Lorsque la silhouette de Frazer fendit la foule, mon cœur fit un bond dans ma poitrine. Il était d'une beauté stupéfiante, comme toujours. Mais aujourd'hui encore plus. Sa coupe n'était pas aussi bien travaillée que les jours où il venait au lycée et on voyait clairement qu'il ne se souciait pas de ce que les autres pensaient de lui en ce moment. En même temps, il était beau naturellement.
Il salua son père et sa mère tandis que je regardai la brunette qui marchait à côté de lui. Elle aussi été jolie avec ses cheveux courts coupés au carré et son petit air indescriptible, mélange de fatigue, tristesse et fougue. C'était donc la fameuse Camille.
Lorsque Frazer s'approcha de moi pour me dire bonjour, je sentis mon malaise s'accentuer.
- Salut Frazer. C'est sympa de travailler avec toi cet été, dis-je poliment en tendant ma joue pour
Lorsque je fus près de son oreille, je murmurai :
- Je vais te tuer sal con.
- Oui, j'espère pouvoir remonter mon niveau ! C'est gentil à toi d'avoir accepté le travail ! sourit-il hypocritement.
Il tendit l'autre joue.
- C'était la seule solution Luce, chuchota-t-il.
- Qui est Camille ? Demandai-je
- Cam ? C'est ma copine ! répondit-il.
Je me raidis et m'écartai instinctivement de lui tandis que Camille elle-même s'approchait pour me faire la bise. J'eus un mouvement de dégout doublé d'une pointe de jalousie. Elle était magnifique et à côté je faisais piètre figure, comme la version périmée d'un sublime gâteau au chocolat.
- Je rigole ! s'exclama-t-il, c'est ma sœur !
- Bouffon ! m'écriai-je.
Camille me lança un petit regard amusé.
- On a un an d'écart, précisa-t-elle. Mais bien plus en maturité malheureusement.
Je levai les yeux au ciel et ignorai pertinemment Frazer pour le moment. Ca commençait bien.
- Bon, dit Valérie, qui ne semblait s'être rendue compte de rien, j'ai faim ! Vous avez faim ?
- Je suis affamé ! insista Frazer.
- Moi aussi ! ajouta Camille. Que voulez-vous manger ?
Nous regardâmes autour de nous. Il n'y avait rien pour manger. Camille m'expliqua qu'il fallait passer une zone de sécurité et que les restaurants et magasins se trouvaient de ce côté-là. Comme je ne savais pas exactement de quoi ils parlaient, je décidai de les suivre. Nous enregistrâmes nos bagages sur une sorte de tapis roulant avant de faire la queue pour passer ce qu'ils appelaient le contrôle de sécurité. Lorsque ce fut mon tour, je me déchaussai, plaçai mon téléphone dans une petite barquette et passai le scanner, qui bipa. Comme si j'allais trimballer une arme sur moi. Je regardai autour de moi, terrifiée de voir ce qui allait se passer, mais personne ne semblait être affolé. Et bien quoi, je bipai et personne ne disait rien ? Bizarre. Une femme me fit signe de m'approcha et me tapa sur le corps en appelant ça « fouille ». Comme elle ne trouva rien, elle me laissa reprendre mon sac et partir. Quand je quittai le contrôle, toute la famille m'attendait de l'autre côté.
- Pourquoi personne n'a réagi bizarrement quand j'ai bipé ? demandai-je à Frazer.
Il resta perplexe quelques secondes puis éclata littéralement de rire.
- Qu'as-tu cru ? Que tu étais une terroriste ? Le scanner bipe aléatoirement, toutes les dix-quinze personnes !
- Ah...
- Dis-moi, c'est la première fois que tu prends l'avion ?
- Oui.
- Ah... Ceci explique cela.
Camille avait raison. L'espace maintenant était tout à fait différent, empli de boutiques et d'endroits pour manger. Frazer se dirigea instinctivement vers une petite pizzeria. Nous nous asseyâmes à une table tandis que Valérie vérifiait le temps qu'il nous restait avant de décoller. Une heure.
Lorsque le serveur arriva pour nous tendre la carte, Camille et Frazer se battirent quasiment pour l'avoir en premier. Chacun commandait une pizza énorme et des assiettes pleines de frites. Pour ma part, je n'avais franchement pas faim alors je me contentai d'une demi pizza à la bolognaise.
- Au fait Lucie, dit Raphael en se tournant vers moi, pour ton job...
- Oui ? minaudai-je en lançant un regard assassin mais discret à Frazer.
- Je voulais juste m'assurer que tout était clair et que tu étais d'accord avec ce qui était convenu.
- C'est-à-dire deux heures de travail par jour sauf les samedi et dimanche bien sûr. Nous te payerons dix euros de l'heure, évidemment.
- C'est... Très bien.
Je fis un rapide calcul dans ma tête. Ce plan foireux pouvait bien me ramener mille euros... Mais il fallait que je donne des cours à Frazer.
- Tant mieux, sourit Mr Ponti.
Nos plats arrivèrent sur la table quelques minutes plus tard et Frazer et sa sœur attaquèrent les leurs sans attendre.
- Ne mange pas trop vite, ronchonna Mme Ponti à son fils, ce n'est pas bon pour ta santé.
- Et mauvais pour ta ligne, se senti obligé de rajouter son mari.
Frazer détourna les yeux et se mordit la lèvre. Depuis le début j'avais remarqué que si Mr et Mme Ponti semblaient cordiaux et gentils avec moi, ils ne rataient pas une occasion pour sermonner leur fils. Etrange.
Quand le repas fut fini, Raphael sorti un gros billet de sa poche et le posa sur la table. J'insistai plusieurs fois pour payer ma part mais ils refusèrent chaque fois prétextant que j'étais leur invitée. Mr Ponti avait la main large quant à l'argent et donnai sans franchement compter. Surement un truc de riche.
Une voix dans le haut-parleur annonça que notre vol en direction de la Croatie était prêt pour embarquer. Nous nous dirigeâmes vers la queue et quand ce fut mon tour, je montrai mon ticket à l'hôtesse. J'étais place 15 A et Frazer était 15 B.
Je m'assis, bouclai ma ceinture nerveusement et Frazer qui avait pris place à côté de moi me sourit en remettant ses cheveux en place. Mon dieu qu'est-ce qu'il était beau...
- Pense à respirer, dit-il juste. Le premier décollage est toujours stressant, le deuxième c'est comme regarder un film, tu ne le vois pas passer. Après, on s'habitue...
- Merci.
Il secoua la tête et se renfonça dans son siège. Une autre hôtesse de l'air passa près de nous pour fermer les coffres à bagages avant de se poster au centre de l'avion pour mimer les consignes de sécurité. Je frémis en les entendant.
Puis l'avion commença à rouler et la piste bougea devant mes yeux, lentement puis de plus en plus vite, tandis que mon souffle devenait saccadé. Et tandis que je sentais mon appréhension se multiplier par dix, Frazer glissa ses doigts dans les miens...
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90 jours ensemble
Romance""Lorsque Frazer m'a proposé de jouer, j'ai d'abord dit non. Comment pouvait-il croire que je l'accompagnerai en Croatie tout l'été, juste parce que les dés en avaient décidé ainsi? Puis oui. Parce que c'était fou, incroyable, irréel. Parce que ça...