En rentrant à la villa des Ponti, chacun se mit au travail pour cuisiner sa spécialité. C'était bizarre de les voir tous aussi sérieux, préoccupés par leur recette. Même Frazer semblait absorbé dans la confection de sa pita au jambon. J'observais ses mains puissantes malaxer avec dextérité la pâte. Quesqu'il était beau...
Il choisit ce moment-là pour se tourner vers moi et croiser mon regard. Je sentis mes joues rougir.
- Tout va bien Luce ? demanda-t-il.
- Parfaitement, souris-je.
En joignant le geste à la parole, je cassai l'œuf dans le plat. Enfin... Plutôt sur la table. Frazer pouffa. Je lui jetai un regard noir et sentit mes joues s'empourprer à nouveau. Mince...
Camille qui avait elle aussi assisté à la scène me tendit une feuille de papier absorbant et ne commenta rien. Je la remerciai et nettoyai les dégâts en essayant d'oublier le regard moqueur de Frazer rivé sur moi.
- Si ce gâteau est bon, je fais un bain de minuit ! railla-t-il.
- C'est ça, rigole bien ! soupirai-je. Si le jambon de ta pita n'est pas avarié, je t'accompagne !
Il ouvrit de grands yeux.
- Sérieusement ?
J'haussais les épaules. Je ne comptais pas vraiment tenir ma promesse, mais je savais que lui non plus alors il n'y avait pas de raison de paniquer.
Une trentaine de minutes plus tard, on avait tous fini nos chefs d'œuvres qui cuisaient patiemment ou refroidissaient, ça dépendait des cas. Camille était monté dans sa chambre pour se préparer, les Ponti buvaient un cocktail au rhum sur leur terrasse et Frazer et moi étions assis dans le salon.
- Alors, dis-moi, c'est qui Théo ? m'enquis-je, curieuse d'avoir plus de réponse.
Il me regarda d'un drôle d'air.
- Tu ne lâcheras jamais le morceau ?
- Je ne sais pas...
- C'était il y a un an. J'étais à la dérive. Je n'ai pas envie d'en parler. Je n'ai même pas envie de m'en souvenir.
Je me mordis les doigts. Il ne plaisantait pas. Qu'entendait-il par « j'étais à la dérive » ?
C'est cet instant que choisir Valérie pour entrer dans la pièce, nous saluant tous deux d'un sourire.
- Les enfants, on part dans une demi-heure. Il faudrait penser à vous préparer.
J'acquiesçai et sorti de la pièce pour rejoindre ma chambre. Cette fois, je ne me trompais pas une seule fois de porte ou de couloir ! J'hésitai quelques secondes entre un chemisier pourpre et une robe en mousseline bleue avant de me décider pour le haut à épaules découvertes blanc. Rien de très chic ou excentrique. C'était juste un barbecue entre amis, m'avait-on dit. Pas besoin de se mettre la pression.
Lorsque nous arrivâmes sur la plage, il y avait déjà un monde fou. L'endroit était à couper le souffle. On se serait cru sur une vraie carte postale sauf que tout était bien réel, de la couleur turquoise de l'eau à la sensation des grains de sables sous les pieds. Le ciel était dépourvu de nuages et l'ambiance semblait légère, amicale. Dans un coin, un barbecue faisait griller des merguez et des saucisses. Tout près, une grande table avait été posée pour accueillir tous les mets. Elle était déjà bien pleine, et les plats que je découvrais les uns après les autres semblaient tous délicieux. Une vingtaine de personnes devaient être présentes. Certains se prélassaient, d'autres dansaient au son d'une musique espagnole diffusée par des enceintes mouches quand d'autres encore discutaient ou riaient à gorge déployée. J'en repérai aussi quelques un dans l'eau et des enfants couraient dans tous les sens.
La famille Ponti s'approcha d'un premier groupe de gens et me présentèrent. Je sentis mon malaise s'accroître. Ils étaient tous d'une extrême gentillesse mais je me sentais un peu perdue entre tous ces gens que je ne connaissais pas et qui me serrait la main en roucoulant leur nom à quimieuxmieux. Comme si mon cerveau allait enregistrer trente noms différents !
Quand les présentations et les salutations furent finies, Frazer me tira pour m'emmener plus loin, près d'un rocher où quelques jeunes étaient déjà là. Je remarquai que la musique était plus forte et qu'ils avaient leur propre nourriture. Des chips, des bonbons et de l'alcool.
La première des quatre adolescents avait de longs cheveux blonds et ressemblaient comme deux gouttes d'eau à la fille assise à côté d'elle. Elle arborait un sourire rieur et semblait charmante. J'en déduisis que ce devait être une des deux jumelles suisses, Claire ou Margaux.
Frazer s'assit et passa son bras autour de la frêle silhouette de la deuxième jumelle.
- Salut toi, murmura-t-il.
- Salut ! Je suis trop contente de te voir !
Ils étaient indéniablement proches. Bizarre. Frazer ne m'avait pas parlé d'une relation...
- Je m'appelle Margaux, dit la fille en se desserrant de l'étreinte de Frazer. Et voici ma sœur jumelle Claire. J'ai entendu dire que tu faisais des cours de soutiens à notre pauvre Frazer. Je te souhaite bonne chance !
Ils rirent tous et je fis mine d'esquisser un vague sourire mais le cœur n'y était pas. A quoi avais-je pensé ? Que j'étais la seule fille qu'il fréquenterai de l'été ? Margaux avait cette beauté insolente, ce genre de petit truc qui vous captivait sans même que vous vous en rendiez compte. Pas étonnant que Frazer soit avec elle...
Une fille plus petite, un peu pâlotte et les cheveux bruns, se présenta. Elle s'appelait Mallory et le garçon à côté d'elle était son frère, Dan. J'appris par la suite qu'ils avaient respectivement quatorze et dix-sept ans.
- Les Cabernet ne sont pas là cet été ? s'étonna Frazer.
Margaux secoua la tête.
- Ils ne viendront que dans quelques jours. J'ai entendu dire que la pauvre Cassandre s'était cassé un ongle lors de son dernier ballet, ce qui a engendré dix jours de repos obligé.
Tout le monde pouffa et je fus obligée de rire à cette absurdité moi aussi. C'était trop drôle.
- Oh arrête, tenta Frazer entre deux quintes, les sœurs Cabernet ne sont pas si terribles. Ce sont justes des princesses des temps modernes.
- Des princesses sacrément sexy, ne put s'empêcher de rajouter Dan.
Mallory lui lança un regard complice.
- On sait tous que tu as un faible pour Anastasia, le taquina-t-elle.
- Ce n'est pas moi qui ait flirté avec Natasha l'été dernier, dit-il en jetant un coup d'œil à Frazer.
Je suivais la discussion sans comprendre. Combien étaient-elles au juste ?
- Elles sont cinq, m'expliqua Claire qui sembla capter mon air affolé. La plus petite a 9 ans. C'est la pire. La plus grande a dix-huit ans. Frazer était amoureux d'elle passé un temps.
- D'accord, dis-je en tentant de retenir toutes les informations qu'on me donnait. Et... Comment sont-elles exactement ces filles ?
- Oh, soupira Mallory, tant que tu n'as pas rencontré les Cabernet, c'est dur à expliquer...
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90 jours ensemble
Romantik""Lorsque Frazer m'a proposé de jouer, j'ai d'abord dit non. Comment pouvait-il croire que je l'accompagnerai en Croatie tout l'été, juste parce que les dés en avaient décidé ainsi? Puis oui. Parce que c'était fou, incroyable, irréel. Parce que ça...