Tribu : La Flamme [Tome 2]

Chapitre 38 : L'empoisonneur (2/4)

— Quel lâche ! invectiva la princesse, mais... Je n'en ai pas finis avec toi.

Diana quitta vite et bien la « boutique » de Yao, temple de la supercherie pour s'engager dans la rue de la cité. Le vieil homme avec sa grande toge courait vite, motivé par la peur. Mais sa coiffe le rendait visible de loin et cela faisait l'affaire de Diana. Il était hors de question qu'elle laisse le Thibéen lui échapper. Trop de zones d'ombres demeuraient dans cette affaire et Yao en savait plus qu'il ne voulait l'admettre, elle était prête à en mettre sa main à couper. Par contre, si elle voulait avoir les réponses escomptées, elle devait lui courir après... maintenant !

Le Thibéen connaissait la ville mieux qu'elle et pourrait disparaître d'une minute à l'autre derrière une bâtisse. Elle ramena la jupe de sa robe au niveau de ses genoux et commença à courir après le « sorcier », ses tresses se balançant à chacun des pas de sa course. Heureusement pour elle, le quartier était calme et il y avait peu de monde à l'extérieur. Cela pouvait s'expliquer par l'horaire. Il était un peu plus de midi, mais le soleil tapait encore trop fort. Les thibéens avertis devaient se reposer à l'ombre pour digérer ou attendre que le soleil baisse.

Yao courrait toujours une bonne dizaine de mètres devant elle, regardant de temps à autre derrière lui, voir si la princesse s'était enfin épuisée. Mais à chaque fois, c'est tout l'inverse qu'il voyait et cela l'encourageait à accélérer la cadence. Bientôt, les deux personnages se retrouvèrent près des docks où là aussi, il n'y avait presque pas âmes qui vivent.

Diana ressentait au fur et à mesure la langueur dans ses jambes et la chaleur l'étouffer avec force. Sa robe n'était pas aussi pratique que cela et ses membres lui faisaient ressentir ce douloureux constat. Dans pas longtemps, Yao la devancerait et elle serait dans l’incapacité de le rattraper. Il s'évaporerait quelque part sur l'île et elle... son enquête se retrouverait au point mort. À cette pensée, elle s’arrêta nette et chercha une solution.

Le bruit des vagues lointaines et la senteur iodée de l'air marin lui en fournit une. Il n'y avait pas de gardes dans la rue, donc personne qui serait en mesure de la dénoncer. Elle dirigea sa main en direction du port, entra en contact avec l'énergie vitale qu'elle contenait et ne fit qu'un pour un instant avec elle. Un mince filet d'eau quitta l'océan et sous la direction habile de Diana, alla rejoindre Yao à la vitesse de la lumière et l'encercla avec force, tel un lasso translucide.

Maîtrisé, le vieux thibéen ne pouvait plus esquisser le moindre geste saucissonné de la sorte. Lorsque la belle brune arriva à son niveau, elle rompit le contact avec l'eau. Sous le relâchement de la pression exercé par l'élément, Yao se retrouva à terre, trempé, sa coiffe à terre révélant un crâne lisse. Sans ménagement, Diana le releva par la manche de son manteau et l'emmena avec force dans un coin de la rue du port à l'abri des regards indiscrets. Elle ne voulait pas être dérangée ou pire être repérée pour ce qu'elle venait de faire. L'utilisation de la force vitale était interdite en ville. Elle savait que malgré les actes du vieil homme, son éducation obligeait, elle devait se montrer respectueuse de son aîné. C'est à grande peine qu'elle y parvint. Pour être sûre de ne pas faire un autre acte répréhensible, elle laissa le vieux Yao collé au mur devant elle, tandis qu'elle prenait appui sur celui d'en face.

C'était curieux, mais elle était persuadée que le vieux Thibéen ne cherchera pas à fuir. Sa démonstration de tout à l'heure lui avait sûrement fait « bonne impression ». Elle attendit qu'il reprenne ses esprits et quand elle constata qu'il la regardait avec une once de peur mais aussi de colère, elle commença son interrogatoire dans les règles de l'art.

— Alors... Comme ça, on se fait de l'argent sur la naïveté des honnêtes gens, siffla-t-elle. Sauf que là, c'est plus sérieux, gronda-t-elle, vous êtes mêlés à une histoire d’empoissonnement. Une tentative de meurtre sur la dame Raïssa Ren-Kholtar, seconde épouse du Grand-Juge... J'espère pour vous que vous avez une sacré bonne explication...