Chapitre 25

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Lancelot ignorait quelle attitude adopter, même s'il savait qu'il devait à tout prix protéger l'honneur de celle qui était à ses côtés. Mais jusqu'à présent rien ne lui indiquait que Dame Iris ne sache qui elle était, avec un peu de chance, elle croirait qu'il s'agissait d'une dame quelconque. Il ne dit mot, attendant la suite pendant qu'ils se regardaient dans le blanc des yeux :

- Ce que vous faites est absolument dégueulasse, lui cracha-t-elle finalement, il est votre ami mieux encore, il vous considère comme un frère. Quant à vous, vous savez qu'il vous considère comme la meilleure chose qui lui soit arrivée, et n'hésiterait pas une seconde à sacrifier Camelot ou même sa vie si vous lui demandiez. Et cependant vous osez le trahir de la manière la plus odieuse qui soit.

Il fut alors clair pour Lancelot que Dame Iris était au courant de tout, mais comment s'y était-elle prise ? Ils avaient pourtant pris toutes les précautions qui s'imposaient. Il n'avait pas le choix, mais pour la première fois depuis qu'il en avait tenu une, sa main sur son épée se mit à trembler. Il ne pouvait cependant pas la laisser vivre. Derrière lui, il l'entendit sangloter, et cela seul suffit à le décider. Lancelot, tira alors entièrement son épée de son fourreau :

- Vous êtes encore plus lâche que je ne l'imaginais, siffla Avalone. Vous préférez vous en prendre à moi au lieu de faire face à votre perfidie.

- Cessez de l'insulter, répondit alors Guenièvre en sortant de l'ombre pour se placer entre Lancelot et Avalone. Vous pourrez le traiter de tous les mots sauf de lâche car Lancelot à la bravoure de mille hommes.

- Se cacher et tromper Arthur à la faveur de l'obscurité, c'est cela votre bravoure ? railla-t-elle, Méléangan lui au moins a eu le courage de vous enlever...

- Vous ne pouvez comprendre, commença Guenièvre avant de renoncer car sa voix se brisa en un sanglot.

- Il suffit maintenant, intervint Lancelot, Dame Iris ceci est notre affaire et ne vous concerne en aucune manière...

- Oh si elle me concerne, répliqua-Avalone, et je peux aussi comprendre car il se trouve que j'aime Arthur, et c'est pour lui que je suis ici. Mais cependant je ne me rabaisserai jamais...Non il est hors de question que ...

Elle se tut, ne pouvant poursuivre. Avant cette scène, elle s'était crue profondément détester Guenièvre et Lancelot, et s'imaginait les rouer de coups si jamais un jour elle les prenait sur le fait. Là elle venait de comprendre qu'en réalité la seule personne qu'elle détestait profondément c'était elle-même. Elle leur reprochait le comportement qu'elle-même adoptait, c'était justement ce que lui disait Merlin.

- Vous allez le précipiter à sa perte, murmura encore Avalone, et il ne le mérite pas !

Lancelot fit un mouvement mais Guenièvre l'arrêta car même si elle ne la comprenait pas, elle percevait sa détresse. Elle-même s'en voulait de ses agissements, mais l'attirance qu'elle éprouvait pour Lancelot lui faisait perdre tous ces moyens. Elle l'aimait plus que tout et par-delà tout ce qui les séparait :

- Je l'aime, avoua-t-elle alors à Avalone, elle savait qu'elle n'avait aucune raison de le faire mais elle sentait qu'elle devait se justifier. Je suis consciente du mal que nous causons, mais je l'aime Dame Iris, que puis-je y faire?

Avalone passa une main sur son visage pour essuyer ses larmes :

- Quelqu'un m'a dit un jour que la fin ne justifiait jamais les moyens, et l'amour encore moins, cita-t-elle.

Quelque chose attira son attention, l'empêchant de poursuivre. De vieux démon remontaient à la surface, et cela l'empêchait de se concentrer. Lancelot s'agrippait à son épée, comme s'il lui fallait une ancre pour l'empêcher de s'écrouler, mais il était clair qu'il n'aurait jamais le courage de lui faire le moindre mal. Pourtant tout ce qu'elle disait était vrai, la culpabilité lui fit baisser les yeux. Jamais il ne s'était sentit aussi honteux, pas même la fois où il avait dû monter sur la charrette du nain.

- Je ne dirai jamais rien à Arthur je vous en donne ma parole, leur dit-elle finalement. Je ne le fais pas pour vous mais pour lui, à cause du mal que lui causera cette trahison, même si je sais que je n'ai aucun droit sur lui. Faites ce que vous voulez, fuyez, divorcez mais ne le laisser l'apprendre par personne d'autre que vous, il mérite au moins ça.

Avalone tourna les talons et s'en alla. Elle se moquait de savoir que Lancelot pouvait la rattraper pour l'éventrer. Leurs amours étaient sincères, elle venait d'en avoir la preuve car tout le temps qu'elle avait parlé, ils se tenaient la main, et étaient prêts à mourir l'un pour l'autre.

Il faisait nuit noire et Avalone savait qu'elle n'aurait aucune chance de retourner seule à ses appartements. Elle erra un certain moment dans le château, avant de se ressaisir et demander son chemin.

Quand elle entra dans sa chambre, Merlin l'y attendait. Il détestait ne pas pouvoir se servir de sa magie sur Avalone, car il s'inquiétait à cause de la menace qui pesait sur elle. Quand il vit sa mine, il s'inquiéta encore plus. Il avait été surpris de la voir quitter le diner sans explications et savait que quelque chose se tramait, mais quand il était sorti pour la suivre, elle avait déjà disparu.

Une fois qu'elle se reprit, Avalone qui s'était effondrée sur le lit, lui raconta ce qui venait de se produire. Au fur et à mesure qu'elle progressait dans son récit, Merlin tira un siège sur lequel il s'assit. Avalone avait immanquablement perturbé le cours de l'histoire il en était certain mais il ignorait où s'en porteraient les conséquences. Il était aussi attristé parce qu'elle lui révélait qu'elle renonçait à Arthur, même si c'était ce qu'il lui avait toujours conseillé :

- Ils s'aiment réellement Merlin lui révéla-t-elle, ils s'aiment autant sinon même plus que moi je ne croyais aimer Arthur. pourtant c'est mal... je crois que je ne pourrais jamais pousser  Arthur sur la mauvaise voie même si cela signifie que je doive renoncer à lui. C'est comme ça qu'on devrait aimer et pas autrement.

- Avalone, vous connaissez tout de tout le monde ici, même des choses que la plupart ignorent à leur propos. De plus vous semblez vivre pleinement chaque instant depuis votre arrivée, et vous vous accommodez facilement des situations, c'est assez troublant. Et enfin il me semble que cette situation entre Guenièvre, Arthur et Lancelot, vous affecte plus qu'elle ne devrait. Je crois qu'il est temps que vous m'en apprenez un peu plus sur vous, cela serait plus équitable vous ne croyez pas ?

Un rire nerveux échappa alors à Avalone. Comme on pouvait s'y attendre, Merlin avait tout compris.

- Je...j'ai eu beaucoup de problèmes dernièrement Merlin, avoua-t-elle, de vrais gros problèmes et je ne souhaite à personne de vivre ma vie jusqu'à récemment.

Elle se tut avant de reprendre :

- J'étais avec quelqu'un et ensemble nous avons touché le fond. Mais quand vous avez un compagnon, même de profondes ténèbres vous paraissent moins sombres. Nous vivions ainsi jusqu'à ce que... eh bien il me soit arrivé la même chose qu'à Arthur. Il a trouvé une personne qui l'a tiré vers la lumière et moi j'ai sombré. Voilà.

- C'est pour cela que vous ne chantiez plus ? osa demander Merlin.

- C'est surtout pour cela que j'en profite sans trop me poser de questions car ce que je vis maintenant est certainement la meilleure chose qui puisse m'arriver. Ceci est un miracle même s'il semble imparfait, et il est préférable au chaos absolu, lui dit-elle.

Merlin sourit.  Avalone s'était montrée très vague, mais il comprenait qu'elle avait dû vivre une terrible épreuve. Cependant, loin de l'avoir pervertie ou même anéantie, cela l'avait doté d'une force incroyable et pas seulement physiquement. Et quoiqu'il hésitait au début, il décida de la laisser seule cette nuit-là.

Lost in a fairy taleOù les histoires vivent. Découvrez maintenant