ÉPISODE 119 - (partie 11/12)
Au moment de remonter sur scène, Red ressentit un sentiment étrange. Une sorte de vide, au cœur de l'anticipation. Dean lui manquait. Il commençait à trouver la soirée longue, une première lors d'un concert. D'habitude, le temps passait trop vite. Mais il fallait à nouveau plonger dans la mélancolie de son passé, avant de se réfugier dans les bras de son aimé.
« C'est pour le show, tu n'es pas obligé de le ressentir. » Good Red était gentil, seulement, il ne trichait pas avec sa musique. Toutefois, il avait appris qu'il n'avait pas besoin d'oublier Dean pour ce faire. Au contraire, il y arrivait avec aisance parce que l'attendait le réconfort et la chaleur de son homme. Edvin le rattrapa au pas de course. Le chef d'orchestre lui sourit puis se pencha à son oreille.
— Si c'est du pareil au même, alors, le temps d'un concert, fais-moi rêver. Fais-nous planer, Red.
Red faillit marquer un mouvement de recul. C'est qu'il devenait entreprenant, le blanc bec ! Un baiser et on se voyait pousser des ailes ?
— Je persiste à dire « dommage que tu ne sois pas une femme », continua Edvin. Que ton cœur soit pris par un autre m'est égal. Ce n'est qu'un détail. Je t'aurais enlevé à ce type, s'il y avait la plus infime possibilité de t'appeler Madame Srzenski.
Red en resta coi. OK, l'homme avait bien caché son jeu. Au fond, il ne connaissait pas grand-chose d'Edvin, à part sa musique, son attitude despotique... et son neveu. La désinvolture du Tchèque était celle d'une personne dotée d'une confiance du type égotique. Ce mâle se définissait comme un dominant. Le sourire en coin, Edvin lui servit une œillade de prédateur ; celle d'un chasseur qui se savait efficace mais préférait sa paresse à la traque. Or la proie, Red, venait de gagner l'attrait d'une conquête, de réveiller son intérêt.
— On aurait fait de beaux bébés ensemble. (Son ton amusé cassa le sérieux de son propos.) Après LOVE, KISSES & ADORE, je ne doute plus de ta fibre maternelle. Et sinon, tu n'aurais pas une sœur jumelle ?
Red avait rarement autant perdu ses moyens face à un congénère. Ce bellâtre l'attaquait par surprise ; ce n'était pas fairplay ! Je rêve ou il est en train de me faire une déclaration ? Edvin ricana.
— Tu verrais ta tête !
Il devança un Red ahuri sur scène, l'empêchant de répliquer.
*
Encore sous le choc de la baffe technique et symphonique qu'il s'était pris, le public se languissait désormais du chanteur. Les « Encore ! » s'étaient mués en « Red Kellin, Red Kellin ! », le seul à manquer à l'appel. Les aficionados des concerts classiques vivaient une expérience unique, tout en remerciant le ciel pour l'absence de fosse.
D'un hochement de tête, Edvin assura aux Beat'ONE que leur diva se portait bien. Le soulagement fut manifeste, lorsque Red fit son entrée héroïque. Jeff harangua de plus belle les Holy Suckers, à présent debout à leur place. Il excita les fans aux mezzanines, accordant la parole à quelques-uns. Red fut reconnaissant envers ce fan-service qui lui octroyait du temps, bien que son bassiste ne se soit pas fait prier. Jeff adorait qu'on l'adule.
Le retour de la salle fut électrique dès les premières notes de GUN ON YOUR TEMPLE. Infecté par l'euphorie de l'audience, le chef d'orchestre, à la mise stricte d'habitude, souriait. Néanmoins, il ne perdait rien de sa concentration, la performance de ses musiciens menée de main de maître. DR MABOUL, sa préférée, fit l'unanimité à l'applaudimètre.
Le public, assistant Red au chant, entamait l'apogée de l'histoire du damné. Meurtri, trahi, désabusé, il envoyait tout valser dans sa folie destructrice, pour asseoir ses propres règles. Rouge démence serait la loi qu'il imposerait aux autres dorénavant. De gré ou de force, on adhérerait à ses idéaux.
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HOT CHILI - saison 4 ▄ PARTIE II
Romans. Quand le rock se marie au classique, les Beat'ONE font des rencontres bénéfiques à l'évolution de leur carrière. Mais l'une d'elles semble vue d'un mauvais œil par Dean, qui pressent des complications pour son couple. ...