L'ÉCRAMPOINT (partie 4) -- Un obscur cousin

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Un obscur cousin

Ces théories permettent malgré tout d'éclairer certains usages ultérieurs du mot « écrampoint », qui semble demeurer ensuite associé à l'idée d'un pont avorté ou de brève durée, créant un échange qu'il bloque aussitôt. C'est ainsi que l' « écrampoint » devient, au XIVème siècle, longtemps après la disparition des ponts en eux-mêmes, l'un des noms de l'arc-en-ciel (pont éphémère s'il en est). De multiples mentions d'écrampoints dans des manuscrits de l'époque tendent à prouver le maintien d'une certaine cohérence dans l'emploi de l'expression —mais que faire alors de l' « écrampoing », cet instrument de torture inventé environ un siècle plus tard, et dont l'ingéniosité était d'effectuer, par le biais d'une pince de métal circulaire savamment forgée, une pression sur la langue au plus profond de la gorge du malheureux supplicié, de sorte à en extirper la langue pour l'arracher ? Par manque d'espace et de plus amples renseignements sur cet obscur procédé, nous nous contenterons de le considérer comme une branche éloignée de l'arbre généalogique de notre pont, et n'ayant pas eu, à l'inverse de celui-ci, de descendance connue. Les survivances de l'écrampoint, en revanche, connaissent une certaine pérennité à travers les âges, tout en demeurant soigneusement en marge des dictionnaires, et ce jusqu'à l'aube du XXème siècle où, bizarrement (mais en accord avec l'étymologie contradictoire du terme), il semble s'évanouir dans l'abîme dont il est issu.

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