moindre étincelle...
J'ouvris largement la porte et me redressais vaillamment. Alors, qui veut se venter d'avoir tuer le roi ? Je secouais vivement la tête. Il fallait que je me sorte cette vision de l'esprit ! Je sautais du carrosse un peu maladroitement, me réceptionnant en vacillant sur mes jambes engourdies par l'immobilité. Le silence se fit brusquement. Je me redressais et me tins bien droite face à eux. Il m'avait demandé ? Et bien, j'étais là. Je leur adressais un grand sourire. Je les entendais murmurer sans distinguer leur dire. Mais je ne revenais pas les mains vides.
- Mes chers amis, commençais-je joyeusement, ravie de mon tout premier succès commercial.
- Déserteuse !
Cette exclamation ténue me retourna l'estomac. Je me stoppais nette. Il y eut de nouveau ce silence, froid et glacial.
- Je reviens de...
Un caillou m'arriva en pleine tête et je poussai un cri de surprise. Déserteuse ! Je me frottai la joue avec effroi. A grand cri, j'entendis qu'on me reprochait mon départ d'un mois. Je m'insurgeais ! J'avais fait ça pour eux ! Pour nous ! Pour que l'on n'ait plus jamais faim, ne le comprenait-il pas ?
- Mon fils est mort pendant que vous étiez partie, Votre Majesté, hurla soudain quelqu'un.
Je serrais les poings le cœur battant, cherchant vainement d'où provenait cette voix.
- Mon père est mort pendant que vous nous abandonniez, Votre Majesté !
Je fis volte-face cherchant de nouveau le propriétaire de cette voix féminine.
- Je n'ai abandonné personne, hurlais-je, je voulais juste...
Ma voix fut couverte par un brouhaha, on me traitait de menteuse, de déserteuse... Je sentis la main d'Ewen me saisir le bras pour me tirer en arrière. Les cris reprirent. Le frère, la soeur, la tante, la cousine, l'amie, la nièce... Tout se perdait brusquement, se mêlait, je me sentais prise dans un tourbillon. Les larmes me vinrent alors que la liste ne semblait plus finir...
- Sécurité, Nourriture, Respect, où est ce que vous nous aviez promis, Votre Majesté ?
Ces mots se détachèrent nettement de la liste des doléances. Cela faisait un mois qu'ils attendaient ! Un mois qu'ils attendaient que je daigne tenir mes promesses ! N'avaient-ils pas assez souffert sous l'ancien despote tyrannique ? Je restais muette, la bouche entrouverte. Je... Ils se mirent tous à scander ce slogan... Mes mains devinrent moites.

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Souffle la liberté
FanfictionMoi, je vais tenter de devenir reine. Moi, fille inconnue du royaume d'Ehiropa je vais participer au Choix. Le peuple, pour la première fois, va élire son futur souverain. Tout le monde peut participer... dont l'adolescente de la caste des Gris Anth...