Chapitre 38 : L'empoisonneur (3/4)

40 5 8
                                    

— Non, pas du tout, Votre Altesse. Cet homme m'a aidé lors d'une de mes excursions dans Thibéi et... Je lui avais dit de passer à la Cité Divine pour le rembourser, mais... je n'ai pas assez.

Au grand étonnement d'Alpha, Esteban en prononçant ses mots avaient retrouvé en un temps record sa tête habituelle, mais il préféra ne pas s'attarder sur ce détail.

— Tu veux que je t'aide ?

— Non, Votre Altesse est trop bonne. Nous avons trouvé un terrain d'entente. Je vais m'occuper de ses animaux.

Sans attendre la permission, l'interlocuteur vêtit de noir quitta les deux jeunes hommes sans un autre mot pour Esteban. Son regard faisant le reste. Une fois l'individu partit, Alpha continua plus bas au cas où celui-ci aurait les oreilles longues.

— Tu es sûr que ça va ?

— Oui.

— Cet homme ne m'inspire pas confiance.

— Oh, ne vous en faites pas. Il a l'air comme ça, mais ce n'est pas un mauvais bougre.

— Pourtant, il n'avait pas envie de te laisser partir. Qu'est-ce qui a autant traîné ?

— Je lui demandais des renseignements sur ses bêtes... ce qu'elles mangeaient et... voilà !

— Qu'est-ce qu'elles mangent ?

— De la chaire humaine. Enfin, c’est ce qu'il m'a dit, hein. Il a dû dire ça pour plaisanter, ria-t-il. On va à la ménagerie ?

Alpha n'insista pas, même si il avait sincèrement envie de le faire. Quelque chose ne tournait pas rond. Si il n'était pas observateur, il aurait balayé ce phénomène aussi vite que le souvenir de son premier anniversaire. L'homme à qui parlait Esteban n'était pas encore partit. Le Bellevuain l'observa monter sur un dromadaire et s'en aller avec sans doute son escorte personnelle.

Esteban ne s'était pas fait aider par n'importe qui. Ce groupe d'homme n'avait pas l'air des plus aimables et sûrement pas de ceux avec qui il fallait se lier d'amitié sous peine de recevoir un châtiment au moindre faux pas. Autre chose, les mots qu'Esteban avait prononcé n'était pas exactement similaire au contenu de la conversation que lui avait reporté le jeune homme.

En entendant la conversation de loin, il avait plutôt eu l'impression que c'est Esteban qui vendait quelque chose. Durant tout l'après-midi, le Bellevuain essayait de faire taire les soupçons qui pesaient sur son « ami », mais il avait de plus en plus de mal à sourire et parler au jeune homme sans penser à la conversation qu'il avait eu plus tôt avec l'étranger. Au final, que savait-il du Montaudréen ?

***

Diana était revenue à la Cité Divine aussitôt après avoir laissé le vieux Yao derrière elle. Elle ne l'avait pas dédommagé pour le bazar dans sa boutique et après réflexion, elle pensait bien qu'elle ne le ferait jamais. Ce serait comme encourager sa vie de mensonge. Elle voulait bien admettre que la reconversion après avoir été gardien soit difficile, mais passer d'agneau à loup, c'était un raccourci un peu facile. De toute façon, elle savait que le vieil homme avait sûrement dû emmagasiner les richesses que ses clients lui avaient donné pour ses prestations. Une jolie petite somme à coup sûr devait dormir dans un coffre fermé à double tour. Demain, plus personne n'entendrait parler du vieux Yao qui se faisait passer pour un sorcier.

Elle voulut passer dans sa chambre, mais elle se rendit compte bien vite en se retrouvant dans l'aile réservée aux invités masculins que ce n'est pas exactement ce qu'elle voulait. Il est vrai qu'avant ça, elle avait pensé naïvement qu'elle aurait pu gérer ses révélations seules. Elle avait imaginé le vieux thibéen lui donner le nom du coupable sur un plateau d'argent et elle, revenant triomphante à la Cité Divine dénoncer ce vil personnage. À la place, elle avait une nouvelle mission : découvrir qui se cachait derrière le masque de Macina.

Tribu : La Flamme [Tome 2]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant