XI

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Nicolas.


Alors que ma vie défile sous mes yeux, je ne peux me retenir de pleurer.
Je revois mon père pleurant, courant après la voiture grise quand elle nous abandonnait. Mes soirées à le regarder perdre le fil d'un film ou de nos discussions. La peine qui émanait de chacun de ses pores, la tristesse qu'il transpirait, la douleur qui se lisait sur les traits durs de son visage. Je me rappelle eu en avoir marre. Je ne comprenais pas comment il pouvait être triste pour elle alors que ce n'était qu'une femme vénale qui nous quittait. Je ne ressentais que de la haine pour elle. Mais je n'avais aimé une femme alors je ne pouvais pas comprendre me disait-il. Cinq ans après, c'est moi qui pleure après elles. Pour ma mère et pour elle, Sarah. 

Je me penche, ramasse un de mes classeurs sur le sol, fouille le chevet en faisant tomber les trois quarts des choses qui se trouvent dans le tiroir. Je m'appuie contre le dossier du lit, mon bloc de feuilles blanches tremble à cause de mes jambes pliées en-dessous.

Je prends une brève inspiration, écris, rature parce que c'est illisible. J'hurle pour canaliser ma haine, ma souffrance. Je recommence, chiffonne la feuille que j'ai arrachée et la balance de rage dans la chambre. J'ai besoin de lui dire, j'ai besoin qu'elle sache. Je ne veux pas qu'elle croit que tout ce que j'ai fait est de sa faute. Putain non, ça n'a rien à voir avec elle. Je suis désolé honey... je suis tellement désolé...

J'écris. J'écris mal mais tant pis, l'encre noircit bientôt deux pages au même rythme que mes larmes mouillent mon visage. Je m'endors épuisé après avoir fermé l'enveloppe.

*******

Sarah

- Comment cela s'est passé? dis-je en entrant dans le salon de Nicolas. 

Dean hausse ses épaules et pose sa manette sur ses cuisses. 

- Il a beaucoup pleuré, dit-il. Il a hurlé un bon nombre de fois aussi mais il a refusé que j'entre. Ca fait trois heures qu'il dort. 

Il se tait, semble réfléchir avant de reprendre: 

-  Je me demande vraiment si c'est une bonne chose qu'il fasse un sevrage net comme ça.

Je regarde le salon qui a vraiment récupéré une meilleure allure sans les vidanges de bouteilles que Nicolas laissait trainer.

- Bien sûr que c'est une bonne chose, je réponds. Tu sais, c'est comme pour le tabac. Si tu diminues seulement, tu refumeras un jour la même chose qu'avant. Si tu vires tout et que tu cesses d'un coup, tu y arriveras plus facilement même si les premiers jours sont affreux. 

- Les rechutes existent Sarah, soupire-t'-il.

Oui, je le sais ça mais je n'ai pas envie d'y penser. Si personne ne lui vend d'alcool -parce qu'en plus, il n'a même pas l'âge légal- S'il y a toujours quelqu'un avec lui, je ne vois pas pourquoi il rechuterait.
- Certes, c'est un très long travail que Nicolas entreprend mais il le faut. Etre alcoolique à vingt ans seulement c'est très grave.

- Sinon, demande-t'-il, ça va ta mère?

Je me laisse tomber dans le canapé, un peu étonnée qu'il me demande ça.

- Ça va oui, murmuré-je en jouant avec un fil qui dépasse de la couture du canapé.

- C'est cool.

Je réfléchis à comment tourner ma phrase pour ne pas paraitre garce.

- Je crois qu'elle n'est pas si mal que ça en fait, soufflé-je.

I can't love youOù les histoires vivent. Découvrez maintenant