Jungle Urbaine

7.

Point de vue Deen

Avec les gars on est tous posés chez Théo, Tarik et Brahim inclus. Sauf Nabil et ma baleine de soeur manque à l'appel. Elle est énorme, je comprends qu'elle bougé plus. On est tous bien entamés, nous les mecs. Les filles boivent peu, encore un truc qui me force à me demander si Julyanna est pas un mec. Elle aurait été là et pas enceinte elle serait dans le même état que nous. D'ailleurs je veux être aux premières loges de sa cuite post-accouchement, ça va être énorme comme elle.

- Brahim ? 

Il lève doucement la tête vers moi, le teint pâle, les yeux vides et l'air terrible. 

- Viens on va sur le balcon. 

Il accepte tandis que je me lève trop vite pour ma tête qui se met à tourner. Comme si j'étais en état de tenir une conversation sérieuse. Appuyé à la rambarde du balcon de Théo, je fume ne sachant pas comment lui dire ce que je pense avec tact.

- Qu'est ce qu'il y a, Deen ? 

- T'es pâle comme mon cul, on dirait un putain de dépressif.

Pour le tact on repassera une prochaine fois, Ahmadeen. 

- Non ça va, t'inquiètes. 

- Brahim, j'te connais depuis que t'es haut comme trois pommes.

- On dirait un daron, il pouffe.

- J'avoue, je réponds sur le même ton. Non, sérieux dit.

- Faut que tu le répètes à personne, encore moins à Lyly. 

- Ok, je flippe.

- Mes reins sont foutus, j'suis trop loin sur la liste d'attente et ils veulent m'hospitalisés.

- Mais ? 

- Y'a pas de mais.

- Y'a toujours un mais.

- Je veux pas aller à l'hôpital, crever là-bas non merci.

- Tu vas pas crever.

- Bien sûr que si. 

- On va te trouver un rein, vous êtes compatibles avec Julyanna. 

- Surtout pas, elle en a assez fait pour moi. 

- Vous avec un lien archi chelou, vous en faîtes jamais assez l'un pour l'autre.

- J'ai gâché sa vie, je peux pas lui demander ça.

- Tu l'as tout sauf gâché. J'ai longtemps été jaloux de l'amour et l'admiration qu'elle a pour toi.

- Pourquoi ? 

- Un jour, elle t'as choisis plutôt que moi.

Flashback

Un mois que j'ai quitté le Sud pour la capitale, un mois que j'appelle Julyanna tout les jours et qu'elle répond pas. J'essaye une nouvelle fois aujourd'hui, avec peu d'espoir. 

" - Bon putain je vais finir par porter plainte pour harcèlement ! Fous moi la paix Deen, tu m'as abandonné alors laisse moi bordel !

- Viens vivre à Paris.

- Quoi ? Elle rit nerveusement. Même pas en rêve.

- Pourquoi ? 

- Je veux pas laisser Brahim. 

- Tu choisis ton pote plutôt que ton frère ? 

- Ouais, sans hésitation, lui me laissera jamais. Maintenant va faire ton Parisien, la conscience tranquille et lâche moi la grappe."

Fin du flashback.

- Tu parles, je l'ai laissé quand je me suis barré de Marseille et à cause d'Axelle aussi.

- Mais elle t'a pardonné, elle te pardonnera toujours. Elle peut pas vivre sans toi, elle survivra pas une nouvelle fois.

- Elle a Nabil et bientôt les p'tits.

- Mais eux c'est pas toi, elle a besoin de toi et...

Je m'arrête pour lire le message que je viens de recevoir de Nabil.

De : Nab

Lyly va pas tarder à pondre, ramenez vous

Je souris de toutes mes dents et montre le message à Brahim. 

- On va être tonton, tu veux pas louper ça ? 

- Non, bien sûr que non.

- Alors fait toi hospitaliser.

- Et je dis quoi à Lyly ? 

- La vérité.

- C'est pas le moment de lui dire des trucs comme ça. 

- Va bien falloir pourtant.

- Ou je peux lui dire que je vais voir mon reuf.

- Plusieurs mois ? C'est un sangsue elle te laisserais pas partir plus de deux semaines.

Il réfléchit quelques secondes puis soupire, résigné. Je veux pas non plus briser ma soeur encore une fois mais je lui ai déjà caché le cancer de notre mère je peux pas le faire une deuxième fois, encore moins avec Brahim. Elle ne me le pardonnerait jamais.

- Wow sa mère ! Cri Tarik complètement déboîté. Juju accouche, bougez vous !

- Passe tes clefs de voiture.

Tarik regarde Elisa avant d'explosé de rire malgré le regard noir lancé par sa copine.

- T'es une femme, jamais de la vie je te laisse conduire mon bébé.

- Julyanna l'a fait, pourtant.

- Pendant que je dormais, elle a abusé de mon état.

- Tu dis de la merde, donne tes clefs.

- Non wesh, femme au volant cercueil roulant.

- Mais tu peux pas conduire alors arrête de faire ton macho et passe tes clefs. Maintenant.

Il cède voyant que sa copine ne rigole pas et la suit en traînant des pieds. Je souris devant cette scène. Il fait le dur mais devant sa meuf est un vrai petit canard. Comme nous tous. Naya a trop d'emprise sur moi, c'et flippant.

Point de vue Brahim

Dire à Julyanna que mes reins sont foutus et que je vais bientôt y passer ? Je sais pas si c'est une bonne idée. Je la connais. Elle va me proposer un rein comme elle propose des cacahuètes parce'que nous deux ça a toujours été comme ça. On se dit pas que c'est risqué, on fonce tête baissée parce'que on est liés. Je vais refuser, elle va insister, je vais m'énerver, on va s'embrouiller et au final elle aura ce qu'elle veut. C'est toujours comme ça, mais pas cette fois. Un organe c'est pas rien et pourtant elle me le donnerait sans hésité. Je le sais, j'aurais fait pareil. On est les mêmes. 

On arrive enfin à la maternité et un léger sourire se dessine sur mes lèvres quand je pense que je suis tonton. Après toutes ses galères ma soeur est enfin heureuse et je n'ai pas le droit de briser ce bonheur si fragile. Non, je ne peux pas lui dire.