Chapitre 1

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Tandis que je fermais les derniers cartons, le bruit du camion de déménagement se fit entendre.

Comme à son habitude, ma mère était au travail. Quant à mon père, assis tranquillement, il discutait au téléphone, probablement avec l'un de ses joueurs, comme si de rien n'était.

Il y avait des moments où j'avais envie de leur dire : 

"Coucou, vous souvenez vous que vous êtes mes parents ?"

Mais à quoi bon ? Après tous mon père ne changera jamais, toujours à s'occuper de son équipe et ma mère contribue financièrement à notre bonheur depuis ma naissance... Après tout, je déménage juste à 450km de la maison...

Le poids du départ, de la séparation, se ressentait dans chaque recoin de la pièce. Mon père, toujours absorbé par son match à la télévision, semblait ne pas encore réaliser que son petit oiseau quittait le nid.

" Alors comme ça, l'oiseau prend son envol, dit-il d'une voix à la fois moqueuse et nostalgique.

- Papa... je commençai, espérant qu'il comprenne la gravité du moment.

- Je sais, je sais, interrompit-il. Tu t'attends à ce que je te fasse un long discours, mais mon match va commencer. Bon voyage, ma chérie. Et j'espère que ta coloc sera agréable."

Il pose la télécommande et se lève lentement de son fauteuil. Se rapprochant, il saisit doucement mon visage entre ses mains, vieillies par le temps, et dépose un tendre baiser sur mon front.

"Merci papa, et bon match, répondis-je, essayant de cacher l'émotion dans ma voix."

En sortant, le camion de déménagement et son chauffeur m'attend. Le chauffeur, un homme corpulent avec une expression grivoise, m'évalue de haut en bas.

"Mamzelle Kessy Lewis? demande-t-il, un sourcil levé.

Oui, c'est moi."

Il hoche la tête, ses yeux fixés un peu trop bas à mon goût. 

"Où sont les cartons?

- Deuxième étage, chambre à gauche."

Le chauffeur m'ouvre la portière en me demandant comment je vais sans oser croiser mon regard, j'ai presque l'impression que je l'intimide ce qui me fait sourire et me change les idées. 

Un dernier regard vers ma demeure d'enfance, celle qui a abrité mes premiers pas et mes rires d'enfant. Mais avant même que je puisse m'en empêcher, une larme solitaire glisse le long de ma joue. J'espère intérieurement que le chauffeur reste concentré sur la route.

Cela fait déjà une heure que le rythme du train berce mes pensées, et l'envie de m'étirer devient irrépressible. Je me lève, déambulant dans le couloir de la voiture de première classe. Les sièges sont majoritairement occupés par des personnes âgées, plongées dans un sommeil profond. Le paysage monotone qui défile à la fenêtre ne parvient pas à me distraire.

De retour à ma place, mes pensées divaguent vers ma future colocataire. J'espère sincèrement qu'elle ne cherchera pas à devenir mon amie. J'aurais pu choisir un loft pour moi seule, mais l'idée me semblait sinistre. C'est donc ma meilleure amie qui a pris en charge la recherche d'une colocataire pour un loft spacieux de 250 m². La décoration, que j'ai aperçue en photos, évoque la modernité. Cela me laisse penser que ma future coloc ne doit pas être d'un style alternatif ou extravagant. Quant à moi, mon style oscille entre Dolce & Gabbana et Zadig & Voltaire.

Malgré tout, la fatigue prend le dessus et je sombre dans un sommeil profond, éphémère. Mon réveil, juste cinq minutes avant l'arrivée à la gare, me contrarie. L'anticipation d'un potentiel retard me stresse déjà.

Mon ColocOù les histoires vivent. Découvrez maintenant