Tribu : La Flamme [Tome 2]

Chapitre 6 : De l'autre côté (1/2)

Royaume de Montaudréanie, ville d'Hertia, nord-est du Territoire

Les murs sombres de la prison se présentèrent à l'homme qui passa la grille de sécurité, séparant le monde civilisé de la barbarie qui se trouvait entre ces murs. D'un regard déterminé et à la fois las, il gagna la salle d'interrogatoire habituelle qui lui était assignée. Mais avant d'y arriver, il devait passer un long couloir qui ouvrait sur divers cellules et salles de tortures.

Il entendait les pleurs des prisonniers, leurs râles de douleur, leurs cris d'indignation, leurs silences de résignation aussi. Tout cela ne lui faisait ni chaud ni froid, il y était habitué maintenant. Il était devenu totalement imperméable à cette misère humaine qui faisait partie de son quotidien depuis longtemps.

Ainsi était Gwendal de l'Estador. Fier, il arpenta le corridor et arriva à sa destination. Une salle éclairée seulement par la faible lumière des bougies comme dans un véritable tombeau. Quand on y réfléchissait plus à fond, c'était le seul moyen d'avoir une source de lumière dans ce lieu complètement dénué de fenêtres.

Il s'assit nonchalamment sur l'une des chaises présentes face à une table, la plus imposante bien-sûr. Il attendit patiemment que l'on fasse venir le prisonnier. Il avait prévenu la veille qu'il voulait lui parler dès son arrivée au pénitencier. Par ailleurs, il avait pleinement conscience que sa venue en ces lieux était totalement inutile. Il s'était vite rendue compte que le Prince n'obtiendrait sûrement jamais rien du détenu. Malgré cela, il obéissait aux ordres. En ces temps troublés, il était plus que conseillé d'obéir aux ordres de Thamay de Filatine même si cela paraissait absurde.

Le condamné fit son entrée. Une entrée sans faste. Il était démuni et misérable comme n'importe quel détenu. Gwendal regarda avec une certaine fascination l'homme qui se tenait difficilement devant lui. Dans une autre vie, il devait avoir une forte stature, difficile de l'affirmer. Les divers « traitements » qui lui avait été infligés avait courbé son dos et fait plier ses os, même les plus récalcitrants. Ses fers aux mains et aux pieds diminuaient de beaucoup l'aura imposante qui autrefois, avait fait de lui un être respecté des siens. Il était presque maigre, après tout, comment ne pas l'être avec le peu de nourriture que l'on lui donnait. Ses habits qui se composaient d'une chemise de coton défraîchie et trouée par endroit tout comme le bas, lui donnait l'allure d'un mendiant. Sa barbe, sa moustache et ses cheveux hirsutes le faisaient ressembler à trait pour trait à un galérien. Gwendal put constater que sa chevelure devait être dans les tons roux. Compliqué à définir avec cette crasse qui la noircissait. De nombreux hématomes étaient visibles sur la peau de l'homme quinquagénaire, témoignage de plusieurs séances de torture qui jusqu'à aujourd'hui n'avait pas porté leur fruit.

Malgré cette vision d'horreur, Gwendal ne détourna pas l'oeil et affronta du regard celui qui pendant un temps avait été le chef des Umpass de Montaudréanie. Ordre indomptable qui avait longtemps contrecarré les plans du Prince. Depuis le début de son règne, Thamay n'avait cessé de demander à sa police de les traquer tous jusqu'au dernier afin de les envoyer moisir dans un cachot ou pire, servir d'exemple sur l'échafaud. Ce jeux du chat et de la souris avait duré un temps avant que le souverain montaudréen comprenne une chose : cela ne servait à rien d'attraper les fourmis une à une. Il fallait trouver la fourmilière et de là, agir.

C'est comme cela qu'après qu'un groupe d'Umpass ait pénétré dans le palais lors d'une réception, l'occasion rêvé de les suivre à leur repère s'était présentée. Tout c'était passé avec une facilité enfantine. Les Catacombes, lieu de vie de l'Ordre, avait été découverte. On avait pu capturer certains Umpass. D'autres avaient réussi à fuir et se cachaient toujours. Qu'importe, ils avaient le chef et c'était le plus important.