14.

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Je descendis les escaliers et commençais à ouvrir chaque porte du premier couloir. Différentes salles m'accueillir, toutes grandes et lumineuses. Je me précipitais vers la large fenêtre et observais le jardin à la française particulièrement symétrique. Je collais mon nez contre la vitre et le contact froid me fit sourire doucement. Je devais y aller !

Je dévalais les escaliers en courant et me retrouvais dans un hall gigantesque. Je levais les yeux vers le plafond. De magnifiques peintures l'ornait... J'aurais pu les contempler, le nez en l'air indéfiniment... Mais j'avais un jardin à visiter ! Je courus vers l'extérieur et pris appuis sur la rampe en acier délicatement forgée du perron. Sur la pointe des pieds, je tentais de distinguer le plus loin possible la forme si travaillée de chaque buisson. Je descendis et déambulais dans le jardin, suivant joyeusement les allés sinueuse, inspirant avec délice l'odeur délicatement sucrée des fleurs les plus raffinées... Un mode qui m'était inconnu s'offrait aujourd'hui à moi... Avec ses coutumes, ses beautés et ses joies à venir, j'en étais certaine ! Je tournoyais sur moi-même, enivrée par tant de beauté. Et soudain, au détour d'un chemin, une verrière se dressa, majestueuse, devant moi. Je m'approchais des vitres et tentais de regarder ce qui se cachait à l'intérieur. Une végétation prolifique me bouchait la vue...

- Eh, cria quelqu'un derrière moi, cette endroit est privatisé par ces Majestés !

Je me retournais précipitamment et reculais jusqu'à ce que mon dos soit collé au verre épais derrière moi. Un jeune garçon, à mon plus grand soulagement, se posta devant moi, visiblement mécontent. Ses lèvres s'étirèrent en une moue dubitative lorsqu'il me détailla des pieds à la tête. Je soutins son regard, tentant de maîtriser mes rougissements... Peine perdu, je devenais rouge cramoisie !

- Pardon, balbutiais-je, gênée, je savais pas.

Le garçon sembla brusquement effrayé. Il exécuta une courbette devant moi. J'en restais bouche bée.

- Mademoiselle, bégaya-t-il avec empressement, je n'avais pas connaissance de votre statut. Pardonnez mes paroles malheureuses.

Il resta courbé ainsi devant moi. J'ouvris de grand yeux surpris. Quoi ? Pourquoi tant de fioritures ? Et.... pourquoi ne se relevait-il pas ?

- Il n'y a que les demoiselles candidates du Choix pour ne pas connaître le statut particulier de ce lieu, murmura-t-il. Excusez ma rudesse.

Il attendit un instant puis leva craintivement la tête vers moi.

- Puis-je me redresser, demanda-t-il soudain timidement.

Je m'empressais de répondre de manière positive. Il s'exécuta donc, me fixant avec respect. Je le fixais en retour... Il ne savait pas qui j'étais... Sinon, il m'aurait craché au visage, exigeant de me voir baisser l'échine devant lui ! Il me prenait pour une demoiselle... Un sentiment de fierté et de joie me pris. Je devais être sur le bon chemin ! S'il pensait que j'étais une demoiselle, alors d'autres le penseraient aussi ! Et j'aurais une place dans cette compétition ! Je souris face à ces réflexions... Je n'étais pas mal partie finalement ! Plus je resterais dans le Choix, plus j'aurais la chance d'avoir accès à la connaissance, plus ma famille aurait de compensation....

- Voulez-vous visiter les écuries, demanda le jeune garçon, me sortant de mes pensées.

J'acceptais et le suivis jusqu'à un grand bâtiment. L'odeur caractéristique des équidés emplit mes narines et j'inspirais à plein poumon cette fragrance peuplant les souvenirs de mon enfance. J'avais longtemps joué dans des écuries ... Je souris distraitement à ses souvenirs. Le jeune garçon me teint la porte et exécuta une nouvelle révérence devant moi. Je le remerciais et entrais. De nombreux chevaux se trouvaient là... Ils étaient nerveux... J'entendais le bruit de leur sabot claquant bruyamment sur le sol... Leur frustration résonnait dans la pièce...

- Ils sortent souvent, demandais-je, mi-horrifiée, mi-émerveillée.

Le garçon haussa simplement les épaules. Il n'en savait rien. Puis, il se saisit d'une brosse et m'annonça qu'il avait du travail. Je le suivis jusqu'au box du dénommé "Flammèches". Je le caressais doucement alors que l'écuyer rentrait lui faire un brin de toilette. Je plongeais mes yeux dans ceux, sombres, du plus vieil ami des hommes. Ce regard animal était... Puissant. Je me sentais si petite face à mon propre reflet dans ses yeux. Je lui flattais doucement l'encolure en lui parlant doucement. Je lui racontais des choses anodines. Le cheval d'un noir brillant soufflait doucement sur mes mains, les réchauffant délicieusement. Je lui souris. Il était beau... Magnifique ! Je l'embrassais sur les naseaux et il secoua la tête. Je me reculais en riant.

- Je crois qu'il vous aime bien, mademoiselle, s'exclama le jeune écuyer.

Je lui souris.

- Tu crois ?

Le jeune homme se figea et me regarda étrangement. Je détournais la tête et repris mes jeux enfantins avec le cheval. Mais je sentais son regard suivre chacun de mes mouvements.

- J'en suis certain, mademoiselle, me répondit-il après plusieurs minutes à me fixer intensément.

Je me stoppais et nous nous regardâmes. Il se racla la gorge pour reprendre contenance et alla me chercher une chaise. Il m'invita à m'y asseoir. Je le remerciais sans rien en faire. J'offris un quartier de pomme au magnifique étalon qui me surplombait. Il hénissait doucement mais son râle se perdait au milieu de brouhaha de l'écurie. Soudain, des bruits de pas résonnèrent. Je tournais la tête. Le prince arrivait. Sa démarche toujours si caractéristique de son orgueil me troublait. Il s'arrêta près de moi mais ne m'accorda pas le moindre regard. Quant à moi, je ne pouvais pas détacher mes yeux de sa personne. Il semblait briller d'une lumière si particulière... L'écuyer lâcha sa brosse et effectua une révérence des plus parfaites. Le prince daigna lui accorder un micro-signe de la tête. Il caressa doucement le museau de "Flammèches", passant son bras à quelques millimètres de mon visage. J'avais un très belle vision de chacun des poils qui ornait son bras majestueusement tendu. Il m'ignorait... Je pinçais les lèvres mais ne dis rien.... Cela me blessait de voir avec qu'elle plaisir il se jouait ainsi de moi... Je sentis ma gorge se nouer et je fermais les yeux de honte. Ne pas pleurer, ne pas pleurer.... Lorsque je rouvris les yeux, le prince avait disparut. Totalement. Je repris mes tendres caresses et enfouis mon visage dans la crinière de l'étalon. J'humais son odeur, les yeux clos.

- Toi au moins, tu m'ignore pas, hein, chuchotais-je doucement.

Je tournais ensuite la tête vers la chaise. J'imaginais s'installer dessus la plus élégante des princesses... Je la fixais, immobile, alors qu'elle lissais sa magnifique robe et remettais une mèche de cheveux de sa coiffure si élaborée... Je n'étais pas comme elle ! Et je ne voulais pas l'être ! Comment pourrais-je simplement m'asseoir à regarder le jeune homme travailler ? Je m'avançais d'un sceau et saisit une brosse avant d'entrer dans le box de Flammèches. Un regard surpris me suivit tout le long de cette manœuvre...

- Mademoiselle...

- Je ne suis pas une demoiselle, le coupais-je fermement.

J'entrepris de commencer à démêler les crins du bel étalon alors que je sentais les yeux de l'écuyer sur moi. Je l'ignorais et continuais tranquillement en chantonnant un vieux refrain. Bizarrement, je me sentais en paix avec moi-même... Comme si j'avais réalisé quelque chose d'important ! Et c'était le cas ! Je n'étais pas une demoiselle... En déclarant cela, j'avais libéré une parti du poids que je sentais sur mes épaules... Non, je n'étais pas une demoiselle et si en devenir une impliquait de trouver en moi la même flamme d'arrogance que celle du prince, je refusais de réaliser cette transformation !

- Euh... Je m'appelle Peter Mellyneau...

Je me tournais vers le jeune homme. Puis, je lui tendis la main. Il ne sut que faire et me regarda fixement... avant de me la serrer.

- Fifi, répondis-je.

Il me regarda l'air de dire "Fifi...Juste Fifi ? ". Je répondis à sa question muette par un hochement de tête avant de me remettre au travail.

Souffle la libertéOù les histoires vivent. Découvrez maintenant